La lettre juridique n°698 du 11 mai 2017 : Discrimination et harcèlement

[Jurisprudence] Mutation géographique du salarié motivée par son état de santé et licenciement discriminatoire

Réf. : Cass. soc. 26 avril 2017, n° 14-29.089, FS-P+B (N° Lexbase : A2701WBN)

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par Patrice Adam, Professeur à l'Université de Lorraine

le 11 Mai 2017

L'état de santé du salarié autorise-t-il l'employeur à prendre, valablement, à son endroit, une mesure spécifique de gestion ? C'est, formulée dans des termes très généraux, la question qui était au coeur de l'arrêt rendu par la Chambre sociale de la Cour de cassation le 26 avril 2017. Une règle bien connue assaille ainsi immédiatement l'esprit : "aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte [par exemple en matière de mutation] [...], en raison de son état de santé" (C. trav., art. L. 1132-1 N° Lexbase : L1000LDE). Règle qui constitue le pivot d'un imposant édifice législatif -au-dessus duquel flotte la bannière de la lutte contre les discriminations- dont la structure repose sur deux solides piliers : la nullité des mesures qui n'en respectent pas les prescriptions (C. trav., art. L. 1132-4 N° Lexbase : L0680H93) (1) et la mise en place d'un mécanisme probatoire aménagé (à double ressort) devant permettre au travailleur d'éviter les affres de la probatio diabolica (C. trav., art. L. 1134-1 N° Lexbase : L2681LBW). Cependant, cet ensemble normatif réserve tout de même une capacité d'action légitime à l'employeur : "les différences de traitement fondées sur l'inaptitude constatée par le médecin du travail en raison de l'état de santé ou du handicap ne constituent pas une discrimination lorsqu'elles sont objectives, nécessaires et appropriées" (C. trav., art. L. 1133-3 N° Lexbase : L6057IAL). Brevitatis causa : la décision patronale motivée par l'état de santé du salarié n'échappe à la qualification de "mesures discriminatoires" que si elle trouve raison dans l'avis d'inaptitude délivré par le médecin du travail. En ce champ, l'hésitation sur le sens ou l'articulation des normes ne semble guère trouver espace de déploiement. Seules des difficultés "pratiques", de type probatoire, paraissent de nature à nourrir les débats judiciaires. Il n'y a là, cependant, qu'une apparence trompeuse. La route est bien plus sinueuse qu'il n'y paraît de prime abord. Tracer une ligne de séparation entre mesure discriminatoire et exercice légitime du pouvoir de direction peut, en réalité, s'avérer un exercice fort délicat lorsque l'état de santé du salarié est à l'origine de la décision prise par l'employeur. De ces difficultés, dont il nous faudra ultérieurement préciser l'exact ressort, l'arrêt du 26 avril 2017 de la Chambre sociale de la Cour de cassation, ici commentée offre une belle illustration.
Résumé

Ne constitue pas un élément laissant supposer l'existence d'une discrimination en raison de l'état de santé -et, partant, le licenciement prononcé, fondé sur le refus par le salarié de cette mutation, n'est pas discriminatoire- le fait, pour un salarié qui occupe les fonctions de chargé de clientèle affecté à la gestion des aires d'accueil des gens du voyage et objet d'un avis qui le déclare apte à son poste sans relation avec les populations des aires du voyage, de se voir proposer une mutation conformément à une clause de mobilité figurant au contrat de travail sur un poste de chargé de clientèle et compatible avec l'avis d'aptitude.

