Le 17 février 2014, le Sénat a adopté, en première lecture, une
proposition de loi déjà votée par les députés, qui vise à appliquer le taux de TVA de la presse écrite (2,1 %) à la presse numérique, normalement soumise au taux normal de 20 %. Sur les 650 services en ligne dénombrés, seuls ceux qui sont partiellement ou intégralement payants sont concernés. L'entrée en vigueur de cette loi, fixée au 1er février 2014, s'opèrera dans un contexte de colère des éditeurs numériques qui se sont, d'ailleurs, regroupés autour du Syndicat de la presse indépendante d'information en ligne, et ont décidé d'appliquer le taux super réduit de la TVA, dans une dynamique de résistance passive (voir le
manifeste du Syndicat). Plusieurs redressements ont récemment eu lieu (subis notamment par Mediapart, Indigo Publications, mais aussi des éditions plus locales), donnant d'ailleurs naissance à une autre proposition, celle d'amnistier les contrevenants ainsi sanctionnés (rejetée par Aurélie Filippetti, sous prétexte du principe de non-rétroactivité de la loi fiscale). Toutefois, il convient de minimiser la victoire remportée par la presse en ligne ; en effet, et tout d'abord, la loi n'a pas encore été définitivement votée, et n'a pas encore passé le filtre du Conseil constitutionnel, même si ce dernier ne devrait pas s'opposer au texte. Ensuite, et là est le véritable enjeu de la proposition de loi, l'Union européenne ne permet pas l'application d'un taux de TVA différent du taux normal à la presse en ligne, tout comme elle le réfute pour les livres numériques (pour en savoir plus sur les différences de traitement entre production papier et production en ligne, lire
Application différenciée des taux de TVA en fonction des supports d'information : pourquoi le numérique est-il sanctionné ? - Questions à Odile Courjon, Associée, Taj, Lexbase Hebdo n° 555 du 22 janvier 2014 - édition fiscale
N° Lexbase : N0320BUE). La France est d'ailleurs sous le coup d'une procédure d'infraction initiée par la Commission européenne (lire
N° Lexbase : N5961BTX), qui attaque également le Luxembourg pour les mêmes faits. Malgré les promesses du Gouvernement français de plaider la cause des éditeurs numériques à Bruxelles (lire
N° Lexbase : N0138BUN), la Commission ne validera certainement pas une telle loi, alors qu'elle mène une réflexion sur l'application des taux réduits en Union européenne (lire
N° Lexbase : N3888BT8). Les pouvoirs publics calment donc le secteur de la presse numérique par ce texte, dont ils savent pourtant que la durée de vie est très limitée. A noter que l'administration fiscale, dans une
instruction du 30 janvier 2014, applicable à compter du 1er février 2014 également, a anticipé sur le vote de la loi.
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