Le Quotidien du 29 avril 2022

Le Quotidien

Accident du travail - Maladies professionnelles (AT/MP)

[Brèves] Amiante : précisions par le Conseil d’État des règles de réparation du préjudice d’anxiété

Réf. : CE 1°-4° ch. réunies, 19 avril 2022, n° 457560, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A05127UI

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N1290BZS

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par Laïla Bedja

Le 05 Mai 2022

► La publication de l'arrêté qui inscrit l'établissement en cause, pour une période au cours de laquelle l'intéressé y a travaillé, sur la liste établie par arrêté interministériel, est par elle-même de nature à porter à la connaissance de l'intéressé, s'agissant de l'établissement et de la période désignés dans l'arrêté, la créance qu'il peut détenir de ce chef sur l'administration au titre de son exposition aux poussières d'amiante ; le droit à réparation du préjudice en question doit donc être regardé comme acquis pour la détermination du point de départ du délai de prescription de quatre ans, à la date de publication de cet arrêté ;

► Lorsque l’établissement a fait l’objet de plusieurs arrêtés successifs étendant la période d’inscription ouvrant droit à l’ACAATA, la date à prendre en compte est la plus tardive des dates de publication d’un arrêté inscrivant l’établissement pour une période pendant laquelle le salarié y a travaillé.

La procédure. Dans le cadre d’une procédure de demande de réparation du préjudice moral des suites d’une exposition à l’amiante, la cour administrative d’appel de Marseille a saisi le Conseil d’État d’une demande d’avis portant sur l’application des règles de prescription à cette action en réparation. Elle demandait notamment :

- la date de départ du délai de prescription notamment lorsque l’établissement a fait l’objet de plusieurs arrêtés successifs étendant la période d’inscription ouvrant droit à l’ACAATA ;

- s’agissant du préjudice d’anxiété évoqué, constitue-t-il un préjudice continu et évolutif dont la créance en résultant doit être rattachée à chacune des années au cours desquelles il a été subi ;

- si les recours formés à l’encontre de l’État, par des tiers tels que les ayants droit des salariés d’autres sociétés ayant donné lieu aux quatre décisions du Conseil d'État du 3 mars 2004, n°s 241150, 241151, 241152, 241153 (CE, contentieux, n° 241150 N° Lexbase : A3772DBC, n° 241151 N° Lexbase : A3773DBD, n° 241152 N° Lexbase : A3774DBE et n° 241153 N° Lexbase : A3775DBG) ou des sociétés comme dans le cas de la décision du 9 novembre 2015, « SAS Construction mécanique de Normandie (CMN) » (CE Contentieux, 9 novembre 2015, n° 342468, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A3631NWE), soit à l'encontre de l'employeur, par les actions en reconnaissance de sa faute inexcusable formées devant les juridictions judiciaires, soit par la plainte pénale contre X déposée en 2006 par un salarié de l'établissement de Dunkerque de la société Normed et une association, interrompent le cours du délai de prescription.

L’avis. Énonçant la solution précitée, la Haute juridiction répond aux interrogations de la cour administrative d’appel. Concernant l’interruption du délai de prescription de quatre ans, le Conseil d’État précise que le dépôt d’une plainte avec constitution de partie civile interrompt le délai de prescription. En revanche, le délai n’est pas interrompu par la plainte pénale qui n'est pas déposée entre les mains d'un juge d'instruction et assortie d'une constitution de partie civile, ni l'engagement de l'action publique, ni l'exercice par le condamné ou par le ministère public des voies de recours contre les décisions auxquelles cette action donne lieu en première instance et en appel.

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Actualité judiciaire

[A la une] Trois questions pour comprendre la condamnation de Coline Berry pour diffamation

Lecture: 11 min

N1292BZU

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par Vincent Vantighem

Le 28 Avril 2022

Du statut de plaignante dans une affaire de viols à celui de prévenue pour « diffamation »… Coline Berry a été condamnée, jeudi 14 avril, par le tribunal judiciaire d’Aurillac (Cantal). Elle a été reconnue coupable d’avoir porté « une atteinte à l’honneur » de Jeane Manson, l’ancienne compagne de l’acteur Richard Berry.

