La lettre juridique n°838 du 1 octobre 2020 : Baux d'habitation

[Brèves] Locations de type « Airbnb » et dispositif d’autorisation de changement d'usage : de nouvelles précisions de la Cour de cassation !

Réf. : Cass. civ. 3, 24 septembre 2020, n° 18-22.142, FS-P+B+I (N° Lexbase : A72003U9)

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[Brèves] Locations de type « Airbnb » et dispositif d’autorisation de changement d'usage : de nouvelles précisions de la Cour de cassation !. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/60632954-cite-dans-la-rubrique-bbaux-d-habitation-b-titre-nbsp-ilocations-de-type-airbnb-et-dispositif-d-auto
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par Anne-Lise Lonné-Clément

le 30 Septembre 2020

► La location de chambres d'hôtes (soumise à déclaration en mairie en application de l’article L. 324-4 du Code de tourisme N° Lexbase : L5442IEB, et non au régime d’autorisation de changement d’usage en application de l'article L. 631-7 du CCH N° Lexbase : L0141LNK) ne saurait être assimilée à la location d'un logement autonome et indépendant de celui de l'habitant et n'en constituant pas une annexe ;

► l’action tendant à réclamer le prononcé de l’amende en cas de défaut d’autorisation du changement d’usage appartient à la commune, représentée par son maire, et ce dès l’entrée en vigueur de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 (N° Lexbase : L1605LB3), d'application immédiate aux instances en cours.

Dans cette affaire, les 7 et 15 juin 2016, le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris avait assigné en référé le locataire d'une maison située en fond de cour d'un immeuble, ainsi que d'un appartement situé dans l'immeuble, en paiement d'une amende civile sur le fondement de l'article L. 651-2 du Code de la construction et de l'habitation (N° Lexbase : L2308LRW), pour avoir loué l'appartement de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage n'y élisant pas domicile, en contravention avec les dispositions de l'article L. 631-7 du même code.

Par un arrêt rendu le 4 juillet 2018, la cour d’appel de Paris (CA Paris, Pôle 1, 3ème ch., 4 juillet 2018, n° 17/02869 N° Lexbase : A0429XWS) a déclaré la Ville de Paris recevable en son intervention volontaire, et confirmé la condamnation du locataire au paiement d'une amende civile de 25 000 euros. Le locataire s’est alors pourvu en cassation. Il n’obtiendra pas gain de cause devant la Cour de cassation qui, par l’arrêt rendu le 24 septembre 2020, apporte de nouvelles précisions dans le cadre du contentieux opposant la ville de Paris aux nombreux contrevenants au régime d’autorisation de changement d’usage en application de l'article L. 631-7 du CCH.

  • Régime de location de chambres d’hôtes/régime de location d’un logement autonome et indépendant

C’est sur ce point que réside le premier apport de l’arrêt. Le requérant se prévalait notamment de l’application des dispositions de l'article L. 324-3 du Code du tourisme (N° Lexbase : L3367HNZ), instituant le régime des chambres d’hôtes. L’enjeu résidait, dans un tel cas, dans l’absence de nécessité de solliciter, préalablement à l'exercice de la sous-location, une autorisation de changement d'usage.

Il n’obtiendra pas gain de cause. Comme le rappelle la Cour suprême, l'article L. 324-3 du Code du tourisme définit les chambres d'hôtes comme « des chambres meublées situées chez l'habitant en vue d'accueillir des touristes, à titre onéreux, pour une ou plusieurs nuitées, assorties de prestations. ». Elle en déduit, alors, que la location de chambres d'hôtes ne saurait être assimilée à la location d'un logement autonome et indépendant de celui de l'habitant et n'en constituant pas une annexe.

Or tel était précisément le cas en l’espèce, la cour d’appel ayant relevé que le requérant habitait la maison du fond de cour de l'immeuble et non l'appartement du troisième étage qu'il laissait en son intégralité à l'usage des sous-locataires.  Les juges d’appel en avaient alors déduit, à bon droit, que le régime des chambres d'hôtes n'était pas applicable et que la location de cet appartement était soumise aux dispositions de l'article L. 631-7 du Code de la construction et de l'habitation.

