La lettre juridique n°423 du 13 janvier 2011 : Collectivités territoriales

[Textes] La loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010, de réforme des collectivités territoriales : nouvelles formes incitatives et imposées d'une organisation administrative décentralisée (première partie)

Réf. : Loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales (N° Lexbase : L9056INQ)

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N0480BR9

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[Textes] La loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010, de réforme des collectivités territoriales : nouvelles formes incitatives et imposées d'une organisation administrative décentralisée (première partie). Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/3555076-commente-dans-la-rubrique-bcollectivites-territoriales-b-titre-nbsp-ila-loi-n-2010-1563-du-16-decemb
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par Laurent Ducroux et Stéphane Lesueur -Avocats Associés- DL Avocats (Montpellier)

le 17 Janvier 2011

Après les grandes lois de décentralisation de 1982 (1) et 1983 (2), dites lois "Deferre", la réforme de l'intercommunalité de 1999 (3) par la loi "Chevènement", et la consécration d'une République décentralisée par la réforme constitutionnelle de 2003 (4) avec en prolongement la loi de 2004 (5) sur les nouvelles libertés et responsabilités locales dite loi "Raffarin", la loi du 16 décembre 2010, de réforme des collectivités territoriales (6), vient apporter une contribution majeure à l'organisation et au fonctionnement des collectivités territoriales, même si d'aucun estime qu'elle reste en deçà de la réforme initialement envisagée. Issue d'un processus lancé en 2008 par le Président de la République et prolongée, notamment, par les rapports "Balladur" et "Belot" de 2009, cette loi a fait l'objet d'un vif débat parlementaire et n'a été adoptée que par la plus petite majorité au Sénat. Elle a été validée pour l'essentiel par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 9 décembre 2010 (Cons. const., décision n° 2010-618 DC du 9 décembre 2010, Loi de réforme des collectivités territoriales N° Lexbase : A7110GMB), et a été promulguée en quasi totalité au Journal officiel du 17 décembre 2010, amputée seulement de ses dispositions concernant la répartition démographique des conseillers territoriaux dans les départements. Cette loi s'organise autour de quatre points essentiels :

- la rénovation de l'exercice de la démocratie locale avec la création des fameux conseillers territoriaux appelés à siéger à la fois dans les départements et dans les régions et la consécration, enfin, de l'élection au suffrage universel direct des conseillers communautaires ;

- l'adaptation des structures à la diversité des territoires la création attendue mais en deçà de certaines attentes des métropoles, l'instauration des pôles métropolitains et des communes nouvelles, ainsi que les possibilités de regroupement et modifications des départements et des régions ;

- le développement et la simplification de l'intercommunalité avec les possibilités de transformation des syndicats de villes nouvelles, l'achèvement et la rationalisation de la carte de l'intercommunalité à travers un nouveau schéma départemental obligatoire de coopération intercommunale, un renforcement de l'intercommunalité à travers le transfert de certains pouvoirs de police, les possibilités de mutualisation, de mise à disposition et de prestations de services entre personnes publiques, l'unification de la dotation globale de fonctionnement et des grandes taxes locales ;

- la clarification des compétences des collectivités territoriales avec la suppression de la clause générale de compétence des départements et des régions, l'encadrement de leurs possibilités de financement des projets communaux et intercommunaux, les nouvelles règles de coopération entre collectivités, la faculté de délégation de compétences entre collectivités territoriales.

Par ailleurs, il est à noter que la loi habilite le Gouvernement à adapter certaines de ses dispositions par voie d'ordonnances pour les départements et régions d'outre-mer.

I - La rénovation de l'exercice de la démocratie locale

A - L'instauration des nouveaux conseillers territoriaux

Issue directement des propositions du comité "Balladur", la création, controversée, des conseillers territoriaux, est certainement l'un des points clés de la réforme. Cette disposition, qui consacre le maintien des départements et ne remet pas en cause la dualité département/région et l'autonomie de chaque collectivité territoriale, comme l'a souligné le Conseil constitutionnel dans sa décision du 9 décembre 2010, permet, néanmoins, de réduire le nombre d'élus locaux (environ 3 500 au lieu de 6 000 selon les sources de la direction générale des collectivités locales (DGCL)). Elle doit aussi permettre aux élus, selon les promoteurs de la loi, d'avoir une vision à la fois de proximité au niveau départemental et plus stratégique au niveau régional.