Pour bien comprendre cette affaire, il faut remonter un peu plus d’un an en arrière. En janvier 2021, très exactement. À l’époque, Coline Berry annonce, dans les colonnes du Monde, qu’elle vient de déposer une plainte pour « viols sur mineurs » et « agressions sexuelles » à l’encontre de son père.

Dans le grand quotidien du soir, elle décrit alors les abus sexuels que son père lui aurait imposés, entre ses 6 et ses 10 ans, alors qu’elle n’était encore qu’une enfant. Soit entre 1982 et 1986. Elle explique alors qu’elle devait rejoindre le lit conjugal que son père partageait alors avec Jeane Manson, une chanteuse américaine, pour participer à de sordides ébats sexuels. Sur la base de ces accusations, le parquet de Paris décide d’ouvrir une enquête préliminaire et confie, alors, les investigations à la Brigade de protection des mineurs (BPM). En parallèle, Jeane Manson attaque, de son côté, Coline Berry en diffamation.

Mais, alors que l’enquête sur le fond du dossier est toujours en cours à Paris, le tribunal judiciaire d’Aurillac a donc décidé d’examiner la plainte en diffamation et, finalement, de condamner Coline Berry a 2 000 euros d’amende. Au surplus, la fille de l’acteur doit verser 20 000 euros de dommages et intérêts à Jeane Manson ainsi que 5 000 euros, au titre des frais de justice. Un jugement qui a suscité beaucoup de réactions dans le microcosme judiciaire. De nombreux observateurs se sont en effet étonnés que le tribunal d’Aurillac juge du caractère diffamatoire des accusations portées par Coline Berry, alors même que celles-ci n’ont pas encore été tranchées par la justice. Lexbase s’est procuré ce jugement de 31 pages afin de répondre aux questions soulevées.

  • Pour quelles raisons Coline Berry a-t-elle été reconnue coupable par le tribunal d’Aurillac ?

En matière de diffamation, il existe deux faits justificatifs spéciaux : la vérité et la bonne foi. Pour convaincre le tribunal, Coline Berry aurait donc dû, dans un premier temps, démontrer que les faits d’inceste qu’elle a dénoncés sont « la vérité, de manière parfaite et complète ». Impossible selon le tribunal d’Aurillac : « Les nombreuses attestations produites (de personnes qui n’étaient pas présentes lors des agressions sexuelles supposées) ne suffisent pas à démontrer la vérité », expliquent les magistrats dans ce jugement de 31 pages au total. Il aurait en outre fallu respecter la très complexe procédure dite de l’offre de preuve de la vérité du fait diffamatoire.

Coline Berry aurait également pu être relaxée en démontrant qu’elle était de bonne foi, en portant de telles accusations contre son père et son ex-compagne, Jeane Manson. Pour cela, la justice exige que les propos concernent un « motif légitime d’expression », fassent l’objet d’une « enquête sérieuse » et soient portés avec « prudence » et sans « animosité personnelle ». C’est ce dernier point qui pose problème à Coline Berry selon le tribunal d’Aurillac.

« Le contexte démontre une animosité de la part de [Coline Berry] à l’égard de son père. (…) En allant au-delà du doute raisonnable, le tribunal a l’intime conviction qu’il existe [également] une animosité évidente de Coline Berry à l’égard de Jeane Manson, animosité qui a en outre été démontrée lors de l’audience au regard des échanges entre les deux protagonistes. » En raison de cette « animosité », le tribunal a donc considéré que Coline Berry ne pouvait pas être relaxée.

Si un appel est interjeté, la cour devra revenir sur cette appréciation, mais aussi se demander si la condamnation n’a pas porté à Coline Berry une atteinte disproportionnée à sa liberté d’expression, appréciée dans le contexte de la libération de la parole des victimes d’agressions sexuelles.

  • Pourquoi le tribunal d’Aurillac n’a-t-il pas attendu le résultat de l’enquête de la Brigade des mineurs avant d’examiner cette affaire ?

Comment peut-on juger du caractère diffamatoire d’accusations alors que celles-ci n’ont pas encore été tranchées par la justice ? Dès le début du procès, le 1er avril, les avocats de Coline Berry et du Monde avaient alerté sur le fait qu’il était, selon eux, impossible de juger Coline Berry pour diffamation alors même que les accusations d’incestes qu’elle porte font toujours l’objet d’une enquête. Ils réclamaient donc un sursis à statuer. Autrement dit que le tribunal d’Aurillac patiente avant d’examiner ce dossier.

