Jurisprudence : CJCE, 08-11-1990, aff. C-179/88, pour Birthe Vibeke Hertz, c/ Dansk Arbejdsgiverforening, agissant en tant que mandataire pour Aldi Marked K/S

CJCE, 08-11-1990, aff. C-179/88, pour Birthe Vibeke Hertz, c/ Dansk Arbejdsgiverforening, agissant en tant que mandataire pour Aldi Marked K/S

A8628AU4

Référence

CJCE, 08-11-1990, aff. C-179/88, pour Birthe Vibeke Hertz, c/ Dansk Arbejdsgiverforening, agissant en tant que mandataire pour Aldi Marked K/S. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/1003971-cjce-08111990-aff-c17988-pour-birthe-vibeke-hertz-c-dansk-arbejdsgiverforening-agissant-en-tant-que-
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Cour de justice des Communautés européennes

8 novembre 1990

Affaire n°C-179/88

pour Birthe Vibeke Hertz,
c/
Dansk Arbejdsgiverforening, agissant en tant que mandataire pour Aldi Marked K/S


Recueil de Jurisprudence 1990 page I-3979

Edition spéciale suédoise 1990 page 0567

Edition spéciale finnoise 1990 page 0567

Politique sociale - Travailleurs masculins et travailleurs féminins - Accès à l'emploi et conditions de travail - Égalité de traitement - Licenciement d'une salariée en raison d'absences dues à une maladie trouvant son origine dans la grossesse ou l'accouchement - Admissibilité

(Directive du Conseil 76/207, art. 2 et 5)

Sous réserve des dispositions du droit national visant à la protection de la femme, notamment en ce qui concerne la grossesse et la maternité, prises en application de l'article 2, paragraphe 3, de la directive 76/207, relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail, les dispositions combinées de l'article 5, paragraphe 1, et de l'article 2, paragraphe 1, de la directive ne s'opposent pas aux licenciements qui sont la conséquence d'absences dues à une maladie qui trouve son origine dans la grossesse ou l'accouchement.

Dans l'affaire C-179/88,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 177 du traité CEE, par le Hoejesteret et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

Handels - og Kontorfunktionaerernes Forbund i Danmark, agissant en tant que mandataire pour Mme Birthe Vibeke Hertz,

et

Dansk Arbejdsgiverforening, agissant en tant que mandataire pour Aldi Marked K/S,

une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation de la directive 76/207/CEE du Conseil, du 9 février 1976, relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail (JO L 39, p. 40),

LA COUR,

composée de MM. O. Due, président, J. C. Moitinho de Almeida, G. C. Rodríguez Iglesias et M. Díez de Velasco, présidents de chambre, Sir Gordon Slynn, MM. C. N. Kakouris et F. Grévisse, juges,

avocat général : M. M. Darmon

greffier : Mme B. Pastor, administrateur

considérant les observations écrites présentées :

- pour la Handels - og Kontorfunktionaerernes Forbund i Danmark, agissant en qualité de mandataire pour Mme Birthe Vibeke Hertz, partie appelante au principal, par Me L. S. Andersen, avocat au barreau d'AArhus,

- pour la Dansk Arbejdsgiverforening, agissant en qualité de mandataire pour Aldi Marked K/S, partie intimée au principal, par Me J. P. Buhl, avocat à Copenhague,

- pour le gouvernement du Royaume-Uni, par Mlle J. A. Gensmantel, du Treasury Solicitor' s Department, en qualité d'agent,

- pour le gouvernement italien, par Me P. G. Ferri, avvocato dello Stato, en qualité d'agent,

- pour la Commission des Communautés européennes, par Mme I. Langermann, membre du service juridique, en qualité d'agent,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les observations orales de la Handels - og Kontorfunktionaerernes Forbund i Danmark, de la Dansk Arbejdsgiverforening, du Royaume-Uni, du gouvernement italien et de la Commission, à l'audience du 3 octobre 1989,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 14 novembre 1989,

rend le présent

Arrêt

1 Par ordonnance du 30 juin 1988, parvenue à la Cour le 4 juillet suivant, le Hoejesteret du Danemark a posé, en vertu de l'article 177 du traité CEE, deux questions préjudicielles sur l'interprétation de la directive 76/207/CEE du Conseil, du 9 février 1976, relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail (JO L 39, p. 40, ci-après "directive ").