En l'espèce, le salarié, chargé de clientèle, assurait la gestion des aires d'accueil des gens du voyage. A la suite de deux avis d'aptitude avec réserves du médecin du travail (pas de "contact avec les gens du voyage" dans le premier avis ; pas de "relation avec les populations des aires du voyage" dans le second), l'employeur a proposé au salarié un autre poste correspondant à son emploi, situé dans l'aire de mutation prévue par la clause de mobilité figurant dans son contrat de travail. Proposition qui, si elle a reçu l'avis favorable du médecin du travail, a été refusée par le salarié. C'est ce refus qui a justifié son licenciement pour "motif réel et sérieux". Saisie de la question de la validité de la rupture du contrat de travail, la cour d'appel de Rennes, considérant que "c'est l'état de santé du salarié qui a entraîné à terme, au moins indirectement, la mesure de licenciement sanctionnant le refus du salarié", juge le licenciement discriminatoire et en prononce la nullité. Peu important, pour les juges du second degré, l'avis favorable du médecin du travail et l'impossibilité dans laquelle l'employeur se trouvait à adapter le poste occupé jusqu'alors par le salarié. Face à pareil obstacle, ce dernier aurait dû, selon les juges, mettre en oeuvre le recours organisé par l'article L. 4624-1 du Code du travail (N° Lexbase : L9672KXI) dans sa rédaction alors en vigueur (2). Position sèchement censurée par la Haute juridiction : "la proposition de mutation du salarié par la mise en oeuvre de la clause de mobilité figurant au contrat de travail sur un poste de chargé de clientèle compatible avec l'avis d'aptitude ne constituait pas un élément laissant supposer l'existence d'une discrimination en raison de l'état de santé et le licenciement prononcé, fondé sur le refus par le salarié de cette mutation n'était pas discriminatoire". L'énoncé semble renvoyer une image déformée de l'édifice législatif de lutte contre les discriminations (cf. supra). C'est parce que la décision patronale de licenciement était bien en lien, d'une certaine manière, avec l'état de santé du salarié. La proposition de mutation qui est à l'origine du refus ayant motivé la rupture y trouvait, en effet, sa raison profonde. Or, l'employeur ne pouvait faire état, ici, d'aucune inaptitude médicalement constatée (3) pour échapper au grief de discrimination...

Pourtant, la solution supportée par cet arrêt apparaît pleinement justifiée. S'il est tentant, en première intuition, de la rapprocher d'autres décisions relatives aux licenciements indirectement liés à l'état de santé du salarié (où le grief de discrimination se voit également battu en brèche) (I), il apparaît, à l'analyse du processus décisionnel qui en constituait la matière, qu'elle s'inscrit cependant dans un horizon bien différent, dans lequel l'intervention du médecin du travail occupe, à l'inverse des autres contentieux, une place centrale (II).

I - Des liens indirects entre état de santé et licenciement

Qu'est-ce qui pose problème, au fond, dans l'affaire jugée par la Cour de cassation le 26 avril 2017 ? Qu'est-ce qui explique qu'à la lecture des faits de l'espèce l'esprit se trouble et que la route que l'on croyait dessinée en ligne droite prend un tracé plus tortueux ? Avançons une hypothèse : la source de ce trouble réside dans le lien indirect qui relie le licenciement et l'état de santé du salarié. Dès lors, la tentation est forte de rapprocher l'arrêt du 26 avril 2017 des solutions dégagées dans un autre contentieux, celui du licenciement pour trouble objectif (A). L'exploration de ce dernier montre, cependant, qu'il n'y a nulle unité d'analyse possible entre ces licenciements indirectement fondés sur l'état de santé du salarié. Alors que, dans l'affaire qui nous retient, l'intervention du médecin du travail joue un rôle fondamental, elle n'en a aucun dans le cas où le licenciement est motivé par un trouble objectif (B).

A - Le licenciement pour trouble objectif

C'est donc dans la "nature" du lien qui relie l'état de santé du salarié à la mesure de licenciement que réside la difficulté. Lorsque ce lien est direct (le licenciement est motivé par l'état de santé du salarié), aucune autre raison ne s'intercalant entre la décision patronale de rupture et la santé (physique ou mentale) du salarié qui la justifie, la solution est simple : sauf avis régulier d'inaptitude, le licenciement est discriminatoire. La situation apparaît, en revanche, plus compliquée à dénouer, lorsque ce lien est, comme le remarquent les juges rennais dans l'affaire rapportée, seulement indirect (4). Hypothèse qui vise une situation, ou plus justement des situations, plus ou moins complexes, dans lesquelles une autre "cause" va s'insérer entre la dégradation de l'état de santé du salarié et le licenciement, brouillant ainsi le continuum entre la première et le second qui structure classiquement la qualification de discrimination (directe). Ce type de brouillage se retrouve dans différentes configurations contentieuses relatives à la rupture du contrat de travail impliquant l'état de santé du salarié.