La défense de Coline Berry a d’ailleurs présenté une question prioritaire de constitutionnalité à ce sujet devant le tribunal correctionnel. Cette QPC portait sur l’article 35 de la loi de 1881, au terme duquel la vérité des faits diffamatoire peut toujours être prouvée, sauf lorsque l’imputation concerne la vie privée. Dans cette dernière hypothèse et plus généralement lorsque la preuve de la vérité du fait diffamatoire est légalement prohibée il sera obligatoirement sursis à la poursuite et au jugement du délit de diffamation lorsque le fait imputé aura fait l’objet de poursuites commencées à la requête du ministère public ou d’une plainte de la partie du prévenu.

L’article 35 prévoit très spécifiquement que lorsque les propos dénoncés portent sur des faits d’agression sexuelle sur mineur la preuve de la vérité des faits peut être apportée. Dans ce cas, le sursis à statuer ne sera plus obligatoire.

La QPC présentée soutenait que les dispositions de l’article 35 de la loi de 1881 provoqueraient une « rupture d’égalité non nécessaire, ni proportionnée », le prévenu en diffamation ayant dénoncé des faits de violences sexuelles sur mineurs, pour lesquels une procédure pénale serait en cours, ne pouvant bénéficier du sursis à statuer alors que celui-ci est obligatoire pour touts les autres faits de la vie privée. La QPC soulignait également qu’il existait un risque d’atteinte au principe de sécurité juridique dès lors qu’en l’absence de sursis à statuer, deux décisions contradictoires pouvaient être rendues. Enfin, le Conseil de Coline Berry avançait que les dispositions en cause portaient atteinte au secret de l’enquête et de l’instruction.

Le tribunal correctionnel refusera de transmettre la QPC estimant notamment que la différence de traitement voulu par le législateur se justifie par une différence de situations, qu’il n’existe pas de risque de contrariété puisque, affirme-t-il « les faits d’inceste et autres agressions sexuelles sont prescrits et ne seront jamais jugés » et, d’autre part, «  toutes les juridictions sont parfaitement aptes à faire la différence entre une affaire de diffamation et une affaire d’agression sexuelle ». S’agissant de l’atteinte au secret de l’enquête, le tribunal rappelle qu’elle est permise par le droit de la presse. Enfin, la juridiction justifie l’absence de sursis à statuer en matière de « crimes sexuels » (sans préciser que les dispositions concernent les faits commis sur mineurs) par le fait que cela reviendrait à « bloquer une procédure de diffamation » ce qui constituerait « une atteinte profonde au droit de la défense de la personne diffamée qui va devoir attendre qu’une autre affaire pénale, qui n’a quasiment pas de limite dans le temps, soit tranchée pour voir ses propres droits reconnus ».

Après avoir répondu à cette QPC, les juges de première instance rejettent la demande de sursis à statuer présentée par la défense de Coline Berry. S’appuyant sur l’article 35 de la loi de 1881 et notamment son alinéa 5, le tribunal d’Aurillac a estimé qu’il n’avait aucune raison d’attendre : « Aucune poursuite n’a été engagée par le parquet [pour les faits d’incestes], d’autant que […] toutes les parties conviennent que les faits dénoncés seraient prescrits. Dès lors, ce moyen permet de rejeter le sursis à statuer sollicité », écrivent-ils dans le jugement.

On peut s’étonner de cette motivation dès lors que le tribunal l’a rappelé lui-même « aux termes du 5e alinéa de l’article 35 de la loi du 29 juillet 1881, le sursis est obligatoire lorsque le fait imputé est l’objet de poursuites commencées sur requête du ministère public ou sur plainte du prévenu si la preuve de la vérité diffamatoire est prohibée, ou encore lorsque le fait imputé concerne la vie privée, sauf s’il s’agit de [agressions sexuelles sur mineur] ». En l’espèce, par la nature des faits dénoncés, le sursis à statuer était facultatif et l’opportunité de le prononcer appartenait aux juges lesquels devaient estimer s’ils étaient, ou non, en mesure de former leur décision. Le tribunal le rappelle d’ailleurs par lui-même plus loin en affirmant « le sursis facultatif relève du pouvoir souverain des juges du fond […] en outre, il importe peu qu’une enquête pénale soit en cours pour les faits [dénoncés] ».

