Lexbase Fiscal n°859 du 25 mars 2021 : Finances publiques

[Chronique] Chronique sur l'Union économique et monétaire et les finances européennes

Lecture: 26 min

N6867BYY

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

[Chronique] Chronique sur l'Union économique et monétaire et les finances européennes. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/66003977-chronique-chronique-sur-lunion-economique-et-monetaire-et-les-finances-europeennes
Copier

par Louise Fromont, Chercheuse postdoctorale et chargée d’enseignement à l’Université Libre de Bruxelles

le 21 Mars 2021


Mots-clés : finances européennes • budget européen • plan de relance économique • Covid-19

Dans le cadre de cette chronique consacrée à l’Union économique et monétaire (UEM) et aux finances européennes, nous avons choisi de nous limiter aux aspects législatifs liés au cadre financier pluriannuel et au plan de relance économique mis en place par l’Union à la suite de la pandémie de la Covid-19.


 

Bien d’autres aspects auraient mérité notre attention, que ce soit la signature, le 27 janvier 2021, du traité modifiant le Traité établissant le Mécanisme européen de stabilité et le Fonds de résolution unique [1] ou certaines décisions rendues par la Cour de justice de l’Union européenne, comme l’arrêt « Conseil c. Chrysostomides e.a. » du 16 décembre 2020 concernant le programme d’assistance financière chypriote [2] ou les quatre premiers arrêts rendus par le Tribunal en matière de sanctions pécuniaires infligées par la Banque centrale européenne au titre de la surveillance prudentielle des établissements de crédit [3].

Ce choix s’explique principalement pour deux raisons. La première est que le cadre financier pluriannuel 2021-2027 (CFP) et le plan de relance européen impliquent un changement de paradigme au sein de l’UEM. Ainsi que l’a souligné le Professeur Francesco Martucci, alors que l’UEM accordait à la discipline budgétaire une place prépondérante, le CFP et le plan de relance reposent sur des investissements massifs de l’Union européenne [4]. En d’autres termes, pour la première fois, le budget de l’Union et les emprunts européens sont utilisés comme des instruments de politique économique. Deuxièmement, le CFP 2021-2027 et le plan de relance ont des répercussions importantes sur l’un des instruments phares de l’UEM, le Semestre européen, en rendant de facto, celui-ci contraignant.

La chronique analysera successivement le cadre financier pluriannuel pour la période 2021-2027 (A), l’instrument pour la relance de l’Union européenne (B), les ressources propres de l’Union (C) et la protection des intérêts financiers de l’Union (D).

A - Le cadre financier pluriannuel pour la période 2021-2027

Après qu’il ait été approuvé à une très large majorité par le Parlement européen le 16 décembre 2020, le CFP 2021-2027 a été adopté par le Conseil le 17 décembre 2020 [5] et est applicable depuis le 1er janvier 2021. Il a fait l’objet d’intenses négociations, marquées ces derniers mois par les conséquences économiques de la pandémie de la Covid-19, par l’opposition des États « frugaux » – Autriche, Danemark, Suède et Pays-Bas – à un assouplissement de la discipline budgétaire ainsi que par le refus de la Pologne et de la Hongrie de lier le budget européen au respect de l’État de droit.

Le CFP 2021-2027 prévoit un budget de 1 074,3 milliards d’euros pour l’Union à 27 au prix de 2018. Durant les négociations entre le Parlement européen et le Conseil, 16 milliards ont été ajoutés par rapport au montant sur lequel le Conseil européen s’était accordé en juillet 2020 [6]. Le CFP prévoit que cette augmentation sera financée grâce aux recettes provenant des amendes imposées en vertu des Règlements n° 1/2003 et n° 139/2004, c’est-à-dire en cas de non-respect des règles de concurrence, que jusqu’à présent, l’Union rétrocédait aux États membres.

Le CFP alloue 132,8 milliards au marché unique, à l’innovation et au numérique, 377,8 milliards à la cohésion, à la résilience et aux valeurs, 356,4 milliards aux ressources naturelles et à l’environnement, 22,7 milliards à la migration et à la gestion des frontières, 13,2 milliards à la sécurité et la défense, 98,4 milliards à la politique de voisinage et au reste du monde et, enfin, 73,1 milliards à l’administration publique européenne (Annexe I). De nouveaux programmes voient le jour (comme l’UE pour la santé ou le programme pour une Europe numérique) tandis que d’autres sont renforcés (Horizon Europe, Erasmus +, etc.). En principe, conformément aux conclusions du Conseil européen du 21 juillet 2020, 30 % des dépenses de l’Union devront contribuer à la réalisation d’objectifs en matière de climat [7] et une attention particulière devrait être accordée à la biodiversité ainsi qu’à l’égalité hommes-femmes.

