Jurisprudence : Décision n°84-181 DC du 11-10-1984

Décision n°84-181 DC du 11-10-1984

A8097ACU

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CONSEIL CONSTITUTIONNEL

Décision n°84-181 DC du 11-10-1984


Publié au JORF 13 octobre 1984.
Rec. p. 78

Loi visant à limiter la concentration et à assurer la transparence financière et le pluralisme des entreprises de presse


Le Conseil constitutionnel a été saisi, d'une part, le 12 septembre 1984, par MM Charles Pasqua, Jean Cluzel, Etienne Dailly, Georges Mouly, Paul Robert, Paul Girod, Raymond Soucaret, Charles Beaupetit, Michel Durafour, Pierre Merli, Victor Robini, Jean François-Poncet, Max Lejeune, Mme Brigitte Gros, MM Guy Besse, Joseph Raybaud, Jean-Pierre Cantegrit, Jacques Moutet, Jacques Pelletier, Roland du Luart, Christian Bonnet, Louis de la Forest, Roland Ruet, Albert Voilquin, Yves Goussebaire-Dupin, Jean-Marie Girault, Jean-François Pintat, Jacques Ménard, Jean Bénard Mousseaux, Hubert Martin, Jean-Pierre Tizon, Guy de La Verpillière, Jean-Pierre Fourcade, Pierre Louvot, Pierre-Christian Taittinger, Michel Crucis, Louis Boyer, Pierre Croze, Michel Miroudot, Jean-Paul Chambriard, Louis Lazuech, Henri Elby, Jacques Larché, Jean Boyer, Michel Sordel, Richard Pouille, Jules Roujon, Jacques Thyraud, Jacques Descours Desacres, André Bettencourt, Charles Jolibois, Philippe de Bourgoing, Marcel Lucotte, Jean Arthuis, Jean-Pierre Blanc, Roger Boileau, Raymond Bouvier, Pierre Brantus, Pierre Ceccaldi-Pavard, Adolphe Chauvin, Auguste Chupin, Jean Colin, André Diligent, Jean Faure, Charles Ferrant, André Fosset, Jean Francou, Henri Goetschy, Daniel Hoeffel, Jean Huchon, Jean Lecanuet, Bernard Lemarié, Georges Lombard, Jean Machet, Jean Madelain, Louis Mercier, Daniel Millaud, René Monory. Jacques Mossion, Dominique Pado, Francis Palmero, Raymond Poirier, Roger Poudonson, André Rabineau, Jean-Marie Rausch, Pierre Schiélé, Pierre Sicard, Michel Souplet, Pierre Vallon, Albert Vecten, Louis Virapoullé, Jean-Marie Bouloux, Marcel Daunay,
Alfred Gérin, Roger Lise, Michel Alloncle, Jean Amelin, Hubert d'Andigné, Marc Bécam, Henri Belcour, Paul Bénard, Amédée Bouquerel, Yvon Bourges, Jacques Braconnier, Raymond Brun, Michel Caldaguès, Pierre Carous, Auguste Cazalet, Jean Chamant, Jacques Chaumont, Michel Chauty, Jean Chérioux, François O Collet, Henri Collette, Charles de Cuttoli, Luc Dejoie, Jacques Delong, Charles Descours, Franz Duboscq, Marcel