Au passage, et après avoir rappelé à cinq reprises que les faits dénoncés par Coline Berry, seraient prescrits, il est surprenant de lire des magistrats prédire le futur (en se contredisant par ailleurs) : « « les faits d’inceste et autres agressions sexuelles sont prescrits et ne seront jamais jugés […] Il faut ici rappeler que la décision qui sera prise n’aura aucune conséquence sur l’enquête préliminaire en cours au parquet de Paris. Il est bien évident que si [les faits n’étaient pas considérés comme prescrits], les magistrats en charge d’une affaire criminelle sauraient écarter un jugement correctionnel de diffamation qui doit se cantonner à ce seul aspect des choses, même si, et là est toute la complexité de l’affaire, il existe un certain lien entre les deux procédures […] il faudrait un jugement de condamnation de Mme Manson pour agression sexuelle à l’encontre de Mme Berry Rojtman, jugement qui n’est évidement pas présent et ne le sera certainement pas après l’enquête en cours au parquet de Paris dans la mesure où les faits sont prescrits ».

On rappellera à toutes fins utiles qu’il n’est aujourd’hui plus interdit d’apporter la vérité d’un fait constituant une infraction prescrite.

  • Pourquoi Jeane Manson a-t-elle touché 20 000 euros de dommages et intérêts ?

Outre l’amende de 2 000 euros et les frais de justice de son adversaire de 5 000 euros, Coline Berry a également été condamnée à verser 20 000 euros de dommages et intérêts à Jeane Manson. Un montant qui a suscité beaucoup de questions.

Le tribunal d’Aurillac tente de s’en expliquer dans son jugement. « Il est indubitable que Jeane Manson est une personnalité publique, qu’elle est toujours présente sur la scène médiatique et culturelle, même si c’est avec moins d’intensité que par le passé, écrivent-ils dans leur jugement. Dès lors, il est indéniable que les diffamations en cause lui ont causé un préjudice moral qu’il faut réparer. Même s’il est difficile de mesurer un tel préjudice dans la mesure où on ne parvient pas à appréhender totalement et avec précision les manques à gagner d’une artiste dont l’image est essentielle à l’exercice de son métier. » Pour rappel, la chanteuse américaine avait réclamé, lors de l’audience, 250 000 euros de dommages et intérêts.

Pour aller plus loin :

  • E. Raschel, ÉTUDE : Les justifications en droit de la presse, La justification de la diffamation, la vérité du fait diffamatoire, Les règles procédurales, in Droit de la presse, Lexbase N° Lexbase : E6402Z8M.
  • E. Raschel, ÉTUDE : Les justifications en droit de la presse, La justification de la diffamation, la vérité du fait diffamatoire, Les règles substantielles, in Droit de la presse, Lexbase N° Lexbase : E6401Z8L.

newsid:481292

Contrôle fiscal

[Brèves] Secret professionnel de l’administration fiscale et droit de communication : un équilibre (parfois) dur à trouver !

Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 8 avril 2022, n° 450114, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A02567TN

Lecture: 3 min

N1195BZB

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par Marie-Claire Sgarra

Le 20 Avril 2022

Le secret professionnel institué par l’article L. 103 du LPF n’est pas opposable au débiteur solidaire de l’impôt, dans la mesure où les pièces couvertes par le secret sont utiles à l’exercice de son droit de réclamation, dans la limite de la solidarité prononcée à son encontre ;

► Il ne fait pas davantage obstacle à la communication aux héritiers tenus au paiement d’une dette fiscale de la succession des documents administratifs sur lesquels l’administration fiscale s’est fondée pour établir l’imposition mise à la charge de la succession, dans la mesure où ils sont utiles à l’exercice de leurs droits, y compris lorsque plusieurs personnes sont intéressées par les mêmes documents, sous réserve, le cas échéant, de l’occultation des autres informations mettant en cause la vie privée de tiers qu’ils comporteraient.

