Le Quotidien du 12 décembre 2022

Le Quotidien

Peines

[Brèves] Confiscation du produit de l’infraction : quel est le sort de l’immeuble ayant bénéficié de travaux financés par des fonds illicitement obtenus ?

Réf. : Cass. crim., 7 décembre 2022, n° 20-87.111, F-B N° Lexbase : A85218XU

Lecture: 4 min

N3607BZM

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par Helena Viana

Le 14 Décembre 2022

► Est confiscable dans sa totalité l’immeuble acquis par l’emploi de sommes licites, dans la mesure où ce bien a bénéficié de travaux d’amélioration permettant l’accroissement de sa valeur et que ces travaux ont été financés par des sommes remises dans le cadre d’une escroquerie. L’immeuble constitue le produit de l’infraction et sa confiscation ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de propriété du requérant dans les faits de l’espèce.  

Faits et procédure. Le 27 mai 2019, un tribunal correctionnel a condamné un individu pour des faits d’escroquerie et a prononcé une mesure de confiscation portant sur des biens immobiliers appartenant à l’intéressé. Ce dernier avait utilisé des fonds issus de cette escroquerie pour rénover et effectuer des travaux sur un bien immobilier, lequel avait acquis une valeur bien supérieure, passant d’un prix de 210 000 euros à l’achat à 1,5 millions d’euros ensuite des travaux. Par requête introduite le 25 juin 2020, l’intéressé a demandé la mainlevée de la mesure. Il a été débouté de sa demande de mainlevée et la cour d’appel a confirmé la peine complémentaire de confiscation portant sur cet immeuble.  

Moyen du pourvoi. La personne condamnée a formé un pourvoi en cassation au motif que la cour d’appel, en confirmant la peine de confiscation, avait porté une atteinte disproportionnée à son droit de propriété. La cour avait prononcé ladite confiscation sans s’expliquer davantage sur l’atteinte au droit qu’il invoquait, au regard de son activité professionnelle de juriste qu’il exerçait au sein de son bien confisqué. Ce faisant, il reprochait à la cour d’appel d’avoir méconnu les articles 6 de la Convention européenne des droits de l'Homme N° Lexbase : L7558AIR, 1er du protocole n° 1 N° Lexbase : L1625AZ9, 132-1 du Code pénal N° Lexbase : L9834I3M, 485 N° Lexbase : L9916IQC, 512 N° Lexbase : L5541LZA, 591 N° Lexbase : L3975AZA et 593 N° Lexbase : L3977AZC du Code de procédure pénale. 

Décision. La Cour de cassation confirme la décision de la cour d’appel ayant ordonné la confiscation de l’immeuble litigieux. Elle reprend et valide le raisonnement adopté par les juges du fond.  

Ils ont retenu que les sommes ayant été remises par la victime de l’escroquerie ont servi au propriétaire pour réaliser les travaux d’amélioration, ce qu’il ne conteste pas. Dès lors, et bien que l’immeuble ait été acquis par des sommes licites en 2003 par le biais d’un emprunt bancaire, les juges ont énoncé que l’immeuble litigieux était aujourd’hui le produit de sommes licites et de sommes illicites, lesquelles ont permis d’accroître significativement la valeur du bien dans ensemble.  

Ils en ont conclu que la confiscation apparaissait nécessaire au regard de la gravité des faits sans être disproportionnée au regard de l'atteinte portée par cette mesure au droit de propriété et au droit au respect de la vie privée et familiale. Les magistrats ont notamment justifié le caractère proportionné de cette mesure par le fait que le propriétaire du bien confisqué disposait de nombreux autres biens situés dans d’autres localités dont il allait retrouver la disposition.  

Ainsi la Chambre criminelle énonce que la cour d’appel avait, à bon droit, considéré que le bien susvisé était confiscable dans sa totalité en application du troisième alinéa de l'article 131-21 du Code pénal N° Lexbase : L3759HGC, dans la mesure où il était constitué au moins pour partie du produit de l’infraction : les sommes escroquées ayant permis les travaux d’amélioration. De plus, elle confirme l’appréciation du caractère proportionnel de cette mesure, l’intéressé n’ayant pas fait valoir que le bien confisqué était nécessaire à l’exercice de son activité professionnelle.  

Rappelons que les juges du fond doivent procéder au contrôle de proportionnalité dès lors que le bien excède le montant du produit de l’infraction, la Cour de cassation effectuant une distinction entre le bien produit ou objet de l’infraction et le bien dénué de rapport avec l'infraction (Cass. crim., 3 mai 2018, n° 17-82.098, F-P+B N° Lexbase : A4386XME). Rappelons aussi que ces mêmes juges demeurent souverains dans l’appréciation du produit de l’infraction (Cass. crim., 12 juillet 2016, n° 15-83.355, F-D N° Lexbase : A2060RXL).  

La solution de l’arrêt référencé semble sévère, en ce qu’elle consacre une vision particulièrement extensive de ce que constitue le produit de l’infraction. En l’espèce, rappelons qu’il était constitué de sommes licites, notamment pour l’acquisition initiale du bien.  

