Le Quotidien du 19 juin 2020 : Bancaire

[Brèves] Sanction applicable au TEG erroné figurant dans l’offre de prêt acceptée

Réf. : Cass. civ. 1, 12 juin 2020, n° 19-12.984, FS-P+B+I (N° Lexbase : A53753NE)

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par Jérôme Lasserre Capdeville

le 17 Juin 2020

► Après avoir relevé que les erreurs invoquées susceptibles d’affecter les taux effectifs globaux figuraient dans l’offre de prêt immobilier acceptée le 6 janvier 2010, la cour d’appel en a déduit, à bon droit, que la seule sanction encourue était la déchéance totale ou partielle du droit aux intérêts du prêteur et que les demandes des emprunteurs en annulation de la stipulation d'intérêts, substitution de l'intérêt au taux légal et remboursement des intérêts indus devaient être rejetées.

Tel est l’enseignement d’un arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation du 12 juin 2020 (Cass. civ. 1, 12 juin 2020, n° 19-12.984, FS-P+B+I N° Lexbase : A53753NE).

Rappel. Un rappel de l’évolution du droit intéressant le taux effectif global erroné (TEG) s’impose ici. En première lieu, l’ordonnance n° 2019-740 du 17 juillet 2019, relative aux sanctions civiles applicables en cas de défaut ou d’erreur du TEG (N° Lexbase : L1483LRD), publiée au Journal officiel du 18 juillet 2019, est récemment venue prévoir que le défaut de TEG/TAEG comme son erreur ne pourront, désormais, donner lieu qu’à une seule sanction : la déchéance du droit aux intérêts du prêteur « dans la proportion fixée par le juge, au regard notamment du préjudice pour l'emprunteur ». Différents articles de loi du Code de la consommation et du Code monétaire et financier ont été retouchés en ce sens (J. Lasserre Capdeville, Nouvel encadrement légal des sanctions civiles applicables en matière de taux effectif global, Lexbase Affaires, 2019, n° 604 N° Lexbase : N0196BYW).

En second lieu, par une décision récente remarquée (Cass. civ. 1, 10 juin 2020, n° 18-24.287, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A54113NQ, sur lequel lire N° Lexbase : N3690BYC ; v également Cass. avis, 10 juin 2020, n° 15004 N° Lexbase : A59493NN), la Haute juridiction est venue préciser que cette réforme était applicable aux contrats souscrits postérieurement à l’entrée en vigueur de l’ordonnance précitée, tout en déclarant qu’il apparaissait justifié d’uniformiser le régime des sanctions applicable en la matière et donc de l’imposer aux actions en cours.

Or, avant ce texte du 17 juillet 2019, les sanctions civiles encourues différaient en fonction de la nature du crédit. Concernant plus particulièrement le crédit immobilier, une distinction s’imposait selon l’acte comprenant le TAEG erroné.

D’une part, concernant l’offre de crédit, l’article L. 341-34 du Code de la consommation (N° Lexbase : L3212K74) prévoyait que dans les cas prévus, notamment à l’article L. 341-37 (N° Lexbase : L3179K7U), le prêteur pouvait « être déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge » (Cass. civ. 1, 25 février 2016, n° 14-29.838, F-D N° Lexbase : A4422QD7). Il s’agissait ainsi d’une déchéance modulable. D’autre part, si l’erreur figurait dans l’acte authentique réitérant devant notaire la convention de prêt immobilier, l’emprunteur disposait d’une autre action contre le prêteur : l’action en nullité de la clause prévoyant le taux conventionnel et sa substitution par le taux légal (Cass. civ. 1, 18 février 2009, n° 05-16.774, F-D N° Lexbase : A2583EDZ ; Cass. civ. 1, 9 avril 2015, n° 13-28.058, F-P+B N° Lexbase : A5240NG8).