Les faits :

  • à la suite du décès de Mme G., l'administration fiscale a adressé à la succession un avis d’ISF, faisant état d'une base d'imposition de plus de deux millions d'euros, et réclamant le paiement de 8 273 euros
  • les deux requérants, respectivement petit-fils et arrière-petit-fils la défunte, faisaient valoir devant le TA, d'une part, qu'ils avaient réglé cette somme à concurrence de leurs quotes-parts dans la succession, et, d'autre part, qu'ils voulaient connaître les éléments retenus par l'administration, qui leur semblait avoir inclus dans la base d'imposition la valeur de contrats d'assurance vie que la défunte avait souscrits au bénéfice de leur tante et grand-tante ou des enfants de celle-ci.

Rappel. Au nombre des secrets protégés par la loi, figure le secret professionnel auquel l'article L. 103 du LPF N° Lexbase : L8485AEY soumet les personnes appelées, à l'occasion de leurs fonctions ou attributions, à intervenir dans la détermination de l'assiette, le contrôle, le recouvrement ou le contentieux des impôts, droits, taxes et redevances prévus au code général des impôts pour toutes les informations recueillies à l'occasion de ces opérations.

Solution du Conseil d’État. Pour juger que l'article L. 103 du LPF faisait obstacle à la communication des documents demandés, relatifs à ces contrats et détenus par l'administration fiscale, le tribunal administratif s'est fondé sur la circonstance que les requérants n'étaient pas débiteurs solidaires de l'impôt de solidarité sur la fortune mis à la charge de la succession.

En statuant ainsi, sans rechercher si les documents demandés étaient utiles aux héritiers pour l'exercice de leurs droits concernant une imposition dont ils avaient pour partie assumé la charge, le tribunal administratif a commis une erreur de droit.

Précisions

Le Conseil d'État a jugé que le secret professionnel auquel sont astreints les agents de l'administration fiscale ne fait pas obstacle à la communication au redevable de l'impôt des procès-verbaux évaluant la valeur locative d'un bien (CE 9° et 10° ssr., 18 juillet 2011, n° 345564, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A3205HWM).

Le droit de communication ne s'applique qu'à des documents qui revêtent un caractère pertinent pour l'évaluation des biens commerciaux, et il ne saurait, non plus, avoir pour conséquence de divulguer des informations couvertes par l'un des secrets protégés par l'article 6 de la loi du 17 juillet 1978 (loi n° 78-753 du 17 juillet 1978, portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal N° Lexbase : L6533AG3). Cependant, si les procès-verbaux pertinents établis pour une telle évaluation sont susceptibles d'être communiqués à un redevable de l'imposition régie par l'article 1498 du CGI N° Lexbase : L0267HMT, tel n'est pas le cas des fiches de calcul établies par l'administration fiscale à cette même fin (CE 9° et 10° ssr., 30 décembre 2014, n° 371225, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A8548M84).

 

 

 

 

 

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Données personnelles

[Brèves] Les « questions-réponses » de la CNIL peuvent faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir !

Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 8 avril 2022, n° 452668, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A06317TK

Lecture: 4 min

N1238BZU

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par Vincent Téchené

Le 20 Avril 2022

► Dès lors que par la question-réponse litigieuse, la CNIL a fait part aux responsables de traitement et personnes concernées de son interprétation de l'article 82 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, quant à la portée et au champ d'application des exemptions à l'obligation de consentement préalable au dépôt des traceurs de connexion, en ce qui concerne les opérations dites d'affiliation, cette prise de position, de par sa teneur, est susceptible de produire des effets notables sur la situation des personnes qui se livrent à des opérations d'affiliation et des utilisateurs et abonnés de services électroniques, de sorte qu’elle est susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir.

Faits et procédure. Des requérants ont formé un recours pour excès de pouvoir contre la question-réponse n° 12 de la série de 32 questions-réponses sur les lignes directrices modificatives et la recommandation « cookies et autres traceurs » que la CNIL a mise en ligne sur son site internet le 18 mars 2021.

