Jurisprudence : CJCE, 22-02-2001, aff. C-393/98, Ministério Público et António Gomes Valente c/ Fazenda Pública

CJCE, 22-02-2001, aff. C-393/98, Ministério Público et António Gomes Valente c/ Fazenda Pública

A1656AWA

Référence

CJCE, 22-02-2001, aff. C-393/98, Ministério Público et António Gomes Valente c/ Fazenda Pública. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/1008016-cjce-22022001-aff-c39398-ministerio-publico-et-antonio-gomes-valente-c-fazenda-publica
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Abstract

Le 6 avril 2011, la Commission européenne a, par avis motivé, demandé à Chypre de modifier sa législation relative aux barèmes de dépréciation utilisés pour le calcul du montant des droits d'accise appliqués aux motocycles d'occasion, en raison de leur caractère discriminatoire envers les motocycles d'importation.

Cour de justice des Communautés européennes

22 février 2001

Affaire n°C-393/98

Ministério Público et António Gomes Valente
c/
Fazenda Pública



61998J0393

Arrêt de la Cour (cinquième chambre)
du 22 février 2001.

Ministério Público et António Gomes Valente contre Fazenda Pública.

Demande de décision préjudicielle: Supremo Tribunal Administrativo - Portugal.

Impositions intérieures - Taxe spéciale frappant les véhicules à moteur - Véhicules d'occasion.

Affaire C-393/98.

Recueil de jurisprudence 2001 page I-1327

1 Questions préjudicielles - Saisine de la Cour - Questions d'interprétation - Obligation de renvoi pesant sur les juridictions d'un État membre - Renonciation par la Commission à la poursuite d'une procédure d'infraction à l'encontre de cet État membre - Absence d'incidence

(Traité CE, art. 177, al. 3 (devenu art. 234, al. 3, CE))

2 Dispositions fiscales - Impositions intérieures - Système de taxe d'immatriculation pour les véhicules d'occasion - Calcul de la dépréciation réelle des véhicules importés sur la base de critères ou de barèmes forfaitaires - Admissibilité - Condition - Montant de la taxe n'excédant pas la taxe résiduelle incorporée dans des véhicules similaires sur le marché national

(Traité CE, art. 95, al. 1 (devenu, après modification, art. 90, al. 1, CE))

1 Le fait que la Commission renonce à poursuivre à l'encontre d'un État membre une procédure d'infraction concernant une législation déterminée n'a aucune incidence sur l'obligation, pour une juridiction de dernier ressort de cet État membre, de soumettre à la Cour, en application de l'article 177, troisième alinéa, du traité (devenu article 234, troisième alinéa, CE), une question de droit communautaire relative à la législation visée.

(voir point 19, disp. 1)

2 L'article 95, premier alinéa, du traité (devenu, après modification, article 90, premier alinéa, CE) ne permet à un État membre d'appliquer aux véhicules d'occasion importés d'autres États membres un système de taxation dans lequel la dépréciation de la valeur réelle desdits véhicules est calculée de manière générale et abstraite, sur la base de critères ou de barèmes forfaitaires déterminés par une disposition législative, réglementaire ou administrative, qu'à la condition que ces critères ou barèmes soient de nature à garantir que le montant de la taxe due n'excède pas, ne fût-ce que dans quelques cas, celui de la taxe résiduelle incorporé dans la valeur des véhicules similaires déjà immatriculés sur le territoire national.

