Jurisprudence : Cass. civ. 1, 04-11-2011, n° 10-20.809, F-D, Cassation

Cass. civ. 1, 04-11-2011, n° 10-20.809, F-D, Cassation

A8803HZ3

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Cass. civ. 1, 04-11-2011, n° 10-20.809, F-D, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/5630002-cass-civ-1-04112011-n-1020809-fd-cassation
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CIV. 1 MF
COUR DE CASSATION
Audience publique du 4 novembre 2011
Cassation
M. CHARRUAULT, président
Arrêt no 1080 F-D
Pourvoi no A 10-20.809
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant

Statuant sur le pourvoi formé par
1o/ la société Allianz, société anonyme, dont le siège est Paris, antérieurement dénommée société Assurances générales de France (AGF),
2o/ la Communauté de communes du Queyras, dont le siège est Aiguilles, venant aux droits de la Régie Queyras Ski,
contre l'arrêt rendu le 18 mai 2010 par la cour d'appel de Grenoble (2e chambre civile), dans le litige les opposant
1o/ à Mme Caroline X veuve X, 2o/ à M. Julien X,
3o/ à M. Florian X,
domiciliés Istres,
4o/ à la Caisse des dépots et consignations, dont le siège est Bordeaux,
5o/ à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) des Bouches-du-Rhône, dont le siège est Marseille,
défendeurs à la cassation ;
Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 4 octobre 2011, où étaient présents M. Charruault, président, M. Jessel, conseiller référendaire rapporteur, M. Bargue, conseiller, Mme Collet, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Jessel, conseiller référendaire, les observations de la SCP Baraduc et Duhamel, avocat de la société Allianz et de la Communauté de communes du Queyras, de la SCP Odent et Poulet, avocat de la Caisse des dépots et consignations, de Me Spinosi, avocat des consorts X, l'avis écrit de M. Sarcelet, avocat général, tel qu'il figure sur son rôle d'audience, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à la suite du décès de Marc X dans un accident de ski, son épouse et ses deux enfants ont engagé une action en responsabilité et en garantie contre la régie Queyras ski et son assureur, la société AGF, aux droits desquelles se présentent, respectivement, la communauté de communes du Queyras et la société Allianz ; que la Caisse des dépôts et consignations (la CDC), gestionnaire de la caisse de retraite dont relevait le défunt, est intervenue à l'instance pour obtenir le remboursement du capital représentatif de la pension de réversion servie à la veuve et des rentes d'orphelins ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche
Attendu que la communauté de communes du Queyras et la société Allianz reprochent à l'arrêt de les condamner à indemniser les dommages économiques et moraux subis par les consorts X et à rembourser la CDC de ses débours, alors, selon le moyen, que l'exploitant d'un domaine skiable est tenu d'une obligation de sécurité de moyens ; qu'en reprochant un manquement à son obligation de sécurité à la régie Queyras ski, exploitante de la station de Molines-en-Queyras, faute d'avoir apposé une protection sur un regard en béton de canon à neige se trouvant à 2,50 mètres hors de la piste et ne s'élevant pas à plus de 20 centimètres de hauteur, sans tenir compte de la participation active des usagers et tandis que cet exploitant s'était conformé à ses obligations réglementaires en signalant la présence de ce regard en béton et en avertissant les skieurs des dangers résultant de l'absence d'enneigement des abords de la piste pour les inviter à modérer leur allure, la cour d'appel a en réalité fait peser sur la régie Queyras ski une obligation de résultat, en violation de l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel a constaté que le socle en béton du canon à neige percuté par le skieur, situé à 2,50 mètres seulement de la piste skiable et d'une hauteur de 20 cm, que ne couvrait pas le manteau neigeux en raison des conditions météorologiques particulières, était simplement signalé par trois jalons bicolores sans autre dispositif de sécurité et de protection ; qu'elle a pu en déduire que l'exploitant de la piste avait insuffisamment rempli l'obligation de sécurité de moyens qui pesait sur lui, caractérisant ainsi une faute à son encontre ; que le grief est mal fondé ;