S’agissant du contrôle de proportionnalité, la Cour semble envisager l’hypothèse d’une situation qui aurait pu être plus favorable à la personne condamnée. On peut s’interroger : la seule preuve de la nécessité du bien pour l’exercice de l’activité professionnelle du requérant aurait-elle suffi à empêcher la confiscation dans sa totalité du bien litigieux ? 

newsid:483607

Actualité judiciaire

[A la une] Affaire « Bismuth » : pour la cour d’appel, il y a encore de la friture sur la ligne secrète de Nicolas Sarkozy

Lecture: 7 min

N3608BZN

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par Vincent Vantighem

Le 12 Décembre 2022

            Mais pourquoi Nicolas Sarkozy et son « ami », l’avocat Thierry Herzog, ont-ils décidé d’ouvrir une ligne téléphonique secrète pour communiquer ? C’est finalement la seule question à laquelle la cour d’appel de Paris doit répondre, une semaine après l’ouverture du procès dit des « écoutes de Paul Bismuth ». Une affaire qui porte d’ailleurs mal son nom. Aujourd’hui, tout le monde se moque de Paul Bismuth. Tout le monde se moque de savoir pourquoi Thierry Herzog a choisi le nom d’un camarade de lycée de l’ex-Président de la République lorsqu’il a débarqué dans une boutique de téléphonie de Nice (Alpes-Maritimes). Non, ce n’est pas l’affaire « Bismuth ». Mais c’est bien une affaire de « corruption » et de « trafic d’influence ».

            Offensif et combatif à la barre, Nicolas Sarkozy a résumé les choses simplement. « Dans le journal Le Monde, il y avait eu [à l’époque] un article sur des écoutes concernant l’un de mes meilleurs amis, Brice Hortefeux. Thierry [Herzog] m’a dit : “Y a des écoutes sauvages, la presse est au courant, trouvons un moyen de communiquer discrètement…” » Voilà. C’est donc simplement pour cela que la ligne « Paul Bismuth » a été ouverte, selon l’ancien chef de l’État. Et non pas pour nouer un quelconque pacte de corruption, sans que les juges ne puissent s’en apercevoir…

            Le problème, c’est que les juges ont tout de même fini par découvrir l’existence de ce que les petits dealers de cannabis appellent « un téléphone de guerre ». Et qu’ils ont naturellement tendu l’oreille. Nous sommes alors en janvier-février-mars 2014. Évidemment, Nicolas Sarkozy et Thierry Herzog ne discutent pas de l’éventualité d’un go fast, mais d’une procédure ouverte devant la Cour de cassation. La procédure Bettencourt… Nicolas Sarkozy a formé un pourvoi pour pouvoir récupérer ses agendas saisis lors de l’enquête. Et il s’inquiète naturellement…

Les fameuses écoutes diffusées pour la première fois

            Pour la première fois, mardi 6 décembre, les fameuses écoutes ont été diffusées à l’audience. On y découvre un Nicolas Sarkozy inquiet de la procédure dans laquelle il est embarqué. Comme tout justiciable, certes. Mais on le voit surtout inquiet de la façon dont la justice est en train de resserrer son étau auprès de lui, entre les affaires Karachi et Tapie. Sans parler de celle du financement libyen… « Les emmerdes, ça vole toujours en escadrille », disait en son temps Jacques Chirac.

            Mais à ce moment-là, c’est donc surtout l’affaire Bettencourt qui embêtait l’ex-Président de la République. D’où les échanges sur la ligne secrète avec Thierry Herzog. Où l’on découvre l’existence de « l’ami Gilbert ». Gilbert Azibert donc. Ancien Haut magistrat à la Cour de cassation. Spécialiste de la procédure pénale. Celui qui annotait, année après année, le Litec. Et qui partage aujourd’hui avec les deux premiers protagonistes le banc des prévenus. Car c’est bien lui qui est au cœur du dossier. Soupçonné d’avoir « monnayé » des informations sur la procédure Bettencourt auprès de Nicolas Sarkozy en échange d’un « coup de pouce » pour obtenir un poste prestigieux de conseiller d’État à Monaco.

            Les écoutes alors. Que disent-elles ? Que Nicolas Sarkozy et Thierry Herzog parlent souvent de « l’ami Gilbert » et des informations qu’il est susceptible d’obtenir dans les arcanes de la Cour de cassation, plus haute instance judiciaire de France. À l’époque, celle-ci doit trancher sur la saisie des agendas présentiels. Audience le 11 février. Délibéré le 11 mars. « Qu’a dit notre ami là-dessus ? », interroge Nicolas Sarkozy, le 21 janvier 2014. « Il était confiant, répond Thierry Herzog. Il m’a dit qu’il allait déjeuner avec un avocat général… » Où l’on comprend que Gilbert Azibert part à « la chasse » aux infos pour tenter d’en savoir davantage avant que la Cour de cassation ne rende sa décision…

            « Mais il était optimiste ? », relance Nicolas Sarkozy le 5 février. « Oui », tente de le rassurer Thierry Herzog. Le problème vient de la suite de la conversation. « Il m’a aussi parlé de Monaco. D’un poste qui se libère. Il m’a dit qu’il n’osait pas demander de l’aide. Je lui ai dit “Tu rigoles, avec tout ce que tu as fait pour nous…” » Voilà donc l’accusation : un pacte de corruption entre les trois hommes. Avec d’un côté Gilbert Azibert qui file des informations sur une procédure en cours à la Cour de cassation contre un « coup de pouce » pour obtenir ce fameux poste à Monaco.