(voir point 44, disp. 2)

Dans l'affaire C-393/98,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), par le Supremo Tribunal Administrativo (Portugal) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

Ministério Público,

António Gomes Valente

Fazenda Pública,

une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation de l'article 95 du traité CE (devenu, après modification, article 90 CE),

LA COUR

(cinquième chambre),

composée de MM. A. La Pergola, président de chambre, M. Wathelet (rapporteur), D. A. O. Edward, P. Jann et L. Sevón, juges,

avocat général: M. N. Fennelly,

greffier: M. H. von Holstein, greffier adjoint,

considérant les observations écrites présentées:

- pour M. Gomes Valente, par Me J. Sá Pereira, advogado,

- pour le gouvernement portugais, par MM. L. Fernandes et Â. Seiça Neves, ainsi que par Mme H. Ventura, en qualité d'agents,

- pour le gouvernement néerlandais, par M. M. A. Fierstra, en qualité d'agent,

- pour le gouvernement finlandais, par Mme T. Pynnä, en qualité d'agent,

- pour la Commission des Communautés européennes, par M. E. Traversa et Mme A. M. Alves Vieira, en qualité d'agents,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les observations orales du gouvernement portugais, représenté par MM. L. Fernandes et V. Guimarães, en qualité d'agent, et de la Commission, représentée par Mme A. M. Alves Vieira, à l'audience du 8 juin 2000,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 21 septembre 2000,

rend le présent

Arrêt

1 Par ordonnance du 7 octobre 1998, parvenue à la Cour le 5 novembre suivant, le Supremo Tribunal Administrativo a posé, en application de l'article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), trois questions préjudicielles sur l'interprétation de l'article 95 du traité CE (devenu, après modification, article 90 CE).

2 Ces questions ont été soulevées dans le cadre d'un litige opposant M. Gomes Valente à Fazenda Pública (Trésor public), M. Gomes Valente réclamant le remboursement de la taxe automobile qu'il avait acquittée lors de l'importation au Portugal d'une voiture d'occasion en provenance d'un autre État membre.

Le cadre juridique national

3 À la date de l'avis de liquidation de la taxe due par M. Gomes Valente au titre de l'importation définitive de son véhicule, le régime juridique de la taxe automobile portugaise était fixé par le décret-loi n° 40/93, du 18 février 1993 (Diário da República I, série A, n° 41, du 18 février 1993), tel que modifié par la loi n° 10-B/96, du 23 mars 1996 (Diário da República I, série A, du 23 mars 1996, ci-après le "décret-loi n° 40/93"). Ce texte a été plusieurs fois modifié par la suite.

4 La taxe automobile portugaise est une taxe à perception unique, qui est payée lors de la première mise sur le marché portugais, donc lors de la première immatriculation du véhicule au Portugal. Selon l'article 1er, paragraphe 1, du décret-loi n° 40/93:

"La taxe automobile est une imposition intérieure, frappant les voitures de tourisme - y compris les voitures à usage mixte, les voitures de course et celles qui sont principalement conçues pour le transport de personnes, à l'exclusion des mobile homes - admises ou importées comme voitures neuves ou comme voitures d'occasion, y compris celles qui sont montées ou fabriquées au Portugal et qui sont destinées à être immatriculées".

5 Selon l'article 1er, paragraphe 4, du même décret-loi, la taxe automobile varie en fonction de la cylindrée du véhicule et elle est liquidée conformément aux tableaux annexés audit décret-loi, qui font partie intégrante de celui-ci.

6 Aux termes de l'article 3, paragraphe 1, dudit décret-loi:

"Aucune voiture de tourisme, neuve ou d'occasion, ne peut être immatriculée si la preuve du paiement de la taxe automobile n'a pas été présentée à la direction générale de la circulation routière (Direcção-Geral de Viação) au moyen du registre officiel de perception, de garantie ou d'exonération de paiement."

7 L'article 1er, paragraphe 7, du décret-loi n° 40/93, dans sa version résultant des lois nos 75/93, du 20 décembre 1993, et 39-B/94, du 27 décembre 1994, prévoit que les véhicules d'occasion importés au Portugal et qui sont originaires des États membres ou y circulent en libre pratique bénéficient de réductions de la taxe automobile selon le barème suivant:

- après 1 à 2 ans d'utilisation, la réduction est égale à 18 %;

- après 2 à 3 ans d'utilisation, la réduction est égale à 24 %;

- après 3 à 4 ans d'utilisation, la réduction est égale à 32 %;

- après 4 à 5 ans d'utilisation, la réduction est égale à 41 %;

- après 5 à 6 ans d'utilisation, la réduction est égale à 49 %;

- après 6 à 7 ans d'utilisation, la réduction est égale à 55 %;

- après 7 à 8 ans d'utilisation, la réduction est égale à 61 %;

- après 8 ans d'utilisation, la réduction est égale à 67 %.