Le règlement établissant le CFP a, par ailleurs, précisé comment le CFP devra être adapté en cas de suspension des fonds de l’Union « dans le contexte des mesures liées à une bonne gouvernance économique ou à des mesures adoptées en vertu du règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au régime général de conditionnalité pour la protection du budget de l’Union ». En effet, lors du Conseil européen du 21 juillet, les chefs d’État et de gouvernement ont convenu d’introduire un régime général de conditionnalité afin de resserrer les liens entre les fonds européens, d’une part, et la gouvernance économique et les valeurs européennes, d’autre part. C’est ce régime de conditionnalité qui a, un temps, bloqué l’adoption du CFP et de l’instrument pour la relance, la Pologne et la Hongrie s’opposant au mécanisme conditionnant l’octroi de fonds européens au respect de l’État de droit. Finalement, la difficulté a été surmontée par le Conseil européen des 10 et 11 décembre 2020 par l’octroi de garanties aux deux États membres concernés – tels que le caractère subsidiaire du mécanisme (voy. infra)   [8].

L’article 6 du Règlement établissant le CFP prévoit ainsi que, en cas de suspension d’engagements budgétaires de l’Union en application des mesures liées à la gouvernance économique ou aux valeurs européennes, « les montants correspondant aux engagements suspendus sont transférés aux exercices suivants et les plafonds correspondants du CFP sont adaptés en conséquence » [9]. Il convient de noter qu’une telle disposition existait déjà dans le CFP 2014-2020 mais uniquement pour l’aspect lié aux mesures de bonne gouvernance économique [10].

Enfin, le CFP 2021-2027 tire également les conséquences du Brexit, en prévoyant une réserve d’ajustement pour aider les États membres et les secteurs les plus durement touchés par le retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne [11].

À la suite du CFP 2021-2027, le Conseil et le Parlement européen ont adopté le budget européen pour 2021. Ce dernier prévoit des crédits d’engagement et des crédits de paiement à hauteur respectivement de 164,3 milliards d’euros et de 166,1 milliards d’euros. Certains programmes ont été renforcés par rapport à la proposition initiale de la Commission, tels que l’Europe numérique (+ 25,7 millions d’euros) et le mécanisme pour l’interconnexion en Europe pour les infrastructures de transports (+ 60,3 millions d’euros). Un accord interinstitutionnel entre le Parlement européen, le Conseil et la Commission « sur la discipline budgétaire, la coopération en matière budgétaire et la bonne gestion financière, ainsi que sur de nouvelles ressources propres, comportant une feuille de route en vue de la mise en place de nouvelles ressources propres » [12] a également été conclu.

B - L’instrument de l’Union européenne pour la relance

Le CFP 2021-2027 est, en outre, assorti pour la première fois dans l’histoire de la construction européenne d’un instrument de l’Union européenne pour la relance, baptisé Next Generation EU. Proposé le 27 mai 2020 par la Commission européenne, le plan de relance a été créé par le Règlement 2020/2094 du Conseil du 14 décembre 2020 sur la base de l’article 122, §§ 1er et 2, TFUE [13]. Il consiste en un « programme de soutien économique et social exceptionnel et coordonné, dans un esprit de solidarité entre les États membres, en particulier envers les États membres qui ont été les plus durement touchés » [14] par la pandémie de la Covid-19. Il s’agit, en d’autres termes, d’un vaste dispositif d’investissements publics sous la forme de prêts et de subventions non remboursables destiné à « faire face aux conséquences économiques négatives de la crise liée à la COVID-19 ou aux besoins immédiats de financement visant à éviter la résurgence de cette crise » [15]. À cette fin, le Règlement 2020/2094 prévoit un financement à concurrence d’un montant de 750 milliards d’euros (aux prix de 2018) [16], dont 360 milliards d’euros à titre de prêts et 390 milliards d’euros à titre de de subventions. Le soutien accordé aux États membres est, cependant, limité dans le temps dans la mesure où il est destiné à réparer les conséquences économiques immédiates de la crise. En conséquence, les engagements juridiques au titre d’un programme financé par l’instrument pour la relance doivent être adoptés au plus tard pour le 31 décembre 2023 [17].