Elus au scrutin uninominal majoritaire à deux tours, sur la base des cantons qui doivent du reste être redéfinis, les conseillers territoriaux assureront donc une double fonction représentative au sein des conseils généraux et régionaux (article 1er de la loi). Ils seront renouvelés intégralement tous les six ans, mettant ainsi fin au renouvellement triennal qui prévalait jusqu'alors pour les départements. Ce nouveau mode de désignation doit intervenir pour la première fois en 2014 ce qui impliquait d'harmoniser le terme des mandats actuels, ce qui a été fait à travers la loi du 16 février 2010, organisant la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux (7).

Le Conseil constitutionnel a validé ce dispositif, hormis la répartition démographique des conseillers territoriaux dans chaque département compte tenu des écarts de représentation de population de certains départements au sein des régions "dans une mesure manifestement disproportionnée". Cette décision implique qu'une nouvelle loi soit prochainement débattue par le Parlement afin de définir une nouvelle répartition du nombre des conseillers territoriaux. Parallèlement, il est à noter que les dispositions de l'article 81 de la loi modifient le régime de l'aide publique aux partis et groupements politiques avec une fraction accordée en fonction des résultats aux élections des conseillers territoriaux et assimilés en intégrant l'objectif d'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et aux fonctions électives.

B - L'élection des conseillers communautaires

Les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre (nouvelles métropoles, communautés urbaines, communautés d'agglomération et communautés de communes) qui assurent un rôle essentiel dans la vie locale vont désormais trouver une nouvelle légitimité à travers la désignation des délégués au sein de leur organe délibérant par le biais du suffrage universel direct.

Ce dispositif, issu d'une nouvelle rédaction de l'article L. 5211-6 du Code général des collectivités territoriales (N° Lexbase : L1925GUT) (article 8 de la loi), avait déjà évoqué à la suite de la loi "Chevènement", notamment dans le cadre du projet de loi relatif à la démocratie de proximité de 2002, mais avait subi des atermoiements. Il demeurait, néanmoins, incontournable compte tenu de la montée en puissance des intercommunalités dans le paysage institutionnel français. Il se trouve donc consacré par la loi du 16 décembre 2010 et sera mis en oeuvre dès les prochaines élections de 2014 (article 83 de la loi).

Plusieurs aménagements ont été édictés. En premier lieu, cette désignation va intervenir dans le cadre de l'élection municipale. Ainsi que l'énonce la brochure rédigée par la DGCL (La réforme des collectivités territoriales : une nouvelle impulsion pour les territoires) : "L'élection au suffrage universel direct des conseillers intercommunaux se fera par un système de 'fléchage', et ce dès les élections municipales de 2014. Il s'agit bien de conforter la légitimité des communes et non de créer une légitimité concurrente, ce qui aurait été le cas si le principe d'une élection autonome avait été retenu". Cette disposition vise cependant les communes dont le conseil municipal est élu au scrutin de liste, ce qui devra être combiné avec les dispositions du projet de loi relatif à l'élection des conseillers territoriaux et au renforcement de la démocratie locale qui prévoit, en l'état actuel, d'abaisser ce seuil jusqu'aux communes de 500 habitants. Dans les communes de moins de 500 habitants, la désignation des délégués procédera directement du conseil municipal.

Par ailleurs, la loi prévoit, pour les communes membres d'une communauté d'agglomération ou d'une communauté de communes ne disposant que d'un délégué, la désignation obligatoire d'un suppléant avec voix délibérative en cas d'absence du titulaire, s'il n'a pas donné de procuration, ce qui participe à l'évidence d'une bonne administration. En cas de scrutin de liste, ce suppléant doit être de sexe différent du titulaire.

Pour les EPCI sans fiscalité propre, les règles actuelles demeurent avec la désignation de délégués par les conseils municipaux des communes membres, dans les conditions fixées à l'article L. 2122-7 du Code général des collectivités territoriales (N° Lexbase : L1318IEK). Ce principe créé, ainsi, un système "à deux vitesses" qui témoigne de la prévalence des formes de coopération intercommunale intégrées (article 8 de la loi). Pour des raisons pratiques, ce système de désignation s'applique aussi aux EPCI à fiscalité propre créés ou étendus entre deux renouvellements généraux de conseillers municipaux avec des adaptations (article 9-VII de la loi).