Décision. Le Conseil d’État rappelle d’abord que les documents de portée générale émanant d'autorités publiques, matérialisés ou non, tels que les circulaires, instructions, recommandations, notes, présentations ou interprétations du droit positif peuvent être déférés au juge de l'excès de pouvoir lorsqu'ils sont susceptibles d'avoir des effets notables sur les droits ou la situation d'autres personnes que les agents chargés, le cas échéant, de les mettre en œuvre. Ont notamment de tels effets ceux de ces documents qui ont un caractère impératif ou présentent le caractère de lignes directrices.
En l’espèce, il considère que par la question-réponse n° 12 mise en ligne le 18 mars 2021 sur le site internet de la CNIL, cette autorité a fait part aux responsables de traitement et personnes concernées de son interprétation de l'article 82 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 N° Lexbase : L8794AGS, quant à la portée et au champ d'application des exemptions à l'obligation de consentement préalable au dépôt des traceurs de connexion, en ce qui concerne les opérations dites d'affiliation. Il estime qu’eu égard à sa teneur, cette prise de position, émise par l'autorité de régulation sur son site internet, est susceptible de produire des effets notables sur la situation des personnes qui se livrent à des opérations d'affiliation et des utilisateurs et abonnés de services électroniques. Le Conseil en conclut que la fin de non-recevoir opposée par la CNIL, tirée de ce que cette question-réponse n° 12 et son refus de la retirer seraient insusceptibles de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, doit être écartée.

Sur la légalité de la question-réponse contestée, le Conseil d’État retient qu’en informant, par celle-ci, les personnes intéressées de son interprétation de l'article 82 de la loi du 6 janvier 1978 et de sa portée quant au dépôt de traceurs de connexion en matière d'opérations d'affiliation, la CNIL, qui n'a édicté aucune interdiction générale et absolue du dépôt de tels traceurs, n'a pas excédé sa compétence.

Il estime également que la CNIL n’a pas méconnu les dispositions de l'article 82 de la loi du 6 janvier 1978 en exigeant que le consentement des utilisateurs soit recueilli préalablement au dépôt et à l'utilisation de traceurs de connexion ayant pour objet de déterminer si l'internaute qui a accompli un acte d'achat sur un site marchand s'est connecté sur ce site à partir d'un lien figurant sur celui de l'opérateur affilié.

En outre, les éléments donnés par la réponse litigieuse portent uniquement sur les traceurs de connexion utilisés exclusivement à des fins de facturation des opérations d'affiliation. Elle ne s'applique ainsi pas aux traceurs de connexion mis en œuvre pour les besoins de services de remboursement, dits de «  cashback », ou de récompense, dits de « reward ». Ainsi, selon le Conseil d’État, les éléments de réponse contestés n'ont donc pas pour objet, et n'auraient pu avoir légalement pour effet, d'exiger que le dépôt et l'utilisation de tels traceurs soient précédés du recueil du consentement de l'internaute, dans la mesure où ils sont alors strictement nécessaires à la fourniture d'un service de communication en ligne à la demande expresse de l'utilisateur. Il s'ensuit que les requérants ne peuvent utilement soutenir que le document qu'ils attaquent aurait, à cet égard, méconnu l'article 82 de la loi du 6 janvier 1978.

En conséquence, le Conseil conclut que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation pour excès de pouvoir de la question-réponse n° 12 de la série de 32 questions-réponses sur les lignes directrices modificatives et la recommandation « cookies et autres traceurs » mise en ligne sur le site de la CNIL le 18 mars 2021.

newsid:481238

Environnement

[Brèves] Restrictions apportées au développement des installations de tri mécano-biologiques des déchets : pas de méconnaissance du principe de libre administration des collectivités territoriales

Réf. : Cons. const., décision n° 2022-990 QPC du 22 avril 2022 N° Lexbase : A35437UR

Lecture: 2 min

N1281BZH

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par Yann Le Foll

Le 28 Avril 2022

► Les restrictions législatives apportées au développement des installations de tri mécano-biologiques des déchets ne constituent pas une méconnaissance du principe de libre administration des collectivités territoriales (sur renvoi de CE, 5°-6° ch. réunies, 24 février 2022, n° 456190, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A84887NP).