L’allocation des fonds de l’instrument pour la relance est répartie en trois grands piliers. Proposées par la Commission européenne, puis reprises par le Conseil européen, ces priorités apparaissent à l’article 2 du Règlement 2020/2094. Le premier pilier a pour but de stimuler l’investissement public ainsi que les réformes structurelles au niveau national. À cette fin, la grande partie du budget de l’instrument pour la relance (672,5 milliards d’euros sur 750) est consacrée à la Facilité pour la reprise et la résilience [18]. Cette dernière est établie par un règlement fondé sur l’article 175 TFUE, c’est-à-dire sur une disposition relevant de la politique de cohésion économique, sociale et territoriale. La facilité est, en outre, ancrée dans le Semestre européen mis en place au sein de l’UEM, à la suite de la crise des dettes souveraines, afin de coordonner les politiques économiques et sociales des États membres [19]. Cet ancrage emporte une double conséquence. D’une part, si les États membres souhaitent bénéficier de la facilité, ils devront établir un « plan national pour la reprise et la résilience » en vue de décrire les investissements et les réformes qu’ils comptent mettre en œuvre pour la période 2021-2023 [20]. Ces plans devront refléter les recommandations spécifiques qui leur ont été adressées par le Conseil dans le cadre du Semestre [21]. Lors de leur établissement, les États membres devront, en outre, être attentifs au fait que 37 % des dépenses envisagées doivent porter sur des questions liées au climat ; 20 % sur questions touchant au numérique [22]. D’autre part, le non-respect des exigences liées à la gouvernance économique européenne peut conduire à une suspension des versements au titre de la Facilité. En conditionnant le bénéfice de la facilité à la mise en œuvre des recommandations spécifiques, le plan de relance rend le Semestre européen de facto contraignant alors qu’il s’agissait initialement d’un instrument de coordination des politiques économiques et sociales nationales. Élément inédit, le Conseil européen a prévu d’exercer un contrôle intergouvernemental dans le cadre de la facilité : « si, exceptionnellement, un ou plusieurs États membres considèrent qu’il existe des écarts importants par rapport au respect satisfaisant des objectifs intermédiaires et finaux […], ils peuvent demander au président du Conseil européen » [23] de saisir cette institution de la question. Aussi longtemps que cette procédure n’a pas abouti, la Commission ne pourra pas procéder à une évaluation positive des engagements de l’État concerné [24].  Ce premier pilier intègre également un soutien à la reprise en faveur de la cohésion et des territoires de l’Europe (REACT-EU), à hauteur de 47,5 milliards au prix de 2018 d’euros [25].

Le deuxième pilier concerne la stimulation de l’investissement privé et le soutien aux entreprises en difficultés à concurrence de 5,6 milliards d’euros. Il recourt au programme InvestEU, via une facilité d’investissement stratégique.

Le troisième et dernier pilier a pour but d’améliorer, en cas de futures crises, la réaction de l’Union en matière de protection civile et de recherche dans les domaines de la santé, de la résilience et des transitions écologique et numérique [26]. Il est basé sur les programmes RescEU (1,9 milliards d’euros) et Horizon Europe (5 milliards d’euros) [27].

Par ailleurs, l’instrument de l’Union européenne pour la relance s’ajoute aux mesures mises en œuvre par les institutions européennes aux mois de mars et d’avril 2020 en vue d’atténuer à court terme les conséquences économiques de la pandémie. Le 9 avril 2020 [28], un accord avait été dégagé au sein de l’Eurogroupe sur la création d’un plan de « riposte économique globale face à la pandémie de Covid-19 »  [29], qui avait été approuvé par le Conseil européen le 23 avril [30]. Ce plan de riposte a abouti, entre autres, à la création d’un mécanisme de « soutien temporaire à l’atténuation des risques de chômage en situation d’urgence » (Support to mitigate Unemployment Risks in an Emergency ou SURE) [31] doté d’un financement de 100 milliards d’euros ainsi que la mise en place d’un Fonds de garantie paneuropéen par la Banque européenne d’investissement. L’Eurogroupe s’était également accordé sur la mobilisation du Mécanisme européen de stabilité à l’égard des États membres de la zone euro (à hauteur de 240 milliards d’euros) et du Mécanisme de soutien financier à moyen terme des balances des paiements [32] pour les États non membres de la zone euro (à hauteur de 60 milliards d’euros). La Commission a également été autorisée à utiliser les fonds structurels et d’investissement européens (FSIE) de manière flexible [33]. En amont du plan de « riposte », la Commission européenne avait décidé de faire preuve de souplesse dans l’application du Pacte de stabilité et de croissance en activant la clause dérogatoire. La Banque centrale européenne avait, quant à elle, lancé un programme temporaire d’achats d’urgence (ou PEPP) de 750 milliards d’euros [34].

