Le Quotidien du 13 mai 2020 : Covid-19

[Brèves] Publication de la loi prorogeant l’état d’urgence sanitaire : dispositions pénales

Réf. : Loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions (N° Lexbase : L8351LW9) et Cons. const., décision n° 2020-800 DC, du 11 mai 2020 (N° Lexbase : A32573L9)

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par June Perot

le 12 Mai 2020

► La loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions (N° Lexbase : L8351LW9) a été publiée au Journal officiel du 12 mai 2020 et proroge l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 10 juillet 2020 inclus ;

saisi de cette loi, le Conseil constitutionnel a validé la veille plusieurs de ses dispositions mais, concernant les traitements de données à caractère personnel de nature médicale aux fins de « traçage », le Conseil a décidé deux censures partielles et énoncé trois réserves d’interprétation, cependant que, concernant le régime des mesures de quarantaine et d’isolement, il prononce une réserve d’interprétation et une censure (Cons. constit., décision n° 2020-800 DC du 11 mai 2020 N° Lexbase : A32573L9).

La loi de prorogation de l’état d’urgence sanitaire, adoptée le samedi 9 mai 2020, a été déférée dans la soirée au Conseil constitutionnel par le Président de la République et le Président du Sénat en application de l’article 61 de la Constitution (N° Lexbase : L1327A9Z). Deux saisines parlementaires ont également été reçues par le Conseil concernant ce texte le dimanche 10 mai après-midi. Le Conseil constitutionnel a rendu sa décision, qui comporte 88 paragraphes, sur ces quatre saisines le lundi 11 mai.

Responsabilité pénale des décideurs publics ou privés

La disposition contestée prévoyait, dans un nouvel article L. 3136-2 du Code de la santé publique que « L’article 121‑3 du Code pénal est applicable en tenant compte des compétences, du pouvoir et des moyens dont disposait l’auteur des faits dans la situation de crise ayant justifié l’état d’urgence sanitaire, ainsi que de la nature de ses missions ou de ses fonctions, notamment en tant qu’autorité locale ou employeur ».

Tout a commencé lundi 4 mai, lorsque le Sénat a introduit dans la loi débattue un texte précisant le régime de responsabilité des élus locaux, fonctionnaires ou chefs d’entreprises pour leurs décisions prises dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, vraisemblablement pour faire face à leurs inquiétudes grandissantes. La ministre de la Justice avait alors affirmé son opposition à la modification sénatoriale, en insistant sur le risque de rupture du principe d’égalité devant la loi.

Il était alors demandé au Conseil constitutionnel d’examiner la conformité de ces dispositions au principe d’égalité devant la loi pénale. Selon les sénateurs requérants, ces dispositions méconnaîtraient ce même principe dès lors qu'elles pourraient avoir pour effet d'exonérer certains « décideurs » de toute responsabilité pénale. Ils estiment également que ces dispositions sont entachées d'incompétence négative dans la mesure où elles seraient imprécises quant aux faits auxquels elles sont susceptibles de s'appliquer et quant à la nature des moyens à la disposition de l'auteur des faits devant être pris en compte pour apprécier sa responsabilité.

Le Conseil constitutionnel a finalement jugé que ces dispositions rappellent celles de droit commun et s’appliquent de la même manière à toute personne ayant commis un fait susceptible de constituer une faute pénale non intentionnelle dans la situation de crise ayant justifié l’état d’urgence sanitaire. Dès lors, elles ne méconnaissent pas le principe d’égalité devant la loi pénale. Elles ne sont pas non plus entachées d’incompétence négative.

Contentieux de la détention provisoire

La nouvelle loi modifie l’ordonnance du 25 mars 2020 portant adaptation de règles de procédure pénale sur le fondement de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 (N° Lexbase : L5740LWI ; lire J.-B. Thierry, La procédure pénale confinée par voie d’ordonnance : commentaire de l’ordonnance « covid-19 », Lexbase Pénal, avril 2020 N° Lexbase : N3033BYY). L’avant-dernier alinéa de l'article 4 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsque la détention provisoire d'une personne a été ordonnée ou prolongée sur le motif prévu au 5° et, le cas échéant, aux 4° et 7° de l'article 144 du même code, l'avocat de la personne mise en examen peut également adresser par courrier électronique au juge d'instruction une demande de mise en liberté si celle-ci est motivée par l'existence de nouvelles garanties de représentation de la personne ; dans les autres cas, toute demande de mise en liberté formée par courrier électronique est irrecevable ; cette irrecevabilité est constatée par le juge d'instruction qui en informe par courrier électronique l'avocat et elle n'est pas susceptible d'appel devant la chambre de l'instruction. » ;

La loi ajoute un article 16-1, lequel prévoit qu’à compter du 11 mai 2020, la prolongation de plein droit des délais de détention provisoire prévue à l'article 16 n'est plus applicable aux titres de détention dont l'échéance intervient à compter de cette date et les détentions ne peuvent être prolongées que par une décision de la juridiction compétente prise après un débat contradictoire intervenant, le cas échéant, selon les modalités prévues à l'article 19.