« Tu peux dire à Gilbert… »

            D’abord, Nicolas Sarkozy se montre magnanime. « Appelle-le en lui disant bien que je m’en occuperai parce que je vais aller à Monaco. », répond-il le 5 février. Avant de poursuivre le 25 février : « Tu peux dire à Gilbert que j’ai rendez-vous à 12 heures avec le ministre [de Monaco] ».

            Le 25 février est une date stratégique dans ce dossier. Selon l’accusation, c’est la date à laquelle Nicolas Sarkozy et Thierry Herzog ont été informés que leur fameuse « ligne Bismuth » était aussi sur écoute, ce qui n’a jamais pu être prouvé. Toujours est-il que les deux interlocuteurs basculent alors sur la ligne officielle pour un échange qui a été qualifié de « simulacre » par le parquet national financier, à l’origine de l’enquête. « Thierry, j’ai réfléchi. Pour ton “ami” Gilbert, je n’ai finalement pas fait la démarche… » Comme s’il fallait passer le message que tout était licite.

            Le problème, c’est qu’en matière de « corruption » et de « trafic d’influence », l’intention de commettre un délit suffit à le caractériser. Peu importe finalement que le deal soit parvenu à son terme. Nicolas Sarkozy a beau dire que ses agendas ne lui ont pas été rendus par la justice. Gilbert Azibert a beau dire qu’il ne voulait pas vraiment ce poste à Monaco… Les juges ont suffisamment d’éléments à leur disposition.

            Reste juste à savoir si tout cela relevait d’un véritable « pacte de corruption ». À ce sujet, Nicolas Sarkozy n’a pas vraiment eu besoin de ses avocats. À la barre de la cour d’appel, il s’est occupé tout seul de se défendre. « Mais quand vous écoutez, vous vous rendez compte que je n’ai pas eu l’ombre d’un début de conscience de commettre un délit, s’est-il étranglé à la barre. On n’est pas dans le pacte de corruption ni dans la volonté de corrompre. Je suis condamné ou innocent ! Il faut des preuves ! »

            Lors du procès en première instance, le tribunal judiciaire de Paris avait considéré qu’il s’agissait de preuves, condamnant l’ancien chef de l’État à trois ans de prison dont un an ferme, tout comme ses deux coprévenus. Reste à savoir l’analyse qu’en fera la cour d’appel. Les réquisitions du parquet général sont attendues mardi 13 décembre. Avant les plaidoiries de la défense mercredi 14. La décision sera ensuite mise en délibéré. Nicolas Sarkozy encourt une peine de dix ans de prison et un million d’euros d’amende.

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Bancaire

[Brèves] Association foncière urbaine et gestion d’un compte en banque

Réf. : Cass. com., 30 novembre 2022, n° 21-16.071, F-B N° Lexbase : A45208WC

Lecture: 4 min

N3550BZI

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par Jérôme Lasserre-Capdeville

Le 09 Décembre 2022

► Le fait qu’un texte prévoit qu’aucun paiement ou retrait ne peut être effectué à partir des comptes bancaires d’une association foncière urbaine s’il n’a pas été ordonné par son président, n’interdit pas qu’il soit donné mandat à un tiers d’ouvrir un compte bancaire au nom et pour le compte de l’association et que la convention d’ouverture prévoie que les comptes fonctionneront sous la double signature du président ou du prestataire auquel est confié, par contrat, une mission d’assistance du président.

Le client de banque est libre de donner une procuration à une autre personne qui fera fonctionner le compte par des opérations créditrices et débitrices. Cette procuration s’analyse alors en un mandat par lequel le titulaire du compte donne mission au bénéficiaire de celle-ci de faire fonctionner le compte. L’étendue de ce mandat dépendra souvent des stipulations de la convention unissant le banquier à son client. Le droit est parfaitement clair en la matière. Pour autant des situations « originales » peuvent se présenter. Tel est le cas ici.

Faits et procédure. L’Association foncière urbaine libre France de Cahuzac (AFUL) était titulaire d’un compte bancaire dans les livres de la banque X., lequel devait fonctionner sous la signature du président de l’association, M. M., et d’un représentant de la société H., à laquelle avait été confiée une mission d’assistance du président. Invoquant des ordres de virement irrégulièrement passés à partir de son compte bancaire, l’AFUL a assigné la banque en indemnisation pour avoir manqué à son obligation de vigilance à l’occasion de l’exécution de ces opérations. La cour d’appel de Dijon n’ayant pas donné raison à l’association, celle-ci et M. M. ont formé un pourvoi en cassation.