C - Les ressources propres de l’Union

Le CFP 2021-2027 et l’instrument pour la relance s’accompagnent d’une réforme du système des ressources propres de l’Union européenne. La décision 2014/335/UE est abrogée et remplacée par la décision 2020/2053 du Conseil du 14 décembre 2020 [35]. Cette dernière entrera en vigueur une fois que tous les États membres l’auront ratifiée conformément à leur procédure constitutionnelle respective. Elle est toutefois applicable depuis le 1er janvier 2021 [36]. Plusieurs évolutions importantes sont introduites.

Premièrement, la décision 2020/2053 règle l’épineuse question du financement du plan de relance.  À cet égard, la crise de la Covid-19 a vu resurgir la débat autour des « eurobonds », renommés pour l’occasion « coronabonds », c’est-à-dire d’une forme de mutualisation de la dette publique. Ces expressions peuvent recouvrir une diversité d’instruments. On distingue, en règle générale, l’émission d’une dette commune par les États membres, d’une part, et l’émission de titres de la dette par l’Union européenne, d’autre part. C’est cette dernière option qui a été retenue pour financer l’instrument pour la relance. Ce type d’opérations n’est pas inhabituel et a, notamment, été utilisée par l’Union européenne lors de la crise des dettes souveraines. L’un des avantages est que cette modalité de financement permet de respecter l’article 310 TFUE, selon lequel « le budget doit être équilibré en recettes et en dépenses », étant donné qu’elle est réalisée en dehors du budget de l’Union.

En conséquence, la décision 2020/2053 prévoit que la Commission européenne pourra, à titre exceptionnel, emprunter temporairement sur les marchés financiers les 750 milliards d’euros (au prix de 2018) nécessaires pour financer la relance économique européenne. Elle précise que 360 milliards seront utilisés pour fournir des prêts et 390 milliards pour des subventions [37] et que l’habilitation donnée à la Commission constitue une exception à la règle selon laquelle les fonds empruntés sur les marchés de capitaux par l’Union ne peuvent financer des dépenses opérationnelles [38]. Dans la mesure où le plan de relance est destiné à financer des mesures pour faire face aux conséquences économiques de la pandémie de la Covid-19, ses activités devront se dérouler sur une période relativement courte. Dès lors, les emprunts destinés à financer le plan de relance cesseront à la fin de l’année 2026. Par la suite, les seules opérations d’emprunts autorisées sont celles destinées à refinancer la dette afin d’en assurer une gestion efficace [39].

Deuxièmement, la décision 2020/2053 prévoit que « le remboursement du principal des fonds empruntés […] ainsi que les intérêts exigibles correspondants, sont à la charge du budget de l’Union » [40] et qu’il devra être programmé, conformément au principe de bonne gestion financière, de manière à garantir la réduction constante et prévisible des engagements. En tout état de cause, les remboursements du principal des fonds empruntés devra débuter avant la fin de la période couverte par le CFP (soit 2021-2027) tandis que l’intégralité des engagements résultant des emprunts effectués sur les marchés de capitaux devront l’être pour le 31 décembre 2058 au plus tard [41].

Afin de de couvrir les engagements de l’Union découlant de ses emprunts, la décision 2020/2053 modifie le plafonds des ressources propres et en prévoit de nouvelles. Ce deux modifications permettent à l’Union de surmonter sa capacité d’emprunt limitée, due à la faiblesse structurelle de son budget, et lui garantissent de pouvoir emprunter sur les marchés à des taux attractifs. D’une part, la décision 2020/2053 augmente, de façon permanente, les plafonds des ressources propres. Ainsi, les montants totaux des ressources propres attribués à l’Union pour couvrir les crédits de paiement ainsi que les crédits d’engagements augmentent respectivement de 1,23 % à 1,4 % et de 1,29 % à 1,46 % de la somme des revenus nationaux bruts de tous les États membres [42]. En outre, ces deux plafonds sont relevés de 0,6 % chacun afin de couvrir les engagements de l’Union résultant du plan de relance. Ce relèvement est temporaire et ne peut couvrir aucun autre engagement de l’Union. Il devrait, en outre, prendre fin une fois que l’ensemble des fonds empruntés auront été remboursés et que tous les passifs liés aux prêts soient éteints, soit au plus tard le 31 décembre 2058 [43].