Si l'échéance du titre de détention en cours, résultant des règles de droit commun du Code de procédure pénale, intervient avant le 11 juin 2020, la juridiction compétente dispose d'un délai d'un mois à compter de cette échéance pour se prononcer sur sa prolongation, sans qu'il en résulte la mise en liberté de la personne, dont le titre de détention est prorogé jusqu'à cette décision. Cette prorogation s'impute sur la durée de la prolongation décidée par la juridiction. En ce qui concerne les délais de détention au cours de l'instruction, cette durée est celle prévue par les dispositions de droit commun ; toutefois, s'il s'agit de la dernière échéance possible, la prolongation peut être ordonnée selon les cas pour les durées prévues à l'article 16 de la présente ordonnance.

En ce qui concerne les délais d'audiencement, la prolongation peut être ordonnée pour les durées prévues au même article 16, y compris si elle intervient après le 11 juin 2020.

La prolongation de plein droit du délai de détention intervenue au cours de l'instruction avant le 11 mai 2020, en application dudit article 16, n'a pas pour effet d'allonger la durée maximale totale de la détention en application des dispositions du Code de procédure pénale, sauf si cette prolongation a porté sur la dernière échéance possible.

Lorsque la détention provisoire au cours de l'instruction a été prolongée de plein droit en application de l'article 16 de la présente ordonnance pour une durée de six mois, cette prolongation ne peut maintenir ses effets jusqu'à son terme que par une décision prise par le JLD selon les modalités prévues à l'article 145 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2791KGH) et, le cas échéant, à l'article 19 de l’ordonnance. La décision doit intervenir au moins trois mois avant le terme de la prolongation. Si une décision de prolongation n'intervient pas avant cette date, la personne est remise en liberté si elle n'est pas détenue pour une autre cause.

Pour les délais de détention en matière d'audiencement, la prolongation de plein droit des délais de détention ou celle décidée en application du troisième alinéa du présent article a pour effet d'allonger la durée maximale totale de la détention possible jusqu'à la date de l'audience prévue en application des dispositions du code de procédure pénale.

La loi ajoute également un article 18-1 selon lequel, par dérogation à l'article 148-4 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L3515AZ9), la chambre de l'instruction peut être directement saisie d'une demande de mise en liberté lorsque la personne n'a pas comparu, dans les deux mois suivant la prolongation de plein droit de la détention provisoire intervenue en application de l'article 16 de l’ordonnance, devant le juge d'instruction ou le magistrat par lui délégué, y compris selon les modalités prévues à l'article 706-71 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7459LPX).

Constatation de certaines contraventions par des APJ et agents assermentés

Le 1° de l'article 9 de la loi et le deuxième alinéa de son 2° insèrent un cinquième et un septième alinéas à l'article L. 3136-1 du Code de la santé publique (N° Lexbase : L5649LW7) afin de permettre à des agents de police judiciaire adjoints et à des agents assermentés des services de transport de constater certaines contraventions aux interdictions et obligations en vigueur pendant l'état d'urgence sanitaire.

Devant le Conseil constitutionnel, les sénateurs requérants faisaient valoir que ces dispositions contreviendraient au principe de placement de la police judiciaire sous la direction et le contrôle de l'autorité judiciaire. Les dispositions relatives aux agents des services de transport seraient également contraires au principe de légalité des délits et des peines, faute de déterminer clairement quelles infractions peuvent être verbalisées par ces agents.

Le Conseil constitutionnel a relevé en premier lieu que la prérogative ainsi reconnue à ces agents est limitée au constat des contraventions qui ne nécessite pas d'actes d'enquête de leur part et que cette compétence est limitée au cas où de telles contraventions sont commises dans les véhicules et emprises immobilières des services de transports ferroviaire ou guidé et de transport public routier de personnes.

En second lieu, les dispositions contestées n'établissant par elles-mêmes aucune infraction ni aucune peine, le grief tiré de la méconnaissance du principe de légalité des délits et des peines ne peut qu'être écarté.

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