C - La nouvelle composition des organes délibérants des EPCI

L'article 9 affirme, tout d'abord, un principe général de représentation des territoires sur une base démographique. Il encadre ensuite les conditions de détermination du nombre et la répartition des sièges au sein des EPCI à travers les deux nouveaux articles L. 5211-6-1 (N° Lexbase : L9104INI) et L. 5211-6-2 (N° Lexbase : L9103INH) du Code général des collectivités territoriales. Ces dispositions ne font pas préjudice des dispositions spécifiques applicables aux syndicats de communes et, par extension, aux syndicats mixtes "fermés". Elles prévoient tout d'abord, pour les communautés de communes et d'agglomération, que le nombre et la répartition des sièges sont décidés à la majorité qualifiée des communes intéressés dans le respect de certains principes, notamment d'un nombre maximal de sièges fixé par la loi, de l'obligation pour chaque commune de disposer d'au moins un siège et pour aucune de disposer de plus de la moitié, ce qui tend à limiter les risques d'exclusion et d'hégémonie. En l'absence d'accord, les dispositions applicables qui prévalent sont celles applicables aux communautés urbaines et aux nouvelles métropoles.

Pour celles-ci, la loi fixe directement le nombre de sièges variant par strate de population totale de l'établissement avec des possibilités d'ajustement. En ce qui concerne la répartition des sièges, la loi fixe un principe de représentation proportionnelle avec l'obligation pour chaque commune de disposer d'un siège. En revanche, les communes peuvent décider de fixer, pour une commune, un nombre de sièges supérieur à la moitié des sièges, sous certaines conditions, ce qui peut permettre dans certains cas de mieux correspondre aux réalités territoriales et d'assurer une gouvernance plus cohérente, mais au risque d'une hégémonie qui impliquera sans doute des contreparties.

Prenant acte de ces nouvelles règles définies directement par la loi, les statuts des EPCI n'ont plus à mentionner, notamment, les modalités de répartition des sièges et le nombre de sièges attribué à chaque commune membre, selon la nouvelle rédaction de l'article L. 5211-5-1 du Code général des collectivités territoriales (N° Lexbase : L9266INI).

Selon les dispositions de l'article 9-VII de la loi, les délibérations à intervenir pour fixer le nombre et la répartition des sièges devront être adoptées avant le 30 juin 2013, le préfet devant en prendre acte au plus tard le 30 septembre de la même année. En cas de création nouvelle d'un EPCI, ces délibérations s'effectuent en même temps que celles relatives au projet de périmètre. La loi précise aussi les conditions d'application de ces dispositions en cas d'extension, de transformation et de fusion des EPCI. Des aménagements pratiques sont prévus dans la période comprise entre deux renouvellements généraux des conseils municipaux. Par ailleurs, les dispositions de l'article 83 de la loi prévoient que les nouvelles règles concernant la composition des organes des EPCI existants ou cours de constitution ne s'appliqueront qu'au prochain renouvellement général des conseils municipaux.

D - La nouvelle composition des bureaux des EPCI

La composition des bureaux des EPCI est modifiée par une nouvelle rédaction de l'article L. 5211-10 du Code général des collectivités territoriales (N° Lexbase : L9265INH). La loi opère un plafonnement du nombre de vice-présidents fixé à 20 % de l'effectif total de l'organe délibérant avec un maximum de 15 vice-présidents, ce qui rend compte de la volonté de limiter les effectifs, le seuil étant jusqu'alors fixé à 30 %. Pour les petites communautés, la loi garantit un minimum de 4 vice-présidents.

II - L'adaptation des structures à la diversité des territoires

La loi du 16 décembre 2010 crée des nouvelles formes de coopération intercommunale qui permettront sans doute de mieux répondre aux enjeux de développement local et de coopération intercommunale. Mais au risque aussi d'une plus grande complexité, ces nouveaux EPCI venant s'ajouter au "mille-feuille territorial" décrié par les partisans de la simplification administrative.

A - Les métropoles

Définition

Sans remettre en cause l'existence des communautés urbaines, l'article 12 de la loi introduit un nouvel article L. 5217-1 dans le Code général des collectivités territoriales ([LXB=L9169INW ]) ayant pour objet de créer des grandes agglomérations rayonnant à l'échelle européenne, les métropoles, destinées à "améliorer la compétitivité et la cohésion" des territoires concernés. Ce dispositif ne s'applique pas à la région d'Ile-de-France qui est régie à travers la constitution du Grand Paris. Les métropoles constituent une nouvelle catégorie d'EPCI à fiscalité propre regroupant plusieurs communes d'un seul tenant et sans enclave et qui s'associent pour élaborer et conduire ensemble "un projet d'aménagement et de développement économique, écologique, éducatif, culturel et social de leur territoire".