Mais sur la seconde branche du moyen
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que la cour d'appel, qui a retenu l'entière responsabilité de l'exploitant de la piste skiable sans répondre aux conclusions invoquant le comportement fautif du skieur comme cause de l'accident, n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 mai 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Laisse à chacune des parties la charge des dépens qu'elle a exposés ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre novembre deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat aux Conseils pour la société Allianz et la communauté de communes du Queyras
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré la régie Queyras ski responsable de l'accident mortel de monsieur X et d'avoir condamné en conséquence in solidum la Communauté de communes du Queyras, venant aux droits de la régie Queyras Ski, et la société Allianz, antérieurement dénommée AGF, à payer la somme de 72.413,19 euros à madame X, la somme de 20.000 euros à madame X ès qualités de représentante légale de Florian Tardieu, la somme de 21.363,13 euros à monsieur Julien WX et la somme de 39.973,10 euros à la Caisse des dépôts et consignations ;
AUX MOTIFS QU' il ressort du rapport d'enquête de gendarmerie que le 2 février 2002, monsieur WX skiait sur le côté gauche de la piste Les Jockeys de la station de Molines-en-Queyras, cette piste seule ouverte avec une deuxième piste, bénéficiant d'un enneigement de culture et les abords des pistes étant totalement dépourvus d'enneigement ; que monsieur WX est sorti de la piste a été retrouvé à proximité immédiate d'une bouche de canon de neige en béton se situant à 2,50 mètres du bord de piste ; que la boîte crânienne de monsieur WX a explosé et s'est vidée de son contenu, des traces de sang, des morceaux de crâne et de l'encéphale jonchant le rebord situé en amont du socle du canon à neige ; que près du canon se trouvait trois jalons en bois de couleurs noire et jaune dont l'un est brisé, de même qu'un autre jalon destiné à marquer le bord de piste est couché sur le sol à proximité du regard ; que l'attestation de madame Martine WX ne saurait être retenue en ce qu'elle indique qu'il lui semble que la victime avait percuté des arbres avant de toucher le socle en béton ; que ce témoignage dubitatif n'est corroboré par aucun élément confirmant la percussion par monsieur WX d'arbres alors que les divers éléments susvisés établissent que le regard de la bouche de canon a joué un rôle causal dans le décès de la victime ; que la régie Queyras ski est débitrice d'une obligation de sécurité à l'égard des usagers de ses pistes ; que le regard en béton du canon à neige sur lequel monsieur WX a fini sa course, est situé à 2,50 mètres de la piste, qu'il est d'une hauteur de 20 centimètres et d'un diamètre de 1,20 mètres ; que le jour de l'accident mortel, les abords de la piste étaient totalement déneigés de sorte que le socle du canon à neige n'était plus protégé par une couverture neigeuse de nature à amortir les chutes ; que ce regard en béton présentait de ce fait, un aspect contondant qui a été de nature à faire exploser la boîte crânienne de la victime ; que compte tenu de la possibilité pour un skieur de franchir une distance importante en raison de la vitesse prise par ce sport de glisse, ce canon à neige se trouvait à une distance très proche de la bordure des pistes, d'autant plus que la dameuse repoussait de la neige à proximité de la bouche d'alimentation ; que dès lors, eu égard aux conditions météorologiques qui ont entraîné la mise à nu de l'ouvrage litigieux et de la proximité de la piste, la régie qui avait simplement signalé le canon à neige pour 3 jalons bicolores entrecroisés, a insuffisamment rempli l'obligation de sécurité dont elle est débitrice et doit indemniser l'entier préjudice des consorts WX ;
ALORS QUE, D'UNE PART, l'exploitant d'un domaine skiable est tenu d'une obligation de sécurité de moyens ; qu'en reprochant un manquement à son obligation de sécurité à la régie Queyras ski, exploitante de la station de Molines-en-Queyras, faute d'avoir apposé une protection sur un regard en béton de canon à neige se trouvant à 2,50 mètres hors de la piste et ne s'élevant pas à plus de 20 centimètres de hauteur, sans tenir compte de la participation active des usagers et tandis que cet exploitant s'était conformé à ses obligations règlementaires en signalant la présence de ce regard en béton et en avertissant les skieurs des dangers résultant de l'absence d'enneigement des abords de la piste pour les inviter à modérer leur allure, la cour d'appel a en réalité fait peser sur la régie Queyras ski une obligation de résultat, en violation de l'article 1147 du Code civil ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, le débiteur d'une obligation de sécurité de moyens peut s'exonérer, fût-ce partiellement, de sa responsabilité du fait de la victime qui est à l'origine de son propre dommage ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher, comme elle y était invitée (concl. du 6 avr. 2009, p. 6), si monsieur WX avait eu un comportement fautif à l'origine de l'accident dont il avait été victime, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil.

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