C'est ainsi le cas lorsque l'employeur licencie le salarié en raison du trouble objectif que son (ses) absence(s) pour maladie cause(nt) au bon fonctionnement de l'entreprise et de la nécessité de le remplacer définitivement (5). L'enchaînement des causes présente, en l'occurrence, une structure simple et binaire : une première cause (la dégradation de l'état de santé du salarié) produit un effet (un trouble objectif) qui devient la cause (c'est la seconde) du licenciement. Or, nul ne l'ignore, la Chambre sociale de la Cour de cassation considère de longue date que ce licenciement indirectement fondé sur la maladie n'en reste pas moins valable, sans qu'il soit nécessaire de passer par la case inaptitude. Semblable manière d'appréhender les choses se retrouve ailleurs. On songe, évidemment, à la jurisprudence relative au licenciement pour un trouble objectif causé par un comportement relevant de la vie personnelle du salarié (6). Dans un arrêt déjà ancien (7), les juges de cassation soulignaient d'ailleurs que, lorsque le licenciement est prononcé à raison du trouble objectif causé, selon l'employeur, par le comportement du salarié, les dispositions de l'article L. 122-45 du Code du travail (N° Lexbase : L3114HI8, devenu L. 1132-1 du Code du travail) ne sont pas applicables.

On le voit, dans tous ces cas, le motif du licenciement (le trouble objectif (8)) se présente au juge détaché, isolé, rendu étranger à ce qui l'a engendré. "Né judiciairement sous X", le constat du trouble fait obstacle à ce que le juge remonte à ses origines (9).

Et la Cour de cassation d'aller même jusqu'à juger que l'impossibilité pour l'employeur d'établir un trouble sérieux au bon fonctionnement de l'entreprise et/ou la nécessité de procéder au remplacement définitif du salarié malade, ne permet pas au juge saisi de la question de la légitimité/validité du licenciement de basculer, automatiquement, sur le terrain de la discrimination en raison de l'état de santé du salarié (10). Le licenciement sera ainsi privé de cause réelle et sérieuse mais ne sera pas nul (11). Position, disons-le, qui peut surprendre dès lors que la " cause intermédiaire " qui provoque la cassure du continuum entre état de santé et rupture du contrat de travail vient à disparaître et redonne à voir, objectivement, un lien direct entre l'un et l'autre (12). "En l'absence de justification objective du licenciement, il ne reste plus comme cause possible de celui-ci que l'état de santé du salarié" (13). Reste, en tout état de cause, et quoique l'on en pense (14), que cette jurisprudence figure de manière frappante la mise à l'écart de la qualification de discrimination, dans le champ de la protection de la santé du salarié, dès lors que la mesure patronale contestée ne présente, avec ce dernier, qu'un lien indirect (15).

B - Le trouble objectif exclut l'intervention du médecin du travail

Dès lors que les juges du contrat de travail érigent l'absence et ses conséquences délétères sur le fonctionnement de l'entreprise, en motif autonome de licenciement, détachable de leur origine, il n'est nul besoin que le médecin du travail intervienne. Le licenciement repose, en effet, sur une cause qui n'implique nulle appréciation médicale de l'employeur sur l'état de santé du salarié. A aucun moment, sa décision de licencier, uniquement motivée par un constat factuel de désordre productif, ne suppose jugement sur cet état. En aucun cas, pour le dire d'une autre façon, l'employeur ne prend sa décision de licencier en contemplation de l'état de santé dégradé du salarié. Cet état de santé reste en dehors du champ des motivations patronales. Le licenciement du salarié malade est donc possible sans encourir le grief de discrimination et sans intervention du médecin du travail, parce qu'une telle intervention n'aurait ici ni objet, ni utilité !

La situation se présentait sous un jour bien plus complexe dans l'affaire jugée par la Chambre sociale dans son arrêt du 26 avril 2017. Une analyse plus poussée du processus décisionnel qui en était au centre donne à voir un nouvel horizon où, cette fois, l'intervention du médecin du travail, retrouvant toute son utilité, joue un rôle majeur. C'est que le refus d'un changement des conditions de travail, motif direct du licenciement prononcé, n'est en rien assimilable au trouble objectif : là où le second n'implique pas d'appréciation sur l'état de santé du salarié, le premier intègre un tel jugement. L'employeur est amené à prendre une décision (qui conduira à la rupture du contrat) dont le motif est clairement l'état de santé du salarié... Et cela, évidemment, change tout.

