La lettre juridique n°819 du 2 avril 2020 : Covid-19

[Focus] Coronavirus : les conséquences fiscales pour les particuliers et les entreprises

Réf. : Ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020, relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période (N° Lexbase : L5730LW7)

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par Virginie Pradel, Fiscaliste

le 14 Avril 2021

La crise actuelle liée à l’épidémie de coronavirus entraîne de nombreuses conséquences, notamment économiques et fiscales. Pas moins de 25 ordonnances ont été prises le 25 mars 2020 à cet égard. L’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020, relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période prévoit certaines mesures relatives aux procédures fiscales en cours (I). D’autres mesures ont été précisées ultérieurement (II). Elles visent les particuliers comme les entreprises.

 

I -  Les mesures prises dans l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période

Le titre I de cette ordonnance est relatif aux dispositions générales relatives à la prorogation des délais. L’article 3 de l’ordonnance prévoit que certaines mesures administratives ou juridictionnelles et dont le terme vient à échéance au cours de la période dite « d’état d’urgence sanitaire » sont prorogées de plein droit jusqu'à l'expiration d'un délai de deux mois suivant la fin de cette période. Celle-ci prenant fin à l'expiration d'un délai d'un mois à compter de la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire, la prorogation sera donc donc de trois mois à compter de la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire. Parmi les mesures visées se trouvent les mesures conservatoires, d'enquête, d'instruction, de conciliation ou de médiation ; ainsi que les autorisations, permis et agréments.

Le titre II de cette ordonnance relatif aux autres dispositions particulières aux délais et procédures en matière administrative s'applique aux administrations de l'Etat, aux collectivités territoriales, à leurs établissements publics administratifs ainsi qu'aux organismes et personnes de droit public et de droit privé chargés d'une mission de service public administratif, y compris les organismes de sécurité sociale.

L’article 10 de l’ordonnance prévoit la suspension à compter du 12 mars 2020 et jusqu'à la fin de la période d’état d’urgence sanitaire (celle-ci expirant dans le délai d'un mois à compter de la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire) et le fait que ne courent qu'à compter de cette dernière date, s'agissant de ceux qui auraient commencé à courir pendant la période précitée :

  • Les délais accordés à l'administration pour réparer les omissions totales ou partielles constatées dans l'assiette de l'impôt, les insuffisances, les inexactitudes ou les erreurs d'imposition et appliquer les intérêts de retard et les sanctions en application des articles L. 168 (N° Lexbase : L1999DAB) à L. 189 (N° Lexbase : L8757G8T) du Livre des procédures fiscales ou de l'article 354 du Code des douanes (N° Lexbase : L3662KWK) lorsque la prescription est acquise au 31 décembre 2020. Cela implique que les prescriptions qui auraient du être acquises aux contribuables au 31 décembre 2020 ne seront acquises que courant 2021, en fonction de la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire. Cela laisse donc plus de temps à l’administration pour interrompre le délai de prescription, notamment par l’envoi d’une proposition de rectification.
  • Les délais accordés à l'administration ou à toute personne ou entité et prévus par les dispositions du titre II du livre des procédures fiscales, à l'exception des délais de prescription prévus par les articles L. 168 à L. 189 du même Livre, par les dispositions de l'article L. 198 A du même Livre (N° Lexbase : L3179LCQ) en matière d'instruction sur place des demandes de remboursement de crédits de taxe sur la valeur ajoutée ainsi que par les dispositions des articles 67 D (N° Lexbase : L3182LCT) et 345 bis (N° Lexbase : L6977LLY) du Code des douanes. Cela implique que les contrôles fiscaux, qu’ils visent les particuliers (ESFP) ou les entreprises (vérifications de comptabilité, etc.) pourront être poursuivis au-delà de la date limite.
  • Les délais prévus à l'article 32 de la loi du 10 août 2018 (loi n° 2018-727 du 10 août 2018, pour un Etat au service d'une société de confiance N° Lexbase : L6744LLD). Cet article prévoit que à titre expérimental et pour une durée de quatre ans dans les régions Hauts-de-France et Auvergne-Rhône-Alpes, l'ensemble des contrôles opérés par les administrations à l'encontre d'une entreprise de moins de deux cent cinquante salariés et dont le chiffre d'affaires annuel n'excède pas 50 millions d'euros ne peut dépasser, pour un même établissement, une durée cumulée de neuf mois sur une période de trois ans.

NB : Ces dispositions ne s'appliquent pas aux déclarations servant à l'imposition et à l'assiette, à la liquidation et au recouvrement des impôts, droits et taxes. Par suite, les contribuables, particuliers comme entreprises, restent tenus de remplir leur déclaration dans les délais imposés, sous peine d’être sanctionnés.

L’article 11 de l’ordonnance dispose que « S'agissant des créances dont le recouvrement incombe aux comptables publics, les délais en cours à la date du 12 mars 2020 ou commençant à courir au cours de la période définie au I de l'article 1er prévus à peine de nullité, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité ou déchéance d'un droit ou d'une action sont suspendus jusqu'au terme d'un délai de deux mois suivant la fin de la période d’état d’urgence sanitaire ».