8 Ces divers pourcentages de réduction de la taxe automobile s'appliquent à la taxe qui serait exigée, à la date de l'importation du véhicule d'occasion, pour un véhicule neuf équivalent. Aux termes du préambule du décret-loi n° 40/93, ces réductions visent à compenser la perte de valeur résultant de l'usure.

Le litige au principal et les questions préjudicielles

9 M. Gomes Valente a acheté en France une voiture de tourisme d'occasion, de marque BMW (modèle 325 turbo diesel), d'une cylindrée de 2 497 cm3, qui a été immatriculée pour la première fois, en France, le 2 décembre 1991.

10 Le 16 septembre 1996, M. Gomes Valente a déclaré au bureau des douanes d'Aveiro que cette voiture était destinée à l'importation définitive et que sa valeur était de 2 500 000 PTE. À la même date, ledit bureau a établi un avis de liquidation de la taxe automobile ("imposto automóvel") pour un montant de 1 856 994 PTE, que le demandeur a acquitté.

11 Le recours introduit par M. Gomes Valente contre cet avis de liquidation ayant été rejeté par un jugement du Tribunal Fiscal Aduaneiro do Porto (Portugal) du 16 octobre 1997, M. Gomes Valente et le procureur de la République près le Tribunal Fiscal Aduaneiro ont interjeté appel de ce jugement devant le Supremo Tribunal Administrativo.

12 M. Gomes Valente soutient que ledit jugement méconnaît la jurisprudence de la Cour relative à l'interprétation de l'article 95 du traité, qui, en raison de l'effet direct de cette disposition, entraînerait l'inapplication au cas d'espèce de la réglementation nationale contraire au droit communautaire. Il fait valoir que, aux points 14 et 15 de son arrêt du 9 mars 1995, Nunes Tadeu (C-345/93, Rec. p. I-479), qui avait pour contexte juridique le régime de la taxe automobile antérieur à celui qui était en vigueur lorsqu'il a importé son véhicule au Portugal, la Cour a jugé qu'une règle limitant la réduction de la taxe pour les voitures d'occasion importées à un certain pourcentage de la taxe perçue sur les voitures neuves du même type, sans que soit prise en compte la dépréciation réelle du véhicule, entraîne une taxation discriminatoire des véhicules d'occasion importés. Selon lui, en dépit des modifications apportées au régime de la taxe automobile à la suite de l'arrêt Nunes Tadeu, précité, la taxe automobile portugaise resterait contraire à l'article 95 du traité parce qu'elle ne serait pas calculée sur la base de la valeur commerciale réelle des véhicules d'occasion.

13 M. Gomes Valente a demandé au Supremo Tribunal Administrativo de saisir la Cour à titre préjudiciel, en lui suggérant les questions suivantes:

"1_. Une législation garantit-elle la parfaite neutralité des impositions intérieures au regard de la concurrence entre produits nationaux et produits importés (en l'occurrence les automobiles) et est-elle compatible avec l'article 95, paragraphe 1, du traité lorsque, comme la législation portugaise, elle soumet les véhicules automobiles légers destinés au transport de passagers, importés d'occasion, à une taxe fixe tenant uniquement compte de la cylindrée du véhicule, avec déduction à la base d'un pourcentage de respectivement 18 %, 24 %, 32 %, 41 %, 49 %, 55 %, 61 % et 67 % (selon que le véhicule importé a de un à deux ans, deux à trois ans, trois à quatre ans, quatre à cinq ans, cinq à six ans, six à sept ans, ou sept à huit ans) de ce que paierait un véhicule neuf (importé ou acheté sur le marché national), un véhicule de plus de huit ans devant payer 33% de la taxe automobile qui grèverait un véhicule neuf (importé ou acheté sur le marché national), sans prendre en compte, dans aucune de ces situations, tous les autres facteurs qui affectent la valeur d'une automobile, tels notamment le kilométrage, l'état et le modèle?