II - Mesures de gestion et intervention du médecin du travail

Dans cette dernière affaire, entre la dégradation de l'état de santé du salarié et le licenciement prononcé par l'employeur, s'intercale une suite de décisions : l'état de santé du salarié motive la décision du médecin du travail de rendre un avis d'aptitude avec réserves ; cette décision conduit l'employeur à en prendre une autre, celle de proposer au salarié une réaffectation compatible avec sa capacité de travail résiduelle ; initiative qui va mener à une décision de refus du salarié ; et face à ce refus, l'employeur doit prendre, finalement, la décision de rompre le contrat par la voie d'un licenciement. Il y a là une "chaîne de décisions" (au sens où elles sont liées logiquement les unes aux autres) qui peut conduire à considérer que la cause de la première se retrouve dans une certaine mesure dans la dernière (ce dont ne faisait d'ailleurs pas mystère la lettre de licenciement (16) ou la convocation à l'entretien préalable de licenciement (17)). C'est là, à n'en pas douter, le sens de la référence faite par les juges rennais au lien indirect entre le licenciement et l'état de santé du salarié. Mais c'était faire fi d'une donnée essentielle : l'intervention du médecin du travail. Car il n'est pas possible de livrer analyse similaire selon que la décision patronale prend (B) ou non (A) appui sur une telle intervention.

A - L'absence d'intervention du médecin du travail

Il est indiscutable que si la mutation avait été décidée, seule, de son propre chef, par l'employeur en raison de l'état de santé du salarié, elle aurait pu être qualifiée de "mesure discriminatoire", au sens de l'article L. 1132-1 du Code du travail. Le licenciement prenant appui sur le refus du salarié de déférer à pareille mesure pourrait alors être annulé, peu important même les "louables" intentions de l'employeur. Ainsi, a été jugé, le 30 mars 2011 (18), que le changement d'affectation d'une salariée, décidé en raison de son état de santé, est discriminatoire, alors même que l'employeur avait entendu lui confier un poste moins stressant, la salariée étant en train de se remettre d'un accident vasculaire cérébral et ne pouvant exercer son activité qu'à temps partiel. L'état de santé du salarié est bien la cause directe et exclusive de la décision patronale de mutation. Or, c'est exactement ce qu'interdit, sauf avis d'inaptitude, le dispositif législatif anti-discrimination. Le salarié est évidemment en droit de s'opposer à cette mesure discriminatoire et son refus ne peut justifier un licenciement. Ce dernier qui, s'il est tout de même prononcé, ne peut être jugé que discriminatoire, puisque la décision qui lui sert d'assise et dont il n'est qu'une forme de prolongement revêt elle-même cette infamante qualité. Le licenciement motivé par le refus d'une discrimination est nécessairement discriminatoire !

Mais dans l'affaire qui nous retient, semblable approche est tout simplement impossible. En effet, la proposition de l'employeur de changer les conditions de travail du salarié n'est qu'une manière pour lui d'accomplir son obligation légale (C. trav., art. L. 4624-1 N° Lexbase : L9672KXI (19)) de prendre en considération les réserves formulées par le médecin du travail dans son avis d'aptitude (20). C'est dans l'intervention du médecin du travail que réside la différence essentielle avec l'arrêt de 2011 !

B - L'intervention du médecin du travail

Il est entendu que l'avis d'aptitude avec réserves n'est pas un avis d'inaptitude, mais voilà une remarque qui n'est pas de nature à empêcher l'exclusion de la qualification de discrimination. Ce n'est pas le jeu de l'article L. 1133-3 du Code du travail qui est ici en cause. Il s'agit seulement de relever que, ne peut être qualifiée de discriminatoire, sans incohérence majeure, la prise en compte par l'employeur de l'état de santé du salarié dans l'aménagement de ses conditions de travail dès lors qu'elle est imposée par la loi elle-même !