D’autre part, outre la mise en place d’un système simplifié de ressources propres provenant de la TVA [44], la décision 2020/2053 introduit une nouvelle ressource propre fondée sur des contributions nationales proportionnelles à la quantité de déchets d’emballages en plastique non recyclés dans chaque État membre [45]. L’objectif est d’inciter à réduire la consommation de plastiques à usage unique, de favoriser le recyclage et de stimuler l’économie circulaire [46]. Dans le futur, de nouvelles ressources propres devraient être créées. La Commission est, en effet, invitée à présenter, au cours des six premiers fois de l’année 2021, des propositions relatives à un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières et à une redevance numérique de manière à les introduire au plus tard le 1er janvier 2023. Par la suite, il est également demandé à la Commission de proposer une révision du système d’échange de quotas d’émission, éventuellement élargi à l’aviation et au secteur maritime. Au cours de la période 2021-2027, d’autres ressources propres pourraient être créées, notamment sur les transactions financières [47]. Il est, en effet, prévu que, si un accord sur la taxe sur les transactions financières n’est pas trouvé dans le cadre de la coopération renforcée avant la fin de l’année 2022, la Commission proposera au plus tard en juin 2024 une nouvelle ressource propre, fondée sur une taxe sur les transactions financières afin que cette dernière puisse être introduite au 1er janvier 2026 [48].

Troisièmement, les États membres ont obtenu un rabais de leur contribution au budget de l’Union : ils peuvent désormais retenir, à titre de frais de perception, 25 % des montants des ressources propres qu’ils ont perçus[49], contre 20 % dans la précédente décision relative aux ressources propres. En outre, plusieurs États membres bénéficient d’une correction forfaitaire de leur contribution annuelle fondée sur le RNB pour la période 2021-2027 : l’Autriche (565 millions d’euros), le Danemark (377 millions d’euros), les Pays-Bas (1 921 millions d’euros), la Suède (1 069 millions d’euros) ainsi que, dans le cadre du soutien pour la reprise et la résilience, l’Allemagne (3 671 millions d’euros) [50].

D - La protection du budget de l’Union européenne

Le 16 décembre 2020, le Parlement européen et le Conseil ont adopté le Règlement 2020/2092 relatif à un régime général de conditionnalité pour la protection du budget de l’Union [51]. Ce règlement considère que les violations des principes de l’État de droit par un État membre sont susceptibles de nuire gravement aux intérêts financiers de l’Union, l’État de droit étant une condition essentielle de la bonne gestion financière du budget européen [52].

Le Règlement 2020/2092 établit, par conséquent, une procédure qui permet au Conseil, sur proposition de la Commission, d’adopter des mesures appropriées – sous la forme d’une suspension des engagements de l’Union vis-à-vis de l’État membre concerné – lorsque des violations aux principes de l’État de droit sont établies. Ces violations sont identifiées à l’article 3 du règlement : la mise en péril de l’indépendance du pouvoir judiciaire, le fait de ne pas prévenir, corriger ou sanctionner les décisions arbitraires ou illégales des autorités publiques, la retenue de ressources financières et humaines affectant leur bon fonctionnement, le fait de ne pas veiller à l’absence de conflits d’intérêts ou encore la limitation de la disponibilité et de l’effectivité des voies de recours et la limitation de l’effectivité des enquêtes, des poursuites ou des sanctions relatives à des violations du droit. Selon le Conseil européen, ces facteurs déclencheurs doivent être considérés comme une liste fermée. En outre, le règlement ne concerneraient pas les défaillances généralisées de l’État de droit [53]. Le Conseil européen a également demandé à la Commission d’adopter des orientations sur la manière dont le règlement sera appliqué et qu’en cas de recours en annulation introduit contre celui-ci, les orientations ne seraient définitivement adoptées qu’après l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne [54]. Lors de l’adoption du règlement 2020/2092 par le Conseil, la Commission a joint au procès-verbal une déclaration mentionnant son attachement aux principes dégagés par le Conseil européen concernant le mécanisme de protection du budget de l’Union.