Fortier, Philippe François, Michel Giraud, Adrien Gouteyron, Bernard-Charles Hugo, Roger Husson, Paul Kauss, Christian de La Malène, Jean-François Le Grand, Maurice Lombard, Paul Malassagne, Paul Masson, Michel Maurice-Bokanowski, Geoffroy de Montalembert, Arthur Moulin, Jean Natali, Lucien Neuwirth, Paul d'Ornano, Christian Masson, Sosefo Makapé Papilio, Christian Poncelet, Henri Portier, Alain Pluchet, Claude Prouvoyeur, Josselin de Rohan, Roger Romani, Michel Rufin, Maurice Schumann, Louis Souvet, Dick Ukeiwé, Jacques Valade, Edmond Valcin, André-Georges Voisin, sénateurs.
et, d'autre part, le 14 septembre 1984, par MM Jean-Claude Gaudin, Jacques Dominati, Jean Rigaud, Francisque Perrut, Germain Gengenwin, Marcel Bigeard, Paul Pernin, Gilbert Gantier, Claude Birraux, Bernard Stasi, Albert Brochard, Joseph-Henri Maujoüan du Gasset, Alain Madelin, Jean Brocard, Michel d'Ornano, Philippe Mestre, Edmond Alphandéry, Pierre Micaux, Charles Fèvre, Georges Mesmin, Jean Briane, Jean Desanlis, Francis Geng, Jean-Pierre Soisson, René Haby, Jacques Blanc, François d'Aubert, Charles Deprez, Adrien Durand, Adrien Zeller, Pascal Clément, Jacques Fouchier, Mme Louise Moreau, MM Loïc Bouvard, Jean-Paul Fuchs, André Rossinot, Charles Millon, Alain Mayoud, Maurice Dousset, Roger Lestas, Raymond Barre, François d'Harcourt, Marcel Esdras, Jean Seitlinger, Claude Labbé, Jacques Chirac, Bernard Pons, Jacques Toubon, Marc Lauriol, Bruno Bourg-Broc, Georges Tranchant, Roger Corrèze, Robert-André Vivien, Philippe Séguin, Gabriel Kaspereit, Mme Nicole de Hauteclocque, MM René La Combe, Daniel Goulet, Jean-Paul Charié, Pierre Weisenhorn, Jacques Godfrain, Emmanuel Aubert, Pierre Messmer, Jean-Louis Goasduff, Claude-Gérard Marcus, Pierre Mauger, Christian Bergelin, Maurice Couve de Murville, Alain Peyrefitte, Pierre-Charles Krieg, Didier Julia, Pierre Bachelet, Robert Wagner, Jean de Préaumont, Michel Debré, Etienne Pinte, Tutaha Salmon, Robert Galley, Roland Nungesser, Edouard Frédéric-Dupont, Jean Tiberi, Pierre Raynal, Jean-Paul de Rocca Serra, Régis Perbet, Michel Cointat, Charles Paccou, Michel Barnier, Michel Péricard, Georges Gorse, Jacques Baumel, Yves Lancien, députés, dans les conditions prévues à l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, de la conformité à celle-ci de la loi visant à limiter la concentration et à assurer la transparence financière et le pluralisme des entreprises de presse.