Comment concilier l'interdiction pour l'employeur de prendre en compte l'état de santé du salarié pour justifier l'une de ses décisions et l'obligation, dans le même temps, d'aménager le poste de travail du salarié conformément aux préconisations du médecin du travail, si ce n'est en considérant que cette obligation fait exception -sans la priver d'intérêt- à l'interdit qui pèse sur le patron (alors qu'inverser la proposition conduirait à totalement priver l'obligation d'intégrer les préconisations du praticien de sa substance). Au final, puisque la décision (celle de muter le salarié) est dénuée de toute coloration discriminatoire, les décisions subséquentes qui prennent appui sur elle, le sont tout autant. Alors, s'il est vrai que la dégradation de l'état de santé du salarié est bien à l'origine de son licenciement (dans la seule mesure où si elle n'avait pas existé, ce licenciement n'aurait pas été prononcé), la rupture du contrat n'en reste pas moins exclusive de toute discrimination, puisque fondée sur un processus décisionnel qui n'en contient nul germe. De surcroît, on comprend mal la position des juges d'appel selon laquelle l'employeur aurait dû exercer son droit à recours contre la décision du médecin du travail et qu'à défaut de l'avoir fait, la mesure de changement des conditions de travail devait basculer dans le champ de la discrimination. Pourquoi exercer un recours contre une décision que l'on n'entend pas remettre en cause ?

Finalement, l'intervention du médecin du travail atteste que la prise en compte par l'employeur de la santé du salarié, pour justifier telle ou telle de ses mesures de gestion, s'inscrit dans une logique d'amélioration ou de préservation de sa santé. Elle est manière pour lui de donner corps à son obligation de sécurité (de résultat ou de moyens renforcées, on ne sait plus trop...). En s'en faisant garante, qu'elle se moule ou non dans les formes d'un avis d'inaptitude, cette intervention chasse logiquement le grief de discrimination. Que l'employeur s'en dispense, et la discrimination, alors, de ressurgir !