Objet QPC. Les deuxième et troisième phrases du seizième alinéa du paragraphe I de l'article L. 541-1 du Code de l'environnement N° Lexbase : L6920L7G, dans sa version issue de l'article 90 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020, relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire N° Lexbase : L8806LUP, conditionnent l'autorisation de nouvelles installations de tri mécano-biologique, de l'augmentation des capacités d'installations existantes ou de leur modification notable à la généralisation du tri à la source des biodéchets par les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale. Elles interdisent également aux personnes publiques d'apporter une aide à ces installations.

Position des Sages. D'une part, les dispositions contestées se bornent à soumettre la création d'installations de tri mécano-biologique ou l'extension des capacités d'installations existantes au respect de la condition, qui n'est pas imprécise, de généralisation du tri à la source des biodéchets. Elles n'interdisent pas aux collectivités territoriales de recourir à de telles installations et ne font pas davantage obstacle à la poursuite de l'exploitation des installations existantes.

D'autre part, par l'interdiction des aides publiques, les dispositions contestées visent uniquement à empêcher les personnes publiques de contribuer au développement des capacités de tri mécano-biologique par la création de nouvelles installations ou l'accroissement des capacités des installations existantes.

Décision. Les dispositions contestées ne méconnaissent donc pas le principe de libre administration des collectivités territoriales garanti par l'article 72 de la Constitution N° Lexbase : L1342A9L et doivent être déclarées conformes à la Constitution.

newsid:481281

Procédure prud'homale

[Brèves] Le délai de prescription de 2 ans en matière prud'homale est-il contraire au droit d'accès au juge ?

Réf. : Cass. soc., 20 avril 2022, n° 19-17.614, FS-B N° Lexbase : A08947UN

Lecture: 3 min

N1283BZK

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par Lisa Poinsot

Le 04 Mai 2022

► La réduction de la prescription, de 5 à 2 ans, applicable à toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail ne constitue pas une atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge, dès lors que ce délai a pour finalité de garantir la sécurité juridique en fixant un terme aux actions du salarié dûment informé des voies et délais de recours qui lui sont ouverts devant la juridiction prud'homale.

Faits et procédure. Un salarié se voit notifier son licenciement pour motif économique le 21 novembre 2011. Le 24 juin 2015, il saisit la juridiction prud’homale afin de contester le bien-fondé de son licenciement.

La cour d’appel (CA Lyon, 5 avril 2019, n° 17/04411 N° Lexbase : A2216Y8L) juge que l’action du salarié est prescrite. Elle rappelle, à ce titre, que l’employeur a adressé au salarié la lettre de son licenciement le 21 novembre 2011. À compter de la réception de ce courrier par le salarié, le délai de prescription litigieux, initialement de 5 ans, a bien couru. Ce délai s’est trouvé réduit à 2 ans à compter du 17 juin 2013, en raison de l’entrée en vigueur de l’article L. 1471-1 du Code du travail N° Lexbase : L1453LKZ, créé par la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 N° Lexbase : L0394IXU et selon lequel « toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par 2 ans à compter du jour où celui qu'il exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit ». Ainsi, le délai de prescription a expiré le 17 juin 2015.

Les juges du fond en déduisent que l’action introduite par le salarié, le 24 juin 2015, est irrecevable puisqu’elle est prescrite.

Le salarié forme alors un pourvoi en cassation en soutenant que la réduction du délai de prescription de l’action devant le conseil de prud’hommes apporte une restriction disproportionnée au droit d’accès à un tribunal, de sorte qu’elle est contraire à l’article 6, §1 de la CESDH N° Lexbase : L7558AIR.

La solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi formé par le salarié. Pour appuyer sa décision, elle rappelle la jurisprudence européenne qui admet des limitations dans l’espace et le temps le droit d’accès aux tribunaux. Toutefois, ces limitations doivent être raisonnables et proportionnées au regard du but poursuivi, ce qui est le cas en l’espèce. En outre, le délai légal de prescription de 2 ans permet de :

  • garantir la sécurité juridique par la fixation d’un termes aux actions ;
  • mettre les défendeurs à l’abri de plaintes tardives ;
  • empêcher l’injustice qui pourrait se produire si les tribunaux étaient appelés à se prononcer sur des événements survenus loin dans le passé à partir d'éléments de preuve auxquels on ne pourrait plus ajouter foi et qui seraient incomplets en raison du temps écoulé.

Pour aller plus loin :

 

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