La condition de continuité territoriale n'est, cependant, pas exigée pour la création d'une métropole dont le périmètre intègre celui d'une communauté d'agglomération créée avant le 1er janvier 2000 et ayant déjà bénéficié de dispositions dérogatoires à ce titre. De manière incitative, les dispositions de l'article 16 de la loi prévoient aussi la possibilité de constituer une métropole comportant une enclave ou une discontinuité territoriale pendant un délai de un an à compter de la publication de la loi, et à condition que l'ensemble des communes soit déjà membres d'un EPCI à fiscalité propre.

La métropole doit être constituée sur un territoire d'un minimum de 500 000 habitants (sauf pour les anciennes communautés urbaines créées par la loi n° 66-1069 du 31 décembre 1966 (8)). Ce seuil relativement haut limite de ce fait le nombre de territoires susceptibles d'être concernés, ce que d'aucun considère comme un manque pour les grandes agglomérations qui n'ont pas encore atteint ce seuil, mais incite aussi à élargir la base territoriale des EPCI existants pour bénéficier de ce statut. La création de la métropole n'est en principe pas obligatoire. Elle est créée soit ex nihilo, soit dans le cadre d'une transformation d'un EPCI à fiscalité propre, avec ou sans extension de périmètre, soit dans le cadre d'une fusion d'EPCI.

La création de la métropole peut être décidée par décret après consultation des départements et des régions et accord des conseillers municipaux des communes concernées dans les conditions prévues à l'article L. 5211-5 du Code général des collectivités territoriales (N° Lexbase : L9267INK). Une fois créée, la métropole se substitue aux EPCI inclus en totalité dans son périmètre dans des conditions définis à l'article L. 5217-5 du même code (N° Lexbase : L9165INR), ce qui constitue aussi une mesure de simplification administrative. Le régime juridique d'organisation et de fonctionnement emprunte ensuite, pour l'essentiel, aux règles des communautés urbaines avec des spécificités concernant notamment les règles budgétaires et comptables.

Compétences

Initialement, la métropole a été conçue comme une collectivité de plein exercice regroupant à la fois les compétences intercommunales et départementales. Aujourd'hui, même si la loi a revu ce statut à la baisse, elle consacre des évolutions significatives par rapport aux formules classiques de coopération intercommunale.

Au niveau du transfert des compétences communales, le régime de la métropole reste assez proche de celui de la communauté urbaine, avec quelques nuances. Elle s'appuie dans de nombreux cas sur la notion d'intérêt métropolitain.

La différence se situe donc surtout au niveau des compétences départementales, régionales et même étatiques que peut intégrer la métropole afin de conforter son rôle structurant dans l'évolution des principales aires urbaines du territoire national. En premier lieu, la métropole intègre de plein droit dans son périmètre au lieu et place du département les compétences de celui-ci en matière de transports scolaires, de voirie, de zones d'activités et de promotion économique à l'étranger et au lieu et place de la région cette dernière compétence.

En outre, et conventionnellement, sur demande de la métropole, celle-ci peut exercer dans son périmètre au lieu et place du département des compétences en matière, notamment d'actions sociales, d'investissement et de fonctionnement des collèges, de développement économique, d'action dans le domaine du tourisme, de la culture, et des équipement et infrastructures sportives. Il en est de même en ce qui concerne les compétences des régions en matière d'investissement et de fonctionnement des lycées et de développement économique. La loi prévoit que la convention doit être signée dans un délai de 18 mois à compter de la demande, sans pour autant régler explicitement l'hypothèse d'un désaccord faisant suite à la demande de la métropole, ce qui sera sujet à interprétation compte tenu de l'importance des enjeux.

En tout état de cause, cette prise de compétence sur le territoire des départements et de la région nécessitera sans doute une bonne gestion afin de définir des articulations adéquates entre les politiques territoriales qui seront conduites dans le même domaine, par les métropoles, les départements et les régions. Par ailleurs, sur demande de la métropole, l'Etat peut transférer par décret la responsabilité des grands équipements et infrastructures. Il s'agit là d'une simple faculté.

Moyens

L'article 12 de la loi règle dans le détail les conditions transfert des biens, droits et obligations et personnels lorsque la métropole exerce de plein droit ses compétences au lieu et place des collectivités concernées. Ces transferts s'inspirent du droit commun mais avec quelques aménagements concernant notamment le transfert patrimonial des biens et des droits, et des personnels et la détermination des délais correspondants. En ce qui concerne les personnels, il est prévu qu'aucun emploi territorial permanent ne peut être créé dans le délai de trois ans suivant le transfert de tout ou partie des services, à besoin constant.