 

[1] Statement by the Eurogroup President, Paschal Donohoe, on the signature of the ESM Treaty and the Single Resolution Fund Amending Agreements, 27 janvier 2021.

[2] CJUE, 16 décembre 2020, affaires jointes C-597/18 P, C-598/18 P, C-603/18 P et C-604/18 P, Conseil de l'Union européenne c/ Dr. K. Chrysostomides & Co. LLC (N° Lexbase : A853539Y).

[3] Trib. UE, 8 juillet 2020, aff. T-203/18, VQ c/ Banque centrale européenne (BCE) (N° Lexbase : A52753RS) ; Trib. UE, 8 juillet 2020, aff. T-576/18, Crédit agricole SA c/ Banque centrale européenne (BCE) (N° Lexbase : A52703RM) ; Trib. UE, 8 juillet 2020, Crédit agricole Corporate and Investment Bank c/ Banque centrale européenne (BCE) (N° Lexbase : A52713RN) ; Trib. UE, 8 juillet 2020, aff. T-578/18, CA Consumer Finance c/ Banque centrale européenne (BCE) (N° Lexbase : A52723RP).

[4] F. Martucci,  « Ce n’est pas de la dette, c’est de l’investissement » : des coronabonds aux obligations du plan de relance, R.A.E., 2020/2, pp. 299 à 313.

[5] Règlement UE n° 2020/2093, du Conseil du 17 décembre 2020, fixant le cadre financier pluriannuel pour les années 2021 à 2027 (N° Lexbase : L2301LZA).

[6] Conclusions du Conseil européen du 21 juillet 2020, EUCO 10/20 – CO EUR 8 CONCL 4.

[7] Ibid.

[8] Conclusions du Conseil européen des 10 et 11 décembre, EUCO 22/20.

[9] Règlement UE n° 2020/2093, du Conseil du 17 décembre 2020, art. 6, 1er, op. cit.

[10] Règlement UE n° 1311/2013, du Conseil du 2 décembre 2013, fixant le cadre financier pluriannuel pour la période 2014-2020, art. 8 (N° Lexbase : L7582IZT).

[11]Règlement UE n° 2020/2093 du Conseil du 17 décembre 2020, art. 10, op. cit. ; proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant la réserve d’ajustement au Brexit, COM(2020) 854 final – 2020/0380 (COD), Bruxelles, 25 décembre 2020.

[12] J.O. L 433 I du 22 décembre 2020, p. 28.

[13] Règlement UE n° 2020/2094, du Conseil du 14 décembre 2020, établissant un instrument de l’Union européenne pour la relance en vue de soutenir la reprise à la suite de la crise liée à la Covid-19 (N° Lexbase : L2302LZB).

[14] Ibid., considérant n° 5.

[15] Ibid., considérant n° 6.

[16] Ibid., article 2, § 1er, al. 1er.

[17] Ibid., article 3, § 6.

[18] Proposition de Règlement du Parlement européen et du Conseil établissant une facilité pour la reprise et la résilience, COM(2020) 408 final – 2020/0104 (COD), Bruxelles, 28 mai 2020.

[19] À cet égard, le programme d’appui à la réforme structurelle (PARS), créé durant la crise des dettes souveraines, est remplacé par un instrument d’appui technique afin de fournir une expertise aux États membres qui le souhaitent dans le mise en œuvre de leurs réformes.

[20] Conclusions du Conseil européen du 21 juillet 2020, op. cit., point A18.

[21] Ibid., point A19.

[22] Communication de la Commission, « Stratégie annuelle 2021 pour une croissance durable », COM(2020) 575 final, Bruxelles, le 17 septembre 2020.

[23] Conclusions du Conseil européen du 21 juillet 2020, op. cit., point A19.

[24] Ibid.

[25] Règlement (UE) n° 2020/2221, du Parlement européen et du Conseil du 23 décembre 2020, modifiant le Règlement UE n° 1303/2013 en ce qui concerne des ressources supplémentaires et des modalités d’application afin de fournir un soutien pour favoriser la réparation des dommages à la suite de la crise engendrée par la pandémie de COVID-19 et de ses conséquences sociales et pour préparer une reprise écologique, numérique et résiliente de l’économie (N° Lexbase : L2959LZM).