2_. Une disposition nationale est-elle compatible avec l'article 95, paragraphe 1, du traité lorsqu'elle prévoit que la taxe qui frappe le produit importé et la taxe qui frappe le produit national similaire sont calculées de manière différente et selon des modalités différentes, la taxe automobile sur le véhicule d'occasion importé étant calculée sur la base de sa cylindrée, avec une déduction qui est seulement fonction du nombre d'années d'utilisation, alors que la taxe automobile n'est pas due pour les transactions concernant un véhicule d'occasion similaire opérées sur le marché national (puisque, s'agissant d'une taxe à perception unique, elle n'est payée qu'une fois, lorsque le véhicule est mis sur le marché à l'état neuf), et que son prix peut encore incorporer une part résiduelle de cette taxe s'il n'a pas plus de quatre ou cinq ans, que cette part résiduelle est toujours d'un montant indéterminé, qu'elle n'est pas distincte du prix d'achat et qu'il n'est pas possible de la distinguer, notamment parce que l'achat d'un véhicule d'occasion à l'intérieur du pays n'est pas assujetti à la taxe automobile?

3_. Peut-on considérer, à la lumière de l'article 95, paragraphe 1, du traité, qu'un tel régime ne peut pas conduire, ne serait-ce que dans quelques cas, à une taxation supérieure du produit importé et qu'il est conçu de manière à exclure dans tous les cas la possibilité qu'un véhicule importé soit plus lourdement taxé qu'un véhicule national similaire?

4_. Peut-on considérer, à la lumière du droit communautaire, qu'un tel régime est aussi transparent que nécessaire pour permettre de déterminer objectivement si la charge fiscale qui grève une automobile importée excède celle qui grève une automobile nationale similaire?

5_. Un tel régime peut-il, à la lumière du droit communautaire, être appliqué de manière équitable aux produits du marché intérieur et aux produits importés?"

14 C'est dans ces circonstances que le Supremo Tribunal Administrativo a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les trois questions préjudicielles suivantes:

"1) Les questions posées par le demandeur dans la présente affaire et reproduites ci-dessus sont-elles pertinentes? Quelle réponse ces questions appellent-elles en droit communautaire?

2) La dépréciation de la valeur réelle des véhicules d'occasion, à laquelle se réfère l'arrêt de la Cour du 9 mars 1995, Nunes Tadeu, implique-t-elle obligatoirement la nécessité de réaliser une évaluation ou une expertise de chaque véhicule, ou peut-elle être calculée de manière générale et abstraite à l'aide d'un critère déterminé par la loi?

3) Si la Commission retire un recours en manquement déterminé contre un État membre, estimant que la nouvelle législation nationale est désormais conforme au droit communautaire, une juridiction suprême nationale peut-elle, en se fondant sur l'interprétation du droit communautaire et du droit national donnée par la Commission, être dispensée de l'obligation de saisir la Cour d'une demande préjudicielle que lui impose l'article 177 du traité et statuer sur l'affaire conformément à l'interprétation donnée par la Commission?"

Sur la troisième question

15 Par sa troisième question, qu'il convient d'examiner en premier lieu, la juridiction de renvoi demande en substance si le fait que la Commission renonce à poursuivre à l'encontre d'un État membre une procédure d'infraction concernant une législation déterminée a une incidence sur l'obligation, pour une juridiction de dernier ressort de cet État membre, de soumettre à la Cour, en application de l'article 177, troisième alinéa, du traité, une question de droit communautaire relative à la législation visée.

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