Le Quotidien du 26 mai 2020 : Assurances

[Brèves] Condamnation d’un assureur à verser une provision à un restaurateur parisien contraint de fermer son établissement à raison de la crise sanitaire

Réf. : T. com. Paris, 22 mai 2020, aff. n° 2020017022 (N° Lexbase : A02603ML)

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par Anne-Lise Lonné-Clément

le 26 Mai 2020

► Par une ordonnance, hautement médiatisée, rendue en référé le 22 mai 2020, le tribunal de commerce de Paris, a déclaré recevable l’action d’un restaurateur parisien et condamné son assureur au versement d’une provision au titre de l’indemnisation des pertes d’exploitation à la suite de la fermeture administrative de son établissement (T. com. Paris, 22 mai 2020, aff. n° 2020017022 N° Lexbase : A02603ML).

On sait que pour déclarer recevable une action en référé-provision, le tribunal doit vérifier deux conditions tenant d’une part, au caractère de l’urgence, d’autre part à l’absence de contestations sérieuses (cf., devant le tribunal judiciaire, C. pr. civ., art. 834 N° Lexbase : L9136LTK et 835 N° Lexbase : L9135LTI ; et devant le tribunal de commerce comme en l’espèce, C. pr. civ., art. 872 N° Lexbase : L0848H48 et 873 N° Lexbase : L0850H4A, dans leurs versions applicables depuis le 1er janvier 2020).

→ Pour dire l’urgence établie, le tribunal a admis la situation financière gravement obérée du demandeur.

→ S’agissant des contestations invoquées par l’assureur, le tribunal les a écartées une à une, comme étant non sérieuses.

♦ Absence d’exclusion conventionnelle du risque pandémique

L’assureur a tenté, tout d’abord, de faire valoir le caractère inassurable du risque pandémique tant au plan économique que juridique. L’argument est immédiatement balayé par le tribunal, qui relève qu’une telle question, ne le concernait pas ici, dans le cadre de cette action en référé.

Le tribunal explique devoir simplement se prononcer sur l'application d'un contrat d'assurance précis comportant conditions générales, conditions particulières le tout constituant la loi des parties et ceci, sans avoir à trancher de contestations sérieuses.

Le tribunal relève que l’assureur ne s'appuie sur aucune disposition légale d'ordre public mentionnant le caractère inassurable d'une conséquence d'une pandémie, et qu’il lui incombait donc d'exclure conventionnellement ce risque. Or, ce risque pandémique n’était pas exclu du contrat signé entre les parties.

♦ Application de la clause « fermeture administrative »

L'assureur a également tenté de faire valoir l'inapplication de la clause « fermeture administrative ».

Fait générateur déterminant l’application de la clause ?

Il prétendait, d'abord, que l'application de la clause fermeture administrative devait avoir pour fait générateur la réalisation préalable d’un événement garanti au titre de la perte d'exploitation.

Le tribunal a écarté une telle allégation (qu'il qualifie de « fantaisiste »), dès lors qu’elle n'était étayée par aucune référence contractuelle. Les conditions particulières, et l'intercalaire du courtier mentionnaient la fermeture administrative comme une extension de la perte d'exploitation au même titre par exemple que « meurtres ou suicides dans l'établissement ».

Autorité ordonnant la fermeture administrative ?

L’assureur a, par ailleurs, avancé que la fermeture administrative qui était visée dans le contrat était celle qui est prise par le préfet du lieu où est situé l'établissement et non par le ministre de la Santé. Le tribunal rétorque que, peu importe qu’il s’agisse du préfet ou du ministre, en droit français, il s'agit dans les deux cas d'une décision administrative et aucune exclusion contractuelle ne vise le ministre. Cette contestation est donc également écartée comme non sérieuse.

Fermeture administrative ou interdiction de recevoir du public ?

Enfin, l’assureur mentionnait que l'arrêté du 14 mars 2020 n'imposait pas la fermeture de l'établissement mais seulement de ne plus accueillir du public et que celui-ci était autorisé à maintenir son activité à emporter et de livraison et d'en conclure que l'établissement n’avait été fermé que par la décision du chef d’entreprise qui n’avait pas voulu se lancer dans la vente à emporter.

Pour écarter cette contestation, comme non sérieuse, le tribunal relève que l’intéressé n'avait jamais pratiqué la vente à emporter ni la livraison et que donc la mise en place d'une telle activité n’était pas autorisée. A supposer que cette activité fut possible, le fait de n'y avoir pas recouru ne supprime pas l'interdiction de ne plus recevoir du public ce qui est fondamental pour un restaurant traditionnel. La marge que procurerait cette activité de vente à emporter pour autant qu'elle en procure devrait être prise en compte dans la détermination du montant garanti. Et d’en conclure que l’interdiction de recevoir du public est bien une fermeture administrative totale ou partielle du restaurant.

Affaire à suivre, bien sûr, appel ayant été formé par l'assureur dans l'instance en référé, puis surtout dans le cadre de l'instance au fond...

Cette décision fera l’objet d’un commentaire plus approfondi par Didier Krajeski, à paraître dans la revue Lexbase, éd. priv., n° 826 du 4 juin 2020.

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