[26] Communication de la Commission, « Le budget de l’Union : moteur du plan de relance pour l’Europe », COM(2020) 442 final, Bruxelles, 27 mai 2020, p. 10.

[27] Conclusions du Conseil européen du 21 juillet 2020, op. cit., point A14.

[28] Voy. Report by the Eurogroup, in inclusive format, on the comprehensive economic policy response to the COVID-19 pandemic, Bruxelles, 9 avril 2020, annexé à la lettre de synthèse du président de l’Eurogroupe du 17 avril 2020.

[29] Eurogroupe, « Rapport sur la riposte économique globale face à la pandémie de COVID-19 », Communiqué de presse, 9 avril 2020.

[30] Conclusions du président du Conseil européen faisant suite à la vidéoconférence tenue avec les membres du Conseil européen, 23 avril 2020.

[31] Règlement UE n° 2020/672, du Conseil du 19 mai 2020, portant création d’un instrument européen de soutien temporaire à l’atténuation des risques de chômage en situation d’urgence (SURE) engendrée par la propagation de la COVID-19 (N° Lexbase : L1601LXL).

[32] Règlement CE n° 332/2002, du Conseil du 18 février 2002, établissant un mécanisme de soutien financier à moyen terme des balances des paiements des États membres (N° Lexbase : L3643A3C).

[33] Règlement UE n° 2020/558, du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2020, modifiant les règlements (UE) n° 1301/2013 et (UE) n° 1303/2013 en ce qui concerne les mesures spécifiques visant à offrir une flexibilité exceptionnelle pour l’utilisation des Fonds structurels et d’investissement européens en réaction à la propagation de la COVID-19 (N° Lexbase : L7356LWD).

[34] Décision UE n° 2020/440 de la Banque centrale européenne du 24 mars 2020 relative à un programme d’achats d’urgence face à la pandémie.

[35] Décision UE n° 2020/2053 du Conseil du 14 décembre 2020 relative au système de ressources propres de l’Union européenne et abrogeant la décision 2014/335/UE.

[36] Ibid., article 12.

[37] Ibid., article 5, §1er.

[38] Ibid., articles 4 et 5.

[39] Ibid., article 5, § 1er, al. 3, considérant n° 18.

[40] Ibid., article 5, § 2.

[41] Ibid., article 5, § 2.

[42] Ibid., article 3, §§ 1er et 2.

[43] Ibid., article 6.

[44] Voy. Proposition de Règlement du Conseil modifiant le Règlement CEE n° 1533/89 du 19 mai 1989 concernant le régime uniforme définitif de perception des ressources propres provenant de la taxe sur la valeur ajoutée, COM(2018) 328.

[45] Article 2, § 1er, c, Décision UE n° 2020/2053 du Conseil du 14 décembre 2020, op. cit.

[46] Ibid., considérant n° 7.

[47] Ibid., considérant n° 8.

[48] Voy. également déclarations de la de la Commission sur la mise en place d’une ressource propre fondée sur une redevance numérique et sur la mise en place d’une ressource propre fondée sur la taxe sur les transactions financières annexées à la Résolution législative du Parlement européen du 16 décembre 2020 sur le projet de règlement du Conseil fixant le cadre financier pluriannuel pour la période 2021-2027, P9_TA-PROV(2020)0357.

[49] Considérant n° 10 et article 9, 2, Décision (UE, Euratom) 2020/2053 du Conseil du 14 décembre 2020, op. cit.

[50] Ibid., article 2, § 4.

[51] Règlement UE n° 2020/2092, du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2020, relatif à un régime général de conditionnalité pour la protection du budget de l’Union (N° Lexbase : L2300LZ9).

[52] Ibid., considérants n° 7 et n° 15.

[53] Point 2, f, des conclusions du Conseil européen des 10 et 11 décembre 2020, op. cit.

[54] Ibid., point 2, c.

newsid:476867

Cookies juridiques

Considérant en premier lieu que le site requiert le consentement de l'utilisateur pour l'usage des cookies; Considérant en second lieu qu'une navigation sans cookies, c'est comme naviguer sans boussole; Considérant enfin que lesdits cookies n'ont d'autre utilité que l'optimisation de votre expérience en ligne; Par ces motifs, la Cour vous invite à les autoriser pour votre propre confort en ligne.

En savoir plus