Cette dualité de solutions, en matière de crédit immobilier, avait, cependant, suscité de vives discussions de la part de certaines juridictions du fond, et notamment de la cour d’appel de Paris (v. par ex., CA Paris, Pôle 5, 6ème ch., 2 décembre 2016, trois arrêts, n° 15/13823 N° Lexbase : A7597SNP, n° 15/13850 N° Lexbase : A7482SNG et n° 15/13910 N° Lexbase : A7637SN8 ; CA Paris, Pôle 5, 6ème ch., 18 décembre 2019, n° 17/12843 N° Lexbase : A5994Z8I).

Or, la Cour de cassation est amenée, à nouveau, à se prononcer en la matière par une décision du 12 juin 2020.

Les faits. En l’espèce, le 6 janvier 2010, la banque A. avait consenti à M. et Mme X. quatre prêts immobiliers. Cependant, invoquant le caractère erroné des TEG mentionnés dans l’offre acceptée, les emprunteurs avaient assigné la banque en annulation de la stipulation d’intérêts, substitution de l’intérêt au taux légal et remboursement des intérêts indus.

La cour d’appel de Paris avait cependant, par une décision du 26 octobre 2018, rejeté leur demande, considérée comme non fondée.

Les moyens. Les intéressés avaient alors formé un pourvoi en cassation. Ils rappelaient, par son intermédiaire, qu’en matière d'emprunt immobilier l’inexactitude de la mention du taux effectif global dans l'acte de prêt est sanctionnée par la nullité de la clause d'intérêt et par la substitution de l'intérêt au taux légal à compter de la date de conclusion du prêt. Dès lors, en disant non fondées les demandes des emprunteurs, se prévalant de l’inexactitude tant du TEG que des intérêts conventionnels dans l’acte de prêt et non dans l’offre, aux motifs que la seule action ouverte aurait été une action en déchéance du droit aux intérêts, la cour d’appel aurait violé les articles 1134, ancien (N° Lexbase : L1234ABC), et 1907 (N° Lexbase : L2132ABL) du Code civil ensemble les articles L. 313-1 (N° Lexbase : L6649IM9), L. 313-2 (N° Lexbase : L1518HI3), R. 313-1 (N° Lexbase : L3654IPZ) et R. 313-2 (N° Lexbase : L3655IP3) du Code de la consommation dans sa version applicable à la cause et l’article L. 312-33 du même code (N° Lexbase : L3654IPZ) par fausse application.

La décision. La première chambre civile de la Cour de cassation rejette néanmoins ce pourvoi.

Elle rappelle qu’il résulte des articles L. 312-8 (N° Lexbase : L7512IZA) et L. 312-33 du Code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 (N° Lexbase : L0300K7A), que l’inexactitude du taux effectif global mentionné dans une offre de prêt acceptée est sanctionnée par la déchéance, totale ou partielle, du droit du prêteur aux intérêts, dans la proportion fixée par le juge.

Elle considère alors qu’« après avoir relevé que les erreurs invoquées susceptibles d’affecter les taux effectifs globaux figuraient dans l'offre de prêt immobilier acceptée le 6 janvier 2010, la cour d'appel en a déduit, à bon droit, que la seule sanction encourue était la déchéance totale ou partielle du droit aux intérêts du prêteur et que les demandes des emprunteurs en annulation de la stipulation d'intérêts, substitution de l'intérêt au taux légal et remboursement des intérêts indus devaient être rejetées ».

Observations. La Haute juridiction confirme donc que lorsque l’erreur de TEG figure dans l’offre de prêt, même si celle-ci a été acceptée, seule la déchéance du droit aux intérêts peut être prononcée.

Si l’on suit cette solution, qui échappe selon nous à la critique, la sanction constituée par la nullité de la clause prévoyant le taux conventionnel et sa substitution par le taux légal ne devrait pouvoir se rencontrer, en matière de crédit immobilier, que si l’erreur figure dans un acte authentique reprenant les mentions de l’offre acceptée. Or, il n’en est rien : la décision et l’avis de la Cour de cassation du 10 juin 2020 (v. supra) démontrent que, dans cette hypothèse également, la Haute juridiction est hostile à cette sanction nettement plus redoutée par les établissements prêteurs. Il est à regretter toutefois que, dans ce dernier cas, la solution soit moins conforme au droit que dans l’arrêt étudié.

 

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