Le Quotidien du 25 septembre 2020 : Avocats/Procédure

[Brèves] Régularisation de la nullité encourue par une assignation après constitution de l’avocat postulant

Réf. : CA Chambéry, 8 septembre 2020, n° 19/02174 (N° Lexbase : A01723TK)

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par Marie Le Guerroué

le 24 Septembre 2020

► Même si un avocat était initialement l'avocat postulant, investit d'une mission de représentation auprès de la juridiction, sa constitution seul, intervenue devant la cour, est de nature à régulariser la nullité encourue par l'assignation (CA Chambéry, 8 septembre 2020, n° 19/02174 N° Lexbase : A01723TK).

Procédure. Des époux avaient fait assigner leur syndicat de copropriétaires devant le tribunal de grande instance d'Albertville en annulation de résolutions de l'assemblée générale des copropriétaires. Le syndicat des copropriétaires avait saisi le juge de la mise en état d'un incident tendant à obtenir la nullité de fond de l'assignation qui lui avait été délivrée sur le fondement de l'article 5 de la loi du 31 décembre 1971 (N° Lexbase : L6343AGZ), l'avocat postulant constitué par les époux, qui n'est pas maître de l'affaire, n'étant pas inscrit au barreau d'Albertville mais à celui de Chambéry. Les époux avaient conclu au rejet de l'exception de nullité. Le juge de la mise en état du tribunal de grande instance d'Albertville a déclaré nulle l'assignation délivrée. Les époux ont interjeté appel de cette décision.

Texte. La cour d’appel de Chambéry rappelle qu’en application de l'article 117 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1403H4Q), le défaut de capacité ou de pouvoir d'une personne assurant la représentation d'une partie en justice constitue une irrégularité de fond affectant la validité de l'acte. L'article 119 (N° Lexbase : L1407H4U) dispose que les exceptions de nullité fondées sur l'inobservation des règles de fond relatives aux actes de procédure doivent être accueillies sans que celui qui les invoque ait à justifier d'un grief et alors même que la nullité ne résulterait d'aucune disposition expresse. L'article 121 (N° Lexbase : L1412H43) dispose enfin que, dans les cas où elle est susceptible d'être couverte, la nullité ne sera pas prononcée si sa cause a disparu au moment où le juge statue. Il est de jurisprudence constante que cette irrégularité n'est toutefois plus susceptible d'être couverte après l'expiration du délai de prescription ou de forclusion de l'action. Conformément aux dispositions de l'alinéa 2 de l'article 42 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 (N° Lexbase : L4853AH9), dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 (N° Lexbase : L8700LM8), applicable en l'espèce, les actions qui ont pour objet de contester les décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants, dans un délai de deux mois à compter de la notification desdites décisions qui leur est faite à la diligence du syndic dans un délai de deux mois à compter de la tenue de l'assemblée générale.

Argumentations des parties. Le syndicat des copropriétaires soutient que l'avocat des époux, maître de l'affaire, est avocat à Saint-Etienne, celui-ci ayant pris un autre avocat comme avocat postulant. Or, ce dernier n'est pas avocat au barreau d'Albertville de sorte que l'assignation est nulle et cette nullité n'est pas régularisable dès lors que le délai de forclusion de deux mois prévu par l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 a expiré avant toute régularisation. Les époux soutiennent, eux, que le second avocat est le seul avocat constitué pour eux et qu'il n'a jamais été question pour lui d'être postulant, de sorte que l'assignation est valable.

Réponse de la cour. L'article 4 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 dispose que nul ne peut, s'il n'est avocat, assister ou représenter les parties, postuler et plaider devant les juridictions et les organismes juridictionnels ou disciplinaires de quelque nature que ce soit, sous réserve des dispositions régissant les avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation. L'article 5 de la même loi, modifié par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, dispose par ailleurs que, les avocats exercent leur ministère et peuvent plaider sans limitation territoriale devant toutes les juridictions et organismes juridictionnels ou disciplinaires, sous les réserves prévues à l'article 4. Ils peuvent postuler devant l'ensemble des tribunaux de grande instance (maintenant tribunaux judiciaires) du ressort de cour d'appel dans lequel ils ont établi leur résidence professionnelle et devant ladite cour d'appel. Par dérogation au deuxième alinéa, les avocats ne peuvent postuler devant un autre tribunal que celui auprès duquel est établie leur résidence professionnelle ni dans le cadre des procédures de saisie immobilière, de partage et de licitation, ni au titre de l'aide juridictionnelle, ni dans des instances dans lesquelles ils ne seraient pas maîtres de l'affaire chargés également d'assurer la plaidoirie.

En l’espèce, la mention dans l’assignation délivrée au syndicat est très claire et ne peut que signifier que le second avocat est l'avocat constitué, donc postulant, investit d'une mission de représentation auprès de la juridiction, tandis que l’avocat plaidant, est chargé d'une mission d'assistance et reste, à ce titre, seul maître de l'affaire. Ce point est confirmé par le courrier adressé l’avocat du syndicat concernant la communication des pièces. L'assignation encourt donc la nullité, sauf pour les demandeurs à régulariser la situation, à la condition que la forclusion de l'action ne soit pas encourue. Les époux prétendent, aujourd'hui, que seul le second avocat est leur avocat. Les appelants sont libres de changer d'avocat en cours d'instance, et en constituant le second seul, qui est avocat inscrit au barreau de Chambéry, ils se conforment alors aux dispositions de l'article 5 de la loi du 31 décembre 1971 précité. En effet, l’avocat étant inscrit dans un barreau du ressort de la cour d'appel, il peut représenter ses clients dans n'importe quel tribunal de ce ressort, sans avoir à constituer de postulant, à condition qu'il soit maître de l'affaire.

Régularisation (oui). Même si ce n'est pas prétendu par les appelants qui persistent à soutenir que le second a toujours été le maître de l'affaire, il n'en demeure pas moins qu'en le constituant lui seul ils ont procédé à la régularisation.

Le syndicat des copropriétaires soutient qu'une telle régularisation ne peut être admise dès lors qu'elle est intervenue après l'expiration du délai de forclusion de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965. Le syndicat n’en rapportant pas la preuve qui lui incombe, la cour retient que l'assignation a été délivrée dans le délai de deux mois de la notification du procès-verbal de l'assemblée générale, et que cette assignation, même nulle, a interrompu le délai de forclusion. L'interruption persiste jusqu'à ce que le juge statue, c'est-à-dire en l'espèce jusqu'à ce que l'annulation de l'assignation soit devenue définitive, ou jusqu'à ce que la décision soit rendue sur le fond. En l'espèce, du fait de l'appel, l'instance s'est poursuivie, maintenant l'effet interruptif de l'assignation.

En conséquence, la constitution du second avocat seul, intervenue devant la cour, est de nature à régulariser la nullité encourue par l'assignation, sans que la forclusion de l'action puisse être retenue. Si c'est à juste titre que le juge de la mise en état a annulé l'assignation puisque la cause de nullité n'avait pas disparu à la date de sa décision, la régularisation intervenue depuis fait disparaître cette nullité (v. ETUDE : Le principe de territorialité de la postulation, in La profession d’avocat, Lexbase N° Lexbase : E36353R3).

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