Pourvoi. Les intéressés font grief à l’arrêt d’avoir rejeté leurs demandes à l’encontre de la banque, « alors que le président d’une association foncière urbaine libre a seul le pouvoir d’assurer la gestion, autonome et interne, de ses comptes bancaires ». Ils considèrent que ces principes d’organisation imposés par la loi ne pouvaient échapper à la connaissance de la banque. En l’occurrence, la cour d’appel a admis qu’en application de l’article L. 322-4-1 du Code de l’urbanisme N° Lexbase : L8499GQT, la gestion des comptes de l’AFUL était nécessairement autonome et interne. Dès lors, en retenant néanmoins que la SARL H. pouvait avoir mandat d’ouvrir le compte bancaire au nom de l’AFUL et que ce compte pouvait fonctionner sous la double signature du représentant de cette société et du président de l’AFUL, au motif impropre que la SARL H. avait une mission d’assistance du président pour exercer tous les pouvoirs administratifs, pour en déduire l’absence de faute de la banque dans l’ouverture et le fonctionnement du compte, la cour d’appel aurait violé l’article L. 322-4-1 du Code de l’urbanisme, mais aussi l’ancien article 1147 du Code civil N° Lexbase : L1248ABT.

Décision. La Cour de cassation n’est cependant pas convaincue par ce moyen.

Elle commence par rappeler qu’aux termes de l’article L. 322-4-1 du Code de l’urbanisme (dans sa rédaction applicable au moment des faits), le président de l’association foncière urbaine exécute les décisions du conseil des syndics et de l’assemblée générale, prépare le budget et le compte administratif des opérations de l’association et assure le paiement des dépenses. Il peut se faire assister par une personne, physique ou morale, agissant en qualité de prestataire de services, à laquelle peuvent être confiées toutes autres missions concernant la réalisation de l’objet de l’association.

Dès lors, il résulte de ce texte qu’aucun paiement ou retrait ne peut être effectué à partir des comptes bancaires d’une association foncière urbaine s’il n’a pas été ordonné par son président, ce qui n’interdit pas qu’il soit donné mandat à un tiers d’ouvrir un compte bancaire au nom et pour le compte de l’association et que la convention d’ouverture prévoie que les comptes fonctionneront sous la double signature du président ou du prestataire auquel est confié, par contrat, une mission d’assistance du président. Le moyen qui postule le contraire n’est donc pas fondé.

Cette solution échappe, a priori, à la critique. Un mandat peut toujours être donné à un tiers pour ouvrir un compte bancaire au nom et pour le compte d’une association et il est logiquement possible de prévoir conventionnellement l’exigence d’une double signature pour le faire fonctionner.

On regrettera cependant que l’arrêt ne soit pas plus explicite sur le mandat qui avait été, semble-t-il, conclu en l’espèce. M. M. était-il à son origine au nom de l’association ? Si tel est le cas, on sera étonné d’une telle contestation a posteriori.

newsid:483550

Comité social et économique

[Brèves] Précision relative au point de départ du délai de contestation du coût prévisionnel de l’expertise CSE

Réf. : Cass. soc., 7 décembre 2022, n° 21-16.996, F-B N° Lexbase : A85238XX

Lecture: 2 min

N3610BZQ

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par Charlotte Moronval

Le 14 Décembre 2022

► Le point de départ du délai de dix jours pendant lequel l’employeur peut contester le coût prévisionnel, l’étendue ou la durée de l’expertise votée par le CSE court à compter de la notification par l’expert du dernier cahier des charges rectifié.

Faits et procédure. En l’espèce, un CSE vote le recours à une expertise pour risque grave. Un expert adresse le 17 janvier 2021 un cahier des charges. Le 26 janvier 2021, il adresse un cahier des charges rectifié. L’employeur saisit le juge judicaire le 5 février 2021 en contestation du coût prévisionnel prévu.

Pour rappel. L’employeur qui souhaite contester le coût prévisionnel, l’étendue ou la durée de l'expertise doit saisir le tribunal judiciaire dans un délai de dix jours (C. trav., art. R. 2315-49 N° Lexbase : L0548LI7) à compter de la notification par l’expert du cahier des charges et des informations légalement requises (C. trav., art. L. 2315-86, al. 1er, 3° N° Lexbase : L1774LR7).

Le tribunal rejette le recours. Pour le juge, le point de départ du délai de dix jours avait démarré au jour où l'expert ayant envoyé sa lettre de mission précisant un coût et une durée prévisionnels pour cette mission. Plus de dix jours s’étant écoulés entre le 17 janvier 2021 et le 5 février 2021, le juge considère que la demande de l’employeur est irrecevable.