L’article 12 de l’ordonnance dispose que « Le présent article s'applique à toute enquête publique déjà en cours à la date du 12 mars 2020 ou devant être organisée pendant la période définie au I de l'article 1er de la présente ordonnance. Lorsque le retard résultant de l'interruption de l'enquête publique ou de l'impossibilité de l'accomplir en raison de l'état d'urgence sanitaire est susceptible d'entraîner des conséquences difficilement réparables dans la réalisation de projets présentant un intérêt national et un caractère urgent, l'autorité compétente pour organiser l'enquête publique peut en adapter les modalités :
1° En prévoyant que l'enquête publique en cours se poursuit en recourant uniquement
à des moyens électroniques dématérialisés. La durée totale de l'enquête peut être adaptée pour tenir compte, le cas échéant, de l'interruption due à l'état d'urgence sanitaire. Les observations recueillies précédemment sont dûment prises en compte par le commissaire enquêteur ;
2° En organisant une enquête publique d'emblée conduite uniquement par des moyens électroniques dématérialisés.
Lorsque la durée de l'enquête excède la période définie au I de l'article 1er de la présente ordonnance, l'autorité compétente dispose de la faculté de revenir, une fois achevée cette période et pour la durée de l'enquête restant à courir, aux modalités d'organisation de droit commun énoncées par les dispositions qui régissent la catégorie d'enquêtes dont elle relève.
Dans tous les cas, le public est informé par tout moyen compatible avec l'état d'urgence sanitaire de la décision prise en application du présent article
 ».

Ces mesures conduisant à la suspension des contrôles fiscaux et des recouvrements sont inédites et justifiées non seulement par la volonté de ne pas affaiblir davantage des entreprises en difficulté, mais aussi pour des raisons sanitaires (difficultés pour exercer les contrôles en l’absence de matériel et absence de plus de 60 % du personnel) et par le fait que les grands groupes, plus fréquemment contrôlés, ont basculé massivement vers le télétravail.

II - Les mesures prises ultérieurement

A - Sur la déclaration de l’impôt sur le revenu

Le ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, a annoncé avoir « pris la décision de décaler la déclaration de revenus d'une semaine». La déclaration se fera donc à partir du 20 avril, au lieu du 9 avril initialement. Il a également annoncé que les déclarants papiers auraient un mois de plus pour faire leur déclaration, soit jusqu'au 11 juin. Les télédéclarations pourront également être faites jusqu'au 11 juin

Se pose bien entendu la question de l’organisation pratique de la campagne déclarative pour l'impôt sur le revenu. Celle-ci va être compliquée par le fait que les rendez-vous ont été réduits au strict minimum dans les centres des impôts. Or, chaque année, 5 millions de particuliers se déplacent dans leur centre des impôts, la plupart du temps pendant la campagne de déclaration afin d’obtenir des informations pour bien déclarer leurs revenus. Les syndicats de Bercy ont demandé un report, ce qui a été refusé.

B - Possibilité de moduler son taux de prélèvement à la source pour les particuliers

Il a également été rappelé que le prélèvement à la source permet aux personnes physiques qui subissent une baisse de revenu de moduler leur taux à la baisse. Pour cela, elles doivent directement se rendre sur leur espace personnel en ligne et procéder à l’ajustement nécessaire.

C - Possibilité d’obtenir un délai de paiement ou une remise pour les entreprises

Il a enfin été précisé que les entreprises présentant des difficultés de paiement de leurs impositions à la suite du Coronavirus, peuvent demander à bénéficier sans justification d'un délai de paiement ou d'une remise d'impôt d'impôt sur les sociétés et de taxe sur les salaires. Selon un premier bilan pour l'impôt sur les sociétés, 27 000 entreprises ont demandé un report de l'acompte dû en mars. Cela correspond à un montant reporté de 1,2 milliard d'euros pour cette échéance qui rapporte habituellement 10 milliards d'euros à l'Etat.

Si les entreprises ont déjà payé les échéances de ces impôts prévues en mars, elles peuvent en demander le remboursement. Pour faciliter les demandes, un imprimé est à leur disposition : il doit être adressé au service des impôts.

D - Possibilité d’obtenir une aide par le biais du Fonds de solidarité

C'est à la Direction générale des finances publiques (DGFIP) que revient la gestion de ce nouveau fonds de solidarité. Celui-ci est dédié aux plus petites entreprises qui font moins d’un million d’euros de chiffre d’affaires : TPE, indépendants et micro-entrepreneurs. Toutes les petites entreprises qui subissent une fermeture administrative ou qui auront connu une perte de chiffre d’affaires de plus de 50 % au mois de mars 2020 par rapport au mois de mars 2019 bénéficieront d’une aide rapide et automatique de 1 500 euros sur simple déclaration dématérialisée dans leur espace personnel.

Pour les situations les plus difficiles, un soutien complémentaire de 2000 euros pourra être octroyé par les régions pour éviter la faillite au cas par cas. Des plateformes régionales seront ouvertes à cet effet.

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