(1) "En application des dispositions des articles L. 1132-1 (N° Lexbase : L1000LDE) et L. 1132-4 (N° Lexbase : L0680H93) du Code du travail, tout licenciement prononcé à l'égard d'un salarié en raison de son état de santé est nul et, dès lors qu'il caractérise une atteinte au droit à la protection de la santé, garanti par l'article 11 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 (N° Lexbase : L6821BH4), confirmé par celui de la Constitution du 4 octobre 1958 (N° Lexbase : L1356A94), [ouvre droit] au salarié qui demande sa réintégration au paiement d'une indemnité égale au montant de la rémunération qu'il aurait dû percevoir entre son éviction et le jugement constatant la résiliation judiciaire de son contrat de travail, peu important qu'il ait ou non reçu des salaires ou revenus de remplacement pendant cette période" (Cass. soc., 29 mai 2013, n° 11-28.734, FS-P+B N° Lexbase : A9525KEI ; B. Gauriau, Dr. soc., 2014, p. 44).
(2) Procédure de recours largement remaniée par la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels (N° Lexbase : L8436K9C), dite loi "Travail" (C. trav., art. L. 4624-7 N° Lexbase : L6792K9G).
(3) L'avis d'aptitude avec réserves (fussent-elles importantes) n'est pas un avis d'inaptitude : Cass. soc., 28 janvier 2010, n° 08-42.616, FS-P+B (N° Lexbase : A7668EQ3).
(4) Question qui, évidemment, n'a rien à voir avec celle de la discrimination indirecte...
(5) Cass. soc., 13 mars 2001, n° 99-40.110, publié (N° Lexbase : A9275ASC) ; Ass. plén., 22 avril 2011 n° 09-43.334, P+B+R+I (N° Lexbase : A1067HP9).
(6) Cass. soc., 16 septembre 2009, n° 08-41.837, F-D (N° Lexbase : A1129ELE).
(7) Cass. soc., 14 novembre 2000, n° 98-41.012, publié (N° Lexbase : A7865AHR).
(8) P.-H. Antonmattéi, "Le licenciement pour trouble objectif", Dr. soc., 2012, p. 10.
(9) Recherche des origines permise, en revanche, lorsque le salarié prétend que la cause objective de licenciement invoquée par l'employeur trouve sa source dans le comportement fautif de ce dernier (par ex., Cass. soc., 11 octobre 2006, n° 04-48.314, F-P+B+R N° Lexbase : A7726DRL ; Cass. soc. 2 mars 2011 n° 08-44.977, FP-P+B N° Lexbase : A3302G43 ; Cass. soc., 13 mars 2013, n° 11-22.082, FS-P+B N° Lexbase : A9750I9Y) ; RDT, 2013, p. 328, obs, B. Pélissier. Il s'agit d'éviter, ici, que l'employeur puisse invoquer sa propre faute à l'appui du licenciement du salarié ! De cette position, l'adage nemo auditur constitue l'horizon. "Lorsque l'absence a pour cause première un harcèlement moral, la perturbation qu'elle crée ne peut pas devenir une cause indépendante, justifiante. La cause première ne peut plus être détachée, oubliée. Le licenciement conserve comme cause le harcèlement subi", E. Dockès, obs. sous Cass. soc. 11 octobre 2006, n° 04-48.314, F-P+B+R (N° Lexbase : A7726DRL) ; RDT, 2007, p. 30 ; F. Géa, La "cause fautive" de licenciement (au miroir des jurisprudences judiciaire et administrative), RJS, 7/13, p. 427.
(10) J. Mouly, Licenciement pour maladie sans remplacement définitif du salarié : pas de discrimination automatique, Dr. soc., 2016, p. 384.
(11) Cass. soc., 27 janvier 2016, n° 14-10.084, F-P+B (N° Lexbase : A3355N7E) ; Cass. soc., 22 septembre 2016, n° 14-29.974, F-D (N° Lexbase : A0191R4T).
(12) Voir déjà, dans le même sens, A. Mazeaud, obs. sous Cass. soc., 26 novembre 2002, n° 00-44.517, publié (N° Lexbase : A1179A4G) ; Dr. soc., 2003, p. 233. On soulignera que quelques décisions, anciennes et isolées, avaient d'ailleurs admis cette logique du basculement, en prononçant la nullité du licenciement : Cass. soc. 29 septembre 2004, n° 01-45.577, F-D (N° Lexbase : A4601DDR) ; Cass. soc., 9 juin 2010, n° 09-40.203, F-D (N° Lexbase : A0169EZB).
(13) J. Mouly, art. préc..
(14) Pour une roborative critique de cette jurisprudence, J. Mouly, art. préc.. L'auteur prenant appui sur les dispositions de l'article L. 1134-1 du Code du travail (N° Lexbase : L2681LBW) écrit : "lorsque l'employeur échoue dans l'administration de cette preuve, il n'est pas fondé, comme le fait pourtant la Cour de cassation [...], d'exiger du salarié la démonstration de ces éléments laissant supposer la discrimination. Cette étape de l'administration de la preuve a déjà été franchie. L'échec de l'employeur dans la démonstration de la cause objective ne peut donc que signer l'existence d'une discrimination".
(15) La jurisprudence réserve, cependant, la possibilité, pour le salarié licencié, de présenter devant le juge des faits de nature à faire présumer l'existence d'une discrimination (la fausseté du trouble objectif invoqué ne suffisant pas).
(16) "L'avis d'aptitude avec réserves ne vous a pas permis de reprendre votre poste de chargé clientèle sur les aires d'accueil des gens du voyage [...]".
(17) "[...] à la suite des deux visites médicales que vous avez passées avec la médecine du travail relevant une aptitude avec réserves, et à la suite de notre impossibilité à vous proposer un autre poste que celui de chargé de clientèle 3ème niveau".
(18) Cass. soc., 30 mars 2011, n° 09-71.542, FS-P+B (N° Lexbase : A3943HMY) ; JSL, 30 mai 2011, n° 300, obs. J.-Ph. Lhernould.
(19) Disposition désormais codifiée (après la loi "Travail" du 8 août 2016) à l'article L. 4624-6 du Code du travail (N° Lexbase : L6791K9E).
(20) Cass. soc., 19 décembre 2007, n° 06-46.147, FS-P+B (N° Lexbase : A1397D37), RDT, 2008, p. 246, obs. Vericel.

Décision

Cass. soc. 26 avril 2017, n° 14-29.089, FS-P+B (N° Lexbase : A2701WBN)

Cassation (CA Rennes, 15 octobre 2014, n° 13/05213 N° Lexbase : A3523MY7)

Textes visés : C. trav., art. L. 1132-1 (N° Lexbase : L6053IAG) et L. 1134-1 (N° Lexbase : L6054IAH) alors applicables

Mots clés : Mutation géographique ; clause de mobilité ; avis d'aptitude avec réserves ; absence de licenciement discriminatoire en raison de l'état de santé.

Lien base : (N° Lexbase : E2585ETW).

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