L’employeur forme un pourvoi en cassation. Selon lui, le point de départ du délai de contestation démarre le 26 janvier, date de la notification du cahier des charges rectifié.

La solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation casse et annule la décision du tribunal judiciaire.

Elle considère que le délai de contestation de dix jours courait à compter du 26 janvier (notification à l'employeur du cahier des charges rectifié avec le nouveau coût prévisionnel) et non du 17 janvier. L’action était donc recevable.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Le recours à l'expertise par le comité social et économique, La contestation, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E2027GAC.

newsid:483610

Droit au logement

[Brèves] DALO : non si l'ensemble des personnes du foyer concerné ne sont pas en situation régulière sur le territoire !

Réf. : CE, 5°-6° ch. réunies, 29 novembre 2022, n° 460679, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A22748W7

Lecture: 2 min

N3563BZY

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par Yann Le Foll

Le 09 Décembre 2022

► La commission de médiation peut refuser légalement de reconnaître un demandeur au droit au logement comme prioritaire et devant être logé d'urgence au motif que les personnes composant le foyer pour le logement duquel il a présenté sa demande ne séjournent pas toutes régulièrement sur le territoire français ou n'y ont pas leur résidence permanente.

Rappel. Il résulte des articles L. 441-1 N° Lexbase : L4902MB8 et R. 441-1 N° Lexbase : L8268C7D du Code de la construction et de l'habitation que les conditions réglementaires d'accès au logement social sont appréciées en prenant en compte la situation de l'ensemble des personnes du foyer pour le logement duquel un logement social est demandé et qu'au nombre de ces conditions figurent, notamment, celle que ces personnes séjournent régulièrement sur le territoire français et qu'elles y aient leur résidence permanente. 

Il en découle le principe précité (déjà édicté dans CE 4°-5° s.-s. réunies, 26 novembre 2012, n° 352420, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A6319IXC).

Position TA. Pour annuler la décision de la commission de médiation du Bas-Rhin ayant rejeté le recours amiable tendant à ce que la demande de logement du demandeur (résidant en France en foyer depuis plus de vingt ans et bénéficiaire de l'allocation aux adultes handicapés) soit reconnue prioritaire et urgente, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Strasbourg, après avoir constaté que l'épouse et les enfants de l’intéressé, pour lesquels il envisageait un regroupement familial, ne séjournaient pas sur le territoire français, a jugé que cette circonstance n'était pas de nature à faire obstacle à sa demande de logement social

Décision CE. En statuant par ces motifs, alors que la résidence permanente en France des membres du foyer au titre duquel une personne présente une demande est au nombre des conditions réglementaires d'accès au logement social qu'il appartient à la commission de médiation d'appliquer, la magistrate désignée a commis une erreur de droit qui justifie l'annulation de son jugement.

newsid:483563

Fiscalité des entreprises

[Brèves] Un véhicule de démonstration pour la promotion d’une marque constitue une immobilisation

Réf. : CE, 9°-10° ch. réunies, 22 novembre 2022, n° 456405, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A96528TN

Lecture: 4 min

N3536BZY

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par Marie-Claire Sgarra

Le 09 Décembre 2022

Un véhicule de démonstration pour la promotion d’une marque constitue une immobilisation et non un stock.

Les faits :

  • la société Maserati West Europe, filiale de la société de droit italien Maserati S.p.a., a fait l'objet au titre de ses exercices clos en 2012 et 2013 d'une vérification de comptabilité, étendue jusqu'au 31 décembre 2014 en matière de TVA, à l'issue de laquelle l'administration fiscale a notamment remis en cause l'inscription en stock des véhicules de démonstration acquis auprès de la société Maserati S.p.a et regardés ces véhicules comme des immobilisations ;
  • le TA de Paris a rejeté comme irrecevables les conclusions de la demande de la société Maserati West Europe présentées en matière d’IS au titre de son exercice clos en 2013 et a, par ailleurs, rejeté comme non fondées ses conclusions tendant à la décharge du supplément d’IS auquel elle a été assujettie au titre de son exercice clos en 2012 ainsi que des rappels de TVA relatifs à la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014 ;
  • la CAA de Paris a rejeté l’appel formé contre ce jugement (CAA Paris, 8 juillet 2021, n° 20PA02183 N° Lexbase : A83488RM).

Principes :

  • le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice (CGI, art. 39) ;
  • le stock est constitué par l'ensemble des marchandises, des matières premières, des matières et fournitures consommables, des productions en cours, des produits intermédiaires, des produits finis, des produits résiduels et des emballages non destinés à être récupérés, qui sont la propriété de l'entreprise à la date de l'inventaire et dont la vente en l'état ou au terme d'un processus de production à venir ou en cours permet la réalisation d'un bénéfice d'exploitation (CGI, art. 38 ter, annexe III).