Le Conseil constitutionnel, Vu la Constitution ;

Vu l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment les articles figurant au chapitre II du titre II de ladite ordonnance ;
Le rapporteur ayant été entendu ;

Sur la procédure législative :
Considérant que les auteurs de l'une et de l'autre saisines soutiennent que la loi soumise à l'examen du Conseil constitutionnel aurait été adoptée selon une procédure irrégulière ;
qu'ils exposent que, lors des première et seconde lectures devant l'Assemblée nationale, le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales a présenté un rapport ne comportant pas de conclusions, notamment en ce qui concerne les très nombreux amendements présentés ;
que, selon les auteurs de l'une des saisines, cette procédure aurait également enfreint les articles 43 et 44 de la Constitution ;
Considérant que l'article 43 de la Constitution dispose :
"Les projets et propositions de loi sont, à la demande du Gouvernement ou de l'assemblée qui en est saisie, envoyés pour examen à des commissions spécialement désignées à cet effet. :
Les projets ou propositions pour lesquels une telle demande n'a pas été faite sont envoyés à l'une des commissions permanentes dont le nombre est limité à six dans chaque assemblée" ;
que l'article 44 dispose :
"Les membres du Parlement et le Gouvernement ont le droit d'amendement.
- Après l'ouverture du débat, le Gouvernement peut s'opposer à l'examen de tout amendement qui n'a pas été antérieurement soumis à la commission. :
Si le Gouvernement le demande, l'assemblée saisie se prononce par un seul vote sur tout ou partie du texte en discussion en ne retenant que les amendements proposés ou acceptés par le Gouvernement" ;
Considérant que le projet dont est issue la loi soumise à l'examen du Conseil constitutionnel a été examiné en commission, avant sa discussion en séance publique, lors de chacune de ses lectures ;
qu'aucun amendement n'a été rejeté au motif qu'il n'aurait pas été soumis à la commission ;
que, par suite, les articles 43 et 44 de la Constitution n'ont pas été méconnus ;
Considérant que les articles 86, 90 et 91 du règlement de l'Assemblée nationale précisent l'objet, le contenu et la forme du rapport qui doit, après que la proposition ou le projet de loi ait été soumis à une commission comme le veut l'article 43 de la Constitution, être présenté aux députés au nom de la commission ;
Considérant que les règlements des assemblées parlementaires n'ayant pas en eux-mêmes valeur constitutionnelle, la seule méconnaissance des dispositions réglementaires invoquées ne saurait avoir pour effet de rendre la procédure législative contraire à la Constitution ;
Considérant, dès lors, que la loi soumise à l'examen du Conseil constitutionnel a été adoptée selon une procédure qui n'est pas contraire à la Constitution ;
Sur l'article 2 de la loi :
Considérant que l'article 2 de la loi soumise à l'examen du Conseil constitutionnel est ainsi conçu :
"Dans la présente loi :
1° le mot "personne" désigne une personne physique ou morale ou un groupement de droit ou de fait de personnes physiques ou morales ;
2° l'entreprise de presse s'entend de toute personne définie au 1° du présent article et qui édite ou exploite une ou plusieurs publications ;
3° le contrôle s'entend de la possibilité pour une personne d'exercer, sous quelque forme que ce soit et par tous moyens d'ordre matériel ou financier, une influence déterminante sur la gestion ou le fonctionnement d'une entreprise de presse" ;
Considérant que les députés auteurs de l'une des saisines soutiennent que les définitions ainsi énoncées présentent un caractère extensif et imprécis ;
que, par suite, les dispositions pénales de la loi qui font référence, directement ou indirectement, à ces notions insuffisamment définies enfreignent le principe constitutionnel de la légalité des délits et des peines proclamé par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ;
qu'en outre lesdites définitions permettent l'application de la loi aux partis politiques en violation de l'article 4 de la Constitution ;
que les sénateurs auteurs de l'autre saisine reprennent ce dernier grief à propos de l'article 21 de la loi ;
Considérant, d'une part, que les termes de "personne", "entreprise de presse", "contrôle" sont définis de façon suffisamment précise pour que les dispositions de caractère pénal qui s'y réfèrent, directement ou indirectement, ne méconnaissent pas, de ce seul chef, le principe constitutionnel de la légalité des délits et des peines ;
Considérant, d'autre part, que l'article 4 de la Constitution dispose :
"Les partis et groupements politiques concourent à l'expression du suffrage. Ils se forment et exercent leur activité librement. Ils doivent respecter les principes de la souveraineté nationale et de la démocratie" ;
Considérant que ces dispositions n'ont ni pour objet ni pour effet de conférer aux partis politiques, en matière de liberté de la presse, des droits supérieurs à ceux que l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 reconnaît à tous les citoyens ;
qu'il incombe seulement au législateur de formuler des prescriptions tendant à empêcher que l'application des règles relatives à la transparence financière et au pluralisme des entreprises de presse n'entrave l'activité spécifique des partis politiques dont le libre exercice est garanti par l'article 4 de la Constitution ;
Considérant que l'article 21 de la loi dispose :
"Pour l'accomplissement des missions qui lui sont assignées par la présente loi, la commission peut recueillir tous les renseignements nécessaires auprès des administrations et des personnes sans que puissent lui être opposées d'autres limitations que celles résultant du libre exercice de l'activité des partis et groupements politiques visés à l'article 4 de la Constitution " ;
Considérant qu'il est ainsi satisfait aux exigences de l'article 4 de la Constitution ;
Considérant, dès lors, que l'article 2 de la loi n'est pas contraire à la Constitution ;

