Le Quotidien du 17 novembre 2020 : Construction

[Brèves] Des conditions de la subrogation de l’assureur dommages-ouvrage

Réf. : Cass. civ. 3, 5 novembre 2020, n° 19-18.284, FS-P+B+I (N° Lexbase : A521533K)

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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, Rome Associés, Chargée d’enseignements à l’UPEC et Paris Saclay, Responsable de la Commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats

le 12 Novembre 2020

►L’assureur dommages-ouvrage qui a indemnisé le maître d’ouvrage est subrogé dans ses droits ;
►il peut donc exercer son action à l’encontre des constructeurs dans le délai d’épreuve décennal ; ce sous réserve d’un paiement effectif de l’indemnité au maître d’ouvrage.

L’assuré ne peut logiquement pas cumuler les actions ni les indemnités. Autrement dit, il ne peut percevoir ET l’indemnité de son assureur ET celle due par le constructeur responsable du dommage qu’il a subi. Pour cette raison, l’assureur qui a payé l’indemnité est subrogé dans les droits de son assuré. Cette subrogation peut être légale, sur le fondement de l’article L. 121-12 du Code des assurances (N° Lexbase : L0088AAI), ou conventionnelle. L’assuré, une fois indemnisé, n’a plus qualité pour agir contre le responsable, sauf convention contraire ou pour un préjudice non-indemnisé par l’assureur (pour exemple, Cass. com., 1er décembre 2009, n° 08-20.656, FS-P+B+R N° Lexbase : A3453EPL).

La subrogation légale de l’article L. 121-12 du Code des assurances, visa de la décision rapportée, exige, toutefois, que soit rapportée la preuve d’un paiement effectif de l’indemnité à l’assuré (pour exemple dans le domaine de la construction, Cass. civ. 3, 22 juin 2010, n° 09-15.798, F-D N° Lexbase : A3334E3U) et que, naturellement, l’indemnité soit fondée c’est-à-dire due au titre de la police (Cass. civ. 2, 6 octobre 2011, n° 10-20.193, F-D N° Lexbase : A6167HY3).

Cette jurisprudence pose un certain nombre de difficulté dans le cadre de l’assurance dommages-ouvrage. Il est, en effet, des cas où l’assureur dommages-ouvrage, saisi par exemple en fin de délai décennal, n’aura pas forcément fini d’instruire le sinistre amiablement, donc a fortiori payé l’indemnité due en cas de désordre de nature décennale, lorsque survient la fin du délai décennal. D’un côté, les règles strictes précitées devraient conduire l’assureur dommages-ouvrage à attendre d’avoir payé cette indemnité pour pouvoir prétendre au bénéfice de la subrogation et donc agir, en lieu et place du maître d’ouvrage, à l’encontre des constructeurs présumés responsables des dommages de nature décennale en application de l’article 1792 du Code civil (N° Lexbase : L1920ABQ), au risque d’être prescrit. De l’autre, prendre ce risque reviendrait à dénaturer le mécanisme légal de l’assurance dommages-ouvrage qui a fait de cette assurance une assurance dite de préfinancement. Autrement dit, l’assureur dommages-ouvrage n’a pas à supporter la charge définitive du dommage.

Le dilemme n’est pas évident à résoudre. Pour y parvenir, la jurisprudence a pu admettre la subrogation in futurum. Elle a ainsi pu admettre la recevabilité du recours de l’assureur à l’encontre des constructeurs avant l’expiration du délai décennal bien qu’il n’ait pas eu, au moment de l’assignation, la qualité de subrogé (pour exemple, Cass. civ. 1, 9 octobre 2001, n° 98-18.378, publié au bulletin N° Lexbase : A2077AWT). La doctrine considère à cet égard qu’il ne s’agit pas d’une subrogation sans paiement mais d’une possibilité de régulariser une situation donnant lieu à une fin de non-recevoir. L’irrecevabilité sera écartée si, au moment où le juge statue, le paiement a été effectif (Cass. civ. 3, 10 décembre 2003, n° 01-00.614, FS-P+B N° Lexbase : A4206DAZ). La solution mérite d’être saluée. Statuer dans le sens contraire reviendrait à favoriser les positions de non-garantie des assureurs dommages-ouvrage en cas de déclaration de sinistre effectuée en fin de délai décennal, pratique pourtant très courante.

Tel était précisément le cas en l’espèce, la Haute juridiction a censuré l’arrêt d’appel au motif que les juges du fond n’avaient pas recherché si l’assureur dommages-ouvrage n’avait pas été subrogée dans les droits du maître d’ouvrage au jour où ils ont statué.

La Cour de cassation a, à cet effet, rappelé qu’en application du quatrième alinéa de l’article L. 121-12 précité, dans le cas où la situation donnant lieu à une fin de non-recevoir (telle qu’une prescription) est susceptible d’être régularisée, l’irrecevabilité sera écartée si la cause a disparu au moment où le juge statue.

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