L'article 211-1 du Règlement n° 99-03, du 29 avril 1999, du Comité de la réglementation comptable relatif au plan comptable général, dans sa version issue du Règlement n° 2004-06, du 23 novembre 2004, relatif à la définition, la comptabilisation et l'évaluation des actifs N° Lexbase : X7716ACR donne les définitions suivantes :

  • une immobilisation corporelle est un actif physique détenu, soit pour être utilisé dans la production ou la fourniture de biens ou de services, soit pour être loué à des tiers, soit à des fins de gestion interne et dont l'entité attend qu'il soit utilisé au-delà de l'exercice en cours ;
  • un stock est un actif détenu pour être vendu dans le cours normal de l'activité, ou en cours de production pour une telle vente, ou destiné à être consommé dans le processus de production ou de prestation de services, sous forme de matières premières ou de fournitures.

Solution du CE. Un véhicule de démonstration acquis par un prestataire de services qui exerce une activité de promotion d'une marque automobile, pour les besoins de cette activité, constitue non pas un élément de stock mais un élément de l'actif immobilisé, quand bien même ce véhicule serait revendu à l'issue de son utilisation. Il n'en va pas différemment lorsque cette cession intervient moins de douze mois après l'acquisition.

L'administration fiscale a remis en cause, au titre des exercices clos en 2012 et 2013, les provisions et reprises de provision afférentes à la dépréciation du stock de véhicules de démonstration utilisés par la société Maserati West Europe pour les besoins de son activité de promotion de la marque Maserati, motif pris que ces véhicules étaient constitutifs d'éléments de l'actif immobilisé, avant de tirer les conséquences de cette requalification sur les variations de l'actif net et sur les résultats déclarés par la société.

Si cette dernière soutient qu'elle exerce une activité de négoce parallèlement à son activité de promotion de marque et que les véhicules de démonstration en cause ont vocation à être revendus dès leur acquisition au terme d'une courte période d'utilisation, il n'est pas sérieusement contesté que les véhicules acquis par la société Maserati West Europe sont affectés à son activité de promotion de la marque Maserati dès leur acquisition. Dès lors, les véhicules de démonstration en cause ne présentaient pas le caractère d'éléments de stock mais, ainsi que l'a retenu l'administration fiscale, celui d'éléments de l'actif immobilisé.

Le pourvoi de la société est rejeté.

newsid:483536

Licenciement

[Brèves] Rappel de la finalité de l’indemnité de licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse

Réf. : Cass. soc., 23 novembre 2022, n° 21-12.873, FS-B N° Lexbase : A10778UG

Lecture: 4 min

N3538BZ3

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par Lisa Poinsot

Le 09 Décembre 2022

► L’indemnité de licenciement, dont les modalités de calcul sont forfaitaires, est la contrepartie du droit de l'employeur de résiliation unilatérale du contrat de travail ;

L’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse répare le préjudice résultant du caractère injustifié de la perte de l'emploi.

Faits et procédure. Dans le cadre de la réorganisation de l’entreprise, l’employeur propose à un salarié un nouveau poste. Le salarié, ayant refusé cette modification de son contrat de travail, est convoqué à un entretien préalable à son éventuel licenciement pour motif économique au cours duquel un contrat de sécurisation professionnelle lui est proposé. Le salarié accepte cette proposition. Pourtant, son contrat de travail est rompu par l’employeur.

Contestant le motif économique de son licenciement, le salarié saisit la juridiction prud’homale.

La cour d’appel (CA Besançon, 5 janvier 2021, n° 19/00695 N° Lexbase : A80114BC) constate, tout d’abord, que le conseil d’administration, aux termes d’une délégation de pouvoir consentie à la directrice générale, s’est réservé le pouvoir de licencier les directeurs de la société.

Ensuite, elle relève qu’en application de la convention collective au statut des personnels des organismes de développement économique du 9 mars 1999, le salarié bénéficie d’une indemnité compensatrice de six mois en sa qualité de directeur.

Enfin, elle retient qu’en application de l’article 12 du statut des personnes des organismes de développement économique du 9 mars 1999, révisé le 12 décembre 2007, le salarié bénéficie d’une indemnisation au titre d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse doublée. En outre, le salarié a, lors de la rupture de son contrat de travail, une ancienneté de onze ans, neuf mois et quatorze jours pour avoir été embauché à compter du 6 mars 2006.

Par conséquent, elle déclare le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamne l’employeur à payer au salarié la somme de 122 618,56 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et la somme de 45 982 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés afférents.

La cour d’appel ordonne également le remboursement par l’employeur des indemnités de chômage versées au salarié dans la limite de trois mois.

L’employeur forme alors un pourvoi en cassation.

La solution. En relevant d’office un moyen, la Chambre sociale de la Cour de cassation énonce les solutions susvisées. Sur le fondement de l’article L. 1234-9 du Code du travail N° Lexbase : L8132LGB et de l’article L. 1235-3 du même code N° Lexbase : L1442LKM, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2017-1387, du 22 septembre 2017 N° Lexbase : L7629LGN, et l’article 12 du statut des personnels des organismes de développement économiques, la Haute juridiction relève que cette disposition conventionnelle n’est pas relative aux dommages et intérêts dus en cas de licenciement injustifié, mais prévoit, en ce cas, le doublement de l’indemnité forfaitaire de licenciement.