Concernant le transfert des compétences des départements et de la région, les dispositions nouvelles des articles L. 5217-14 (N° Lexbase : L9156ING) et suivants du Code général des collectivités territoriales énoncent un principe de transfert par ses collectivités territoriales des ressources équivalentes aux dépenses effectuées à la date du transfert, au titre des compétences concernées, par une dotation de compensation versée annuellement. Le transfert des ressources, qui sera sans doute l'objet de discussions sensibles, fait l'objet d'une évaluation par une commission locale, étant précisé qu'à défaut d'accord de celle-ci la loi fixe directement les règles applicables pour la détermination du droit à compensation au profit de la métropole.

B - L'élargissement des communautés urbaines et des communautés d'agglomération

Les dispositions des articles 18 et 19 de la loi abaissent les seuils de création des communautés urbaines à 450 000 habitants et celui des communautés d'agglomération à 30 000 sous certaines conditions, notamment d'intégration d'un chef lieu de département. Ces dispositions procèdent, elles aussi, de la volonté de renforcement de l'intercommunalité qui inspire la loi.

C - Les nouveaux pôles métropolitains

Les dispositions de l'article 20 de la loi instaurent aux articles L. 5731-1 (N° Lexbase : L9222INU) et suivants du Code général des collectivités territoriales une nouvelle forme de coopération intercommunale, hors région d'Ile-de-France, dénommée "pôle métropolitain".

Absents du projet de loi initial, ces pôles métropolitains ont été conçus à l'initiative de parlementaires pour combler l'absence d'outils de renforcement de la coopération intercommunale sur les territoires n'atteignant pas le seuil de la métropole et pour favoriser la coopération entre des grands pôles urbains déjà constitués. Ils demeurent facultatifs et reposent donc sur le volontariat. Ils ne peuvent, cependant, être créés que sur un territoire de plus de 300 000 habitants comportant un EPCI de plus de 150 000 habitants, sauf dérogation pour les pôles limitrophes d'un Etat étranger. Hormis ce dernier cas, la loi ne prévoit pas de conditions tenant à la continuité territoriale entre les EPCI membres, ce qui tend à favoriser la mise en oeuvre de dispositifs collaboratifs multipolaires au sein des aires urbaines concernées.

Ces pôles métropolitains prennent la forme de syndicats mixtes. Ils sont composés exclusivement d'EPCI à fiscalité propre et se superposent donc à ces derniers, ce qui ne simplifie pas évidemment l'organisation administrative. Ils sont créés sur la base d'un accord entre les EPCI concernés en vue "d'actions d'intérêt métropolitain en matière de développement économique, de promotion de l'innovation, de la recherche, de l'enseignement supérieur et de la culture, d'aménagement de l'espace par la coordination des SCOT correspondant à leur territoire et de développement de structures et de services de transports". Dans ce cadre, ils peuvent se voir transférer des compétences dans des domaines d'intérêt métropolitain, par délibérations concordantes de chaque EPCI, étant précisé que la loi ne prévoit directement aucune consultation des communes membres des EPCI constituant le pôle métropolitain. Ils fonctionnent selon les règles des syndicats mixtes fermés visées à l'article L. 5711-1 du Code général des collectivités territoriales (N° Lexbase : L1911GUC), hormis la répartition des sièges des assemblées délibérantes qui doivent tenir compte du poids démographique de chacun de membres selon les règles fixées dans le statuts, étant précisé que chaque membre doit disposer d'un siège et qu'aucun ne peut disposer de plus de la moitié.

D - Les communes nouvelles

Création

L'article 21 de la loi rénove l'ancien régime de fusion des communes issue de la loi "Marcellin" (9) par la possibilité de création de communes nouvelles regroupant et se substituant à des communes contiguës et, le cas échéant, se substituant à l'EPCI dont elles forment le périmètre.