2 Ces questions ont été soulevées dans le cadre d'un litige opposant Mme Birthe Vibeke Hertz, caissière et vendeuse à temps partiel, à son ancien employeur, Aldi Marked K/S. Mme Hertz, engagée par Aldi Marked le 15 juillet 1982, a donné naissance, en juin 1983, à un enfant au terme d'une grossesse dite "à complications" et passée, pour l'essentiel et en accord avec son employeur, en congé de maladie.

3 A l'expiration de son congé de maternité, qui, selon les dispositions de la loi danoise applicable, était de vingt-quatre semaines après la naissance, Mme Hertz a repris son travail à la fin de l'année 1983. Elle n'a eu aucun problème de santé JUSQU'en juin 1984. Par contre, entre juin 1984 et juin 1985, elle s'est retrouvée en congé de maladie pendant cent jours ouvrables. Il est constant entre les parties que la maladie de Mme Hertz était une suite de sa grossesse et de son accouchement.

4 Par lettre du 27 juin 1985, Aldi Marked a fait savoir à Mme Hertz qu'il mettait fin à son contrat d'emploi avec le préavis légal de quatre mois. Par la suite, Aldi Marked a précisé que les absences de Mme Hertz étaient la cause de son licenciement et qu'il était d'usage courant de licencier les travailleurs souvent absents pour cause de maladie.

5 Le Soe - og Handelsretten ayant rejeté le recours introduit par Mme Hertz à l'encontre de ce licenciement, Mme Hertz a interjeté appel de ce jugement devant le Hoejesteret. Devant cette juridiction, la Handels - og Kontorfunktionaerernes Forbund i Danmark (Union des employés de commerce et de bureau du Danemark) s'est présentée en qualité de mandataire de Mme Hertz, et le Dansk Arbejdsgiverforening (Confédération des employeurs danois) en tant que mandataire de Aldi Marked. Estimant que ce recours soulevait des difficultés d'interprétation de la directive 76/207 du Conseil, le Hoejesteret a décidé de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

"1) Les dispositions de l'article 5, paragraphe 1, combinées à l'article 2, paragraphe 1, de la directive du Conseil du 9 février 1976, relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail (76/207/CEE) couvrent-elles les licenciements qui sont la conséquence d'absences dues à une maladie qui trouve son origine dans la grossesse ou l'accouchement?

2) En cas de réponse affirmative, la protection contre les licenciements dus à une maladie causée par une grossesse ou un accouchement est-elle valable sans limitation dans le temps?"

6 Pour un plus ample exposé des faits du litige au principal, du déroulement de la procédure ainsi que des observations écrites présentées à la Cour, il est renvoyé au rapport d'audience. Ces éléments du dossier ne sont repris ci-dessous que dans la mesure nécessaire au raisonnement de la Cour.

Sur la première question

7 Les observations présentées devant la Cour donnent la mesure des difficultés soulevées par la question posée par le juge national.

8 D'une part, il est soutenu que le licenciement d'une femme en raison d'une grossesse, d'un accouchement ou d'absences répétées dues à une maladie qui trouve son origine dans une grossesse ou dans un accouchement, à quelque moment que cette maladie survienne, est contraire au principe de l'égalité de traitement, dès lors que de tels troubles ne peuvent frapper un travailleur masculin et que, par conséquent, ce dernier ne pourrait être licencié pour la même raison.

9 D'autre part, il est avancé que l'on ne peut interdire à un employeur de licencier un travailleur féminin à cause de ses nombreux congés de maladie pour la seule raison que la maladie trouve son origine dans la grossesse ou dans l'accouchement. Un licenciement pour un tel motif ne suffit pas à établir une violation du principe de l'égalité de traitement. En effet, une telle interdiction qui pèserait sur un employeur, de nombreuses années après l'accouchement, risquerait d'entraîner non seulement des difficultés de gestion et des conséquences inéquitables pour les employeurs, mais également des effets négatifs sur l'emploi des femmes. Par ailleurs, bien que l'article 2, paragraphe 3, de la directive permette aux États membres d'introduire des règles visant la protection des femmes en ce qui concerne la grossesse et la maternité, il ne donne aucune orientation quant au contenu précis de telles règles.

10 Il convient de rappeler, à titre liminaire, que selon son article 1er, paragraphe 1, la directive vise la mise en oeuvre, dans les États membres, du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail.