Pour aller plus loin :

  • v. ÉTUDE : Les indemnités de licenciement, La nature juridique de l’indemnité de licenciement, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E6094ZCP ;
  • concernant le contrat de sécurisation professionnelle, la Cour de cassation considère, en application des articles L. 1233-67 N° Lexbase : L2155KGW et L. 1233-69 N° Lexbase : L8135LRQ du Code du travail, dans leur version issue de la loi n° 2015-990, du 6 août 2015 N° Lexbase : L4876KEC, l'article L. 1234-9 du même code, dans sa version issue de l'ordonnance n° 2017-1387, du 22 septembre 2017, et l'article 9 du statut des personnels des organismes de développement économique, qu’en l’absence de motif économique de licenciement, ce contrat n’a pas de cause et l’employeur est alors tenu à l’obligation du préavis et des congés payés afférents, sauf à tenir compte des sommes déjà versées
  • lire aussi M. Bernardis et E. Dubuy, Comment mettre en oeuvre un licenciement individuel pour motif économique avec contrat de sécurisation professionnelle (CSP) ?, Lexbase Social, juin 2020, n° 827 N° Lexbase : N3638BYE.

 

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Sociétés

[Brèves] SAS : la clause statutaire d’exclusion est conforme à la Constitution

Réf. : Conseil constitutionnel, décision n° 2022-1029 QPC, du 9 décembre 2022 N° Lexbase : A02288Y4

Lecture: 4 min

N3605BZK

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par Perrine Cathalo

Le 13 Décembre 2022

► Le premier alinéa de l’article L. 227-16 du Code de commerce, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2000-912, du 18 septembre 2000, relative à la partie législative du Code de commerce, et les mots « et L. 227-16 » figurant au second alinéa de l’article L. 227-19 du même code, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2019-744, du 19 juillet 2019, de simplification, de clarification et d’actualisation du droit des sociétés, sont conformes à la Constitution.

QPC. Le Conseil constitutionnel a été saisi par la Cour de cassation (Cass. com., 12 octobre 2022, n° 22-40.013, FS-B, QPC N° Lexbase : A55188NP, P. Cathalo, Lexbase Affaires, octobre 2022, n° 732 N° Lexbase : N2952BZD) d’une QPC relative au premier alinéa de l’article L. 227-16 N° Lexbase : L6171AIE et au second alinéa de l’article L. 227-19 N° Lexbase : L2386LRS du Code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi n° 2019-744, du 19 juillet 2019 N° Lexbase : L3994I73, aux termes desquels les statuts peuvent prévoir qu’un associé peut être tenu de céder ses actions dans les conditions qu’ils déterminent.

Dispositions contestées. La Chambre commerciale de la Cour de cassation considère que les articles L. 227-16 et L. 227-19 du Code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi n° 2019-744, du 19 juillet 2019, qui suppriment l’exigence d’unanimité pour l’adoption ou la modification d’une clause statutaire d’exclusion dans les SAS, sont susceptibles de porter atteinte de façon disproportionnée aux droits de propriété garantis par les articles 2 N° Lexbase : L1366A9H et 17 N° Lexbase : L1364A9E de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen, en ce qu’ils permettent la cession forcée par un associé de ses actions sans qu’il ait consenti à l’adoption de la clause statutaire d’exclusion l’autorisant.

Décision. En premier lieu, le Conseil constitutionnel constate que ces dispositions ont pour seul objet de permettre à une SAS d'exclure un associé en application d'une clause statutaire. S'il en résulte qu'un associé peut être contraint de céder ses actions, elles n'entraînent donc pas une privation de propriété au sens de l'article 17 de la Déclaration de 1789.

En deuxième lieu, le Conseil constitutionnel considère qu’en permettant à une société par actions simplifiée de contraindre un associé à céder ses actions, le législateur a entendu garantir la cohésion de son actionnariat et assurer ainsi la poursuite de son activité. Il ressort des travaux préparatoires de la loi n° 2019-744, du 19 juillet 2019 que, en prévoyant que l'adoption ou la modification d'une clause d'exclusion puisse être décidée sans recueillir l'unanimité des associés, il a également entendu éviter les situations de blocage pouvant résulter de l'opposition de l'associé concerné à une telle clause. Ce faisant, il a poursuivi un objectif d'intérêt général.

En troisième lieu, le Conseil constitutionnel rappelle qu’il résulte de la jurisprudence constante de la Cour de cassation que la décision d'exclure un associé ne peut être prise qu'à la suite d'une procédure prévue par les statuts. Elle doit reposer sur un motif, stipulé par ces statuts, conforme à l'intérêt social et à l'ordre public, et ne pas être abusive.