  • Titularité de l’action tendant à réclamer le prononcé de l’amende en cas de défaut d’autorisation du changement d’usage : ministère public, commune, ou maire ?

L’autre apport de l’arrêt concerne le changement de titularité de l’action (prévue à l'article L. 651-2 du Code de la construction et de l'habitation) tendant à réclamer le prononcé de l’amende en cas d’infraction aux dispositions de l'article L. 631-7, changement issu de la loi du 20 novembre 2016 ; il résulte de cette loi que l’action n’appartient plus, désormais, au ministère public, mais au maire de la commune.

- En premier lieu, le requérant faisait valoir que la loi nouvelle qui modifie la titularité d'une action en justice était sans effet sur celles qui sont en cours, et n’était donc pas applicable ; il faisait alors grief à l'arrêt de s’être prononcé en l'absence du ministère public lors de l'audience, alors que celui-ci était titulaire de l'action à la date à laquelle elle avait été introduite, et ainsi partie principale.

Mais la Haute juridiction écarte l’argument, après avoir rappelé alors que les dispositions de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 (N° Lexbase : L1605LB3), en ce qu'elles confèrent qualité au maire de la commune pour saisir le président du tribunal de grande instance en cas de violation des règles sur le changement d'usage des locaux destinés à l'habitation, revêtent le caractère d'une loi de procédure et sont, à ce titre, d'application immédiate aux instances en cours (Cass. civ. 3, 16 mai 2019, n° 17-24.474, FS-P+B+I N° Lexbase : A4716ZBB).

Selon la Haute juridiction, elles le sont donc également en ce qu'elles prévoient que le président du tribunal de grande instance statue sur conclusions du procureur de la République, partie jointe avisée de la procédure.

Il en résulte, d'une part, que le ministère public, devenu partie jointe à compter de l'entrée en vigueur de ces dispositions, n'était pas tenu, conformément à l'article 431 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1133INB), d'assister à l'audience qui s'est tenue en appel le 30 avril 2018, d'autre part, que la cour d'appel a retenu, à bon droit, que la ville de Paris avait qualité à agir.

- En second lieu, le requérant faisait grief à l’arrêt d’avoir déclaré recevable l'intervention volontaire de la ville de Paris, alors que les dispositions précitées visent le maire comme étant le titulaire de l’action, et que sortait dès lors des limites du litige le juge qui, saisi de l'intervention volontaire d'une commune, la regardait comme celle de son maire.

Là encore l’argument est écarté par la Cour de cassation qui, après avoir relevé que l'article L. 651-2 du Code de la construction et de l'habitation, dans sa rédaction issue de la loi du 18 novembre 2016, ne précisait pas à quel titre le maire, qui peut agir en tant qu'organe exécutif du conseil municipal ou au titre de ses pouvoirs propres, était ainsi désigné, retient que, compte tenu de leur imprécision, ces dispositions doivent être interprétées à la lumière de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 (N° Lexbase : L8700LM8) qui a remplacé « maire de la commune » par « commune » et a supprimé de ce texte la référence au maire. Il en résulte que l'article L. 651-2 du Code de la construction et de l'habitation, dans sa rédaction applicable au litige, doit être interprété comme conférant qualité pour agir à la commune représentée par son maire.

Aussi, la cour d'appel ayant constaté que la ville de Paris, représentée par son maire, était intervenue volontairement, il en résultait que l'intervention volontaire de la ville de Paris, prise en la personne de son maire, était recevable.

  • Conformité au droit communautaire du dispositif d'autorisation de changement d'usage

A noter, en tout dernier lieu, que le requérant avait soulevé l’absence de conformité au droit communautaire du dispositif prévu par l’article L. 631-7 du Code de la construction et de l'habitation, instituant un régime d’autorisation de changement d’usage dans le cadre de la location d'un local meublé. Sur ce point, la Cour de cassation surseoit à statuer jusqu’au prononcé de la décision de la Cour de justice de l'Union européenne, alors même que cette dernière a tout juste rendu sa décision le 22 septembre dernier, et déclaré le dispositif conforme à la législation européenne (cf. CJUE, 22 septembre 2020, aff. C-724/18, Cali Apartments SCI N° Lexbase : A43833UU, et notre brève N° Lexbase : N4620BYR).

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