11 L'article 2, paragraphe 1, de la directive précise que "le principe de l'égalité de traitement... implique l'absence de toute discrimination fondée sur le sexe, soit directement, soit indirectement, par référence, notamment, à l'état matrimonial ou familial ". Aux termes de l'article 5, paragraphe 1, "l'application du principe de l'égalité de traitement en ce qui concerne les conditions de travail, y compris les conditions de licenciement, implique que soient assurées aux hommes et aux femmes les mêmes conditions, sans discrimination fondée sur le sexe ".

12 L'article 2, paragraphe 3, de la directive précise que "la présente directive ne fait pas obstacle aux dispositions relatives à la protection de la femme, notamment en ce qui concerne la grossesse et la maternité ".

13 Il résulte des dispositions précitées de la directive que le licenciement d'un travailleur féminin en raison de sa grossesse constitue une discrimination directe fondée sur le sexe, comme l'est également le refus d'embaucher une femme enceinte (voir arrêt de ce même jour, Dekker, C-177/88, Rec. p. 0000).

14 En revanche, le licenciement d'un travailleur féminin en raison de congés de maladie répétés, qui ne trouveraient pas leur origine dans une grossesse ou dans un accouchement, ne constitue pas une discrimination directe fondée sur le sexe, dans la mesure où de tels congés de maladie entraîneraient le licenciement du travailleur masculin dans les mêmes conditions.

15 Il y a lieu de constater que la directive ne vise pas l'hypothèse de la maladie qui trouve son origine dans une grossesse ou dans un accouchement. Toutefois, elle permet les dispositions nationales qui garantissent aux femmes des droits spécifiques en raison de la grossesse et de la maternité, tels que le congé de maternité. Il s'ensuit que durant le congé de maternité, dont elle bénéficie en application du droit national, la femme est protégée contre les licenciements motivés par son absence. Il appartient à chaque État membre de fixer les périodes de congé de maternité de manière à permettre aux travailleurs féminins de s'absenter pendant la période au cours de laquelle les troubles inhérents à la grossesse et à l'accouchement surviennent.

16 S'agissant d'une maladie qui apparaîtrait après le congé de maternité, il n'y a pas lieu de distinguer la maladie qui trouve son origine dans la grossesse ou dans l'accouchement de toute autre maladie. Un tel état pathologique relève donc du régime général applicable au cas de maladie.

17 En effet, les travailleurs féminins et masculins sont également exposés à la maladie. Même s'il est vrai que certains troubles sont propres à l'un ou à l'autre sexe, la seule question est donc de savoir si une femme est licenciée pour cause d'absence due à la maladie, dans les mêmes conditions qu'un homme; si tel est le cas, il n'y a pas de discrimination directe fondée sur le sexe.

18 De même, dans un tel cas, il n'y a pas lieu de s'interroger sur le point de savoir si les femmes sont plus souvent absentes pour cause de maladie que les hommes ni, par conséquent, sur l'existence d'une éventuelle discrimination indirecte.

19 Il y a donc lieu de répondre à la première question que, sous réserve des dispositions du droit national prises en application de l'article 2, paragraphe 3, de la directive 76/207 du Conseil, du 9 février 1976, relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail, les dispositions combinées de l'article 5, paragraphe 1, et de l'article 2, paragraphe 1, de cette directive ne s'opposent pas aux licenciements qui sont la conséquence d'absences dues à une maladie qui trouve son origine dans la grossesse ou dans l'accouchement.

Sur la seconde question

20 Eu égard à la réponse apportée à la première question, il n'y a pas lieu de statuer sur la seconde question.

Sur les dépens

21 Les frais exposés par les gouvernements britannique et italien ainsi que par la Commission des Communautés européennes, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Par ces motifs,

LA COUR,

statuant sur les questions à elle posées par le Hoejesteret du Danemark, par ordonnance du 30 juin 1988, dit pour droit :

Sous réserve des dispositions du droit national prises en application de l'article 2, paragraphe 3, de la directive 76/207/CEE du Conseil, du 9 février 1976, relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail, les dispositions combinées de l'article 5, paragraphe 1, et de l'article 2, paragraphe 1, de la directive ne s'opposent pas aux licenciements qui sont la conséquence d'absences dues à une maladie qui trouve son origine dans la grossesse ou dans l'accouchement.

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