En quatrième lieu, l'exclusion de l'associé donne lieu au rachat de ses actions à un prix de cession fixé, selon l'article L. 227-18 du Code de commerce N° Lexbase : L6173AIH, en application de modalités prévues par les statuts de la société, ou, à défaut, soit par un accord entre les parties, soit par un expert désigné dans les conditions prévues à l'article 1843-4 du Code civil N° Lexbase : L1737LRR.

En dernier lieu, le Conseil constitutionnel affirme que la décision d'exclusion peut être contestée par l'associé devant le juge, auquel il revient alors de s'assurer de la réalité et de la gravité du motif retenu. L'associé peut également contester le prix de cession de ses actions.

Dès lors, le Conseil constitutionnel juge que les dispositions contestées ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit de propriété. Le grief tiré de la méconnaissance de ce droit doit donc être écarté.

Par conséquent, ces dispositions, qui ne méconnaissent aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, sont déclarées conformes à la Constitution.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les droits et obligations des associés de la société par actions simplifiées, L'exclusion de l'associé de la SAS, in Droit des sociétés, Lexbase N° Lexbase : E55127AE.

 

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Successions - Libéralités

[Brèves] Recherche de la licéité de la cause d'un acte révocatoire d'une donation

Réf. : Cass. civ. 1, 30 novembre 2022, n° 21-11.507, FS-B N° Lexbase : A45268WK

Lecture: 4 min

N3591BZZ

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par Laure Florent

Le 09 Décembre 2022

Il résulte des articles 1131 et 1133 anciens du Code civil qu'un contrat n'est valable que si les motifs ayant déterminé les parties à contracter sont licites ;
le juge aurait donc dû rechercher si la cause de l'acte révocatoire de donation ne résidait pas dans la volonté des parties de contourner les dispositions d'ordre public de l'article 922 du Code civil afférent à l’action en réduction.

Rappel des textes. Les faits en cause dans le présent arrêt étaient soumis aux textes antérieurs à l'entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-131, du 10 février 2016, portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations N° Lexbase : L4857KYK, qui a, notamment, supprimé la cause des conditions de validité du contrat.

La Cour de cassation, pour fonder sa solution, vise deux articles, afférents à la cause : l’article 1131 N° Lexbase : L1231AB9 et l’article 1133 N° Lexbase : L1233ABB du Code civil.

L’article 1131 ancien du Code civil prévoit que « l'obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet ».

Quant à l’article 1133 ancien du Code civil, il dispose que « la cause est illicite, quand elle est prohibée par la loi, quand elle est contraire aux bonnes mœurs ou à l'ordre public ».

Faits et procédure. La de cujus est décédée en 2015, en laissant pour lui succéder ses trois enfants.

En 1994, elle avait consenti par acte authentique à son fils une donation, par préciput et hors part, d'une certaine somme investie dans un apport au capital d'une société commerciale et dans l'acquisition de parts détenues par l’une de ses filles dans trois sociétés civiles immobilières.

La donatrice et le donataire sont toutefois convenus en 2005, par acte authentique, de la révocation de la donation et le fils a remboursé à sa mère la somme donnée.

Dans le cadre du règlement de la succession, une des cohéritières a assigné ses cohéritiers en nullité de l’acte de révocation pour cause illicite.

La cour d’appel (CA Rennes, 8 décembre 2020, n° 18/04599 N° Lexbase : A175039P) a déclaré valable l’acte révocatoire de 2005, estimant que les mobiles ayant présidé à la révocation de la donation de 1994 étaient indifférents et ne pouvaient se confondre avec la cause de la convention qui n'était pas illicite, la révocation conventionnelle d'une donation ne se heurtant à aucune interdiction légale et étant toujours possible sans que les parties n'aient à en justifier les raisons.

Ces mobiles étaient prétendûment constitués par la volonté des auteurs de l’acte révocatoire de faire échec aux règles de la réserve héréditaire : si la donation avait été maintenue, la cohéritière aurait pu exercer une action en réduction de la libéralité revalorisée à la date d’ouverture de la succession de la de cujus.

Cassation. La Haute juridiction casse, et énonce qu’il résulte des articles 1131 et 1133 anciens du Code civil qu'un contrat n'est valable que si les motifs ayant déterminé les parties à contracter sont licites.

La cour d’appel aurait donc dû rechercher, comme il le lui était demandé, si la cause de l'acte révocatoire ne résidait pas dans la volonté des parties de contourner les dispositions d'ordre public de l'article 922 du Code civil, relatif à l’action en réduction.

On relèvera que si la cause a disparu des conditions de validité des contrats en 2016, certaines dispositions actuelles peuvent en être rapprochées ; on peut ainsi noter les dispositions de l’article 1162 nouveau du Code civil N° Lexbase : L0884KZR, selon lesquelles le contrat ne peut déroger à l'ordre public ni par ses stipulations, ni par son but, que ce dernier ait été connu ou non par toutes les parties.

On peut dès lors s’interroger sur la portée du présent arrêt, et se demander si la solution pourrait subsister après l'entrée en vigueur de la réforme du droit des contrats, malgré la suppression de la notion de cause dans le Code civil.

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