Le régime des communes nouvelles défini par les articles L. 2113-1 (N° Lexbase : L9191INQ) et suivants du Code général des collectivités territoriales prévoit, tout d'abord, une procédure de création par arrêté préfectoral résultant de la demande, soit de tous les conseils municipaux concernés, soit de leur majorité qualifiée, soit de l'organe délibérant d'un EPCI à fiscalité propre (pour qu'elle se substitue à celui-ci, mais la création nécessite alors l'accord à la majorité qualifiée des communes concernées), soit du préfet dans le département (sous condition là encore, pour la création de la commune nouvelle, d'un accord à la majorité qualifiée des communes intéressées). Il est à noter qu'en l'absence de demande concordante de l'ensemble des conseils municipaux, il est, également, nécessaire de procéder à la consultation des électeurs, lesquelles doivent participer et donner leur accord, dans chaque commune, dans des conditions de majorité définies par la loi. La création d'une commune nouvelle demeure donc subordonnée à un accord notamment de chaque commune concernée.

Lorsque la commune nouvelle est instaurée en lieu et place de communes appartenant à un même EPCI à fiscalité propre, sa création emporte suppression de cet EPCI. Par ailleurs, selon des mécanismes classiques propres à assurer la continuité administrative, la loi prévoit que cette création emporte reprise par la commune nouvelle des biens, des actes, des personnels, des droits et obligations de l'EPCI supprimé et des communes dont elle est issue. Dans l'hypothèse où une commune nouvelle est issue de communes membres d'EPCI à fiscalité propre distincts, son organe délibérant doit définir dans le mois de sa création celui auquel elle souhaite être rattachée. Si le représentant de l'Etat est en désaccord, la commission interdépartementale de coopération intercommunale (CDCI) doit donner son accord à la majorité qualifiée, à défaut de quoi c'est la solution du préfet qui s'applique. Cette règle ne s'applique, cependant, pas si l'une des anciennes communes est membres d'une communauté urbaine ou d'une métropole car dans ce cas, le rattachement se fait obligatoirement à celle-ci.

A titre transitoire, jusqu'au prochain renouvellement général des conseils municipaux, le préfet fixe directement la composition du conseil municipal de la commune nouvelle dans les conditions définies par la loi à partir des membres des anciens conseils municipaux et dans le respect d'un principe de représentation proportionnelle au nombre des électeurs inscrits.

Par ailleurs, il est prévu que l'adhésion de la commune nouvelle à un EPCI à fiscalité propre peut intervenir à compter du 1er janvier de la deuxième année suivant sa création quand elle réunit toutes les communes membres d'EPCI, ou qu'elle a été créée à partir de toutes les communes membres d'un EPCI et de communes non membres d'un EPCI.

Organisation et fonctionnement

La commune nouvelle a seule la qualité de collectivité territoriale. Elle est soumise au même régime que les communes. Elle bénéficie de la fiscalité communale et perçoit les différentes parts de dotations forfaitaires des communes et de leurs dotations de péréquation. Selon les dispositions de l'article L. 2214-2 du Code général des collectivités territoriales (N° Lexbase : L9195INU), elle conserve le bénéfice du régime de la police d'Etat dans le cas où il s'appliquait à, au moins, une des anciennes communes.

Concernant son organisation, la loi prévoit, sauf délibération contraire, l'instauration dans les six mois de sa création de communes déléguées correspondant aux anciennes communes, dotées de mairies annexes et d'un maire délégué qui assure les fonctions d'officier d'état civil et d'officier de police judiciaire, et qui peut être chargé de l'exécution des lois et règlements de police et recevoir délégation du maire de la commune nouvelle. Le conseil municipal de la commune nouvelle peut décider à la majorité qualifiée de ses membres la création de conseils délégués dans une ou plusieurs communes déléguées. Il peut, également, désigner parmi ses membres un ou plusieurs adjoints au maire délégués dans les limites fixées par la loi. Le maire et les adjoints délégués disposent de prérogatives semblables à celles des maires et conseils d'arrondissement applicables aux villes de Paris, Lyon, Marseille.

Parallèlement, le régime ancien des communes associées continue à s'appliquer aux communes qui ont fusionné sur la base de ce dernier, sauf décision de leur organe délibérant de se voir appliquer le nouveau régime d'organisation et de fonctionnement des communes nouvelles. Par ailleurs, jusqu'au 31 décembre 2011, le retour à l'autonomie des commune associée peut être prononcé sous certaines conditions, par le préfet du département après consultation des électeurs concernés, dans le cadre de l'appartenance à un EPCI à fiscalité propre (article 25 de la loi).

E - La possibilité d'évolution des départements et des régions

Faisant suite à la revendication de certains élus, la loi prévoit la possibilité de regroupement et de modification des limites territoriales des départements et des régions.

En premier lieu, la loi instaure ainsi une possibilité de regroupement de plusieurs départements formant un territoire d'