Sur les dispositions du titre Ier de la loi relatives à la transparence et sur celles du titre IV relatives aux sanctions correspondantes :
Considérant que le titre Ier de la loi, dans ses articles 3 à 9, est consacré aux dispositions relatives à la transparence ;
que les articles 26 à 31 du titre IV relatif aux sanctions pénales tendent à assurer le respect de ces dispositions ;
Considérant que, loin de s'opposer à la liberté de la presse ou de la limiter, la mise en oeuvre de l'objectif de transparence financière tend à renforcer un exercice effectif de cette liberté ;
qu'en effet, en exigeant que soient connus du public les dirigeants réels des entreprises de presse, les conditions de financement des journaux, les transactions financières dont ceux-ci peuvent être l'objet, les intérêts de tous ordres qui peuvent s'y trouver engagés, le législateur met les lecteurs à même d'exercer leur choix de façon vraiment libre et l'opinion à même de porter un jugement éclairé sur les moyens d'information qui lui sont offerts par la presse écrite ;
Considérant que, sans contester dans son principe l'objectif de transparence, les auteurs des saisines soutiennent que certaines des dispositions susvisées ne sont pas conformes à la Constitution ;
En ce qui concerne les articles 3 et 26 :
Considérant que l'article 3 de la loi dispose :
"Il est interdit de prêter son nom, de quelque manière que ce soit, à toute personne qui possède ou contrôle une entreprise de presse" ;
que l'article 26 dispose :
"Quiconque aura prêté son nom en violation des dispositions de l'article 3 sera puni d'un emprisonnement de trois mois à un an et d'une amende de 6000 F à 200000 F. Les mêmes peines seront applicables à celui au profit de qui l'opération de prête-nom sera intervenue. Lorsque l'opération de prête-nom aura été faite au nom d'une personne morale, les peines seront appliquées à celui qui aura réalisé cette opération pour le compte de la personne morale" ;
Considérant que les députés auteurs de l'une des saisines font valoir que ni l'article 3 ni l'article 26 précités ne définissent les éléments constitutifs de l'infraction de prête-nom, notamment en ce qui concerne le domaine de l'interdiction, et sont ainsi contraires au principe de la légalité des délits et des peines proclamé par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ;
Considérant, d'une part, que les éléments constitutifs de l'infraction ressortent des termes mêmes de l'article 3 dont il reviendrait aux juridictions compétentes de faire application dans les espèces qui leur seraient soumises ;
que, d'autre part, il résulte nécessairement de la place de ces dispositions dans une loi tendant à assurer la transparence financière des entreprises de presse que l'interdiction de prête-nom visée par ces dispositions ne concerne, sans préjudice de semblable interdiction en d'autres matières, que les actes de prête-nom pouvant porter atteinte aux règles de transparence financière intéressant les entreprises de presse ;
qu'ainsi les articles 3 et 26 de la loi ne sont pas contraires à la Constitution ;
En ce qui concerne les articles 4 et 27 :
Considérant que l'article 4 de la loi impose la forme nominative aux actions représentant le capital social d'une entreprise de presse et à celles d'une société qui détient directement ou indirectement 20 p 100 au moins du capital social d'une entreprise de presse ou des droits de vote dans cette entreprise ;
qu'il précise :
"Les dirigeants d'une société qui constatent l'une des situations visées au premier alinéa du présent article doivent publier un mois au plus après cette constatation, dans un journal d'annonces légales, un avis aux porteurs d'actions les invitant à mettre leurs titres sous la forme nominative" ;
que l'article 27 punit de peines correctionnelles "les dirigeants de droit ou de fait d'une société par actions qui, en violation des dispositions de l'article 4, auront émis des actions au porteur ou n'auront pas fait toute diligence pour faire mettre les actions au porteur sous la forme nominative dans les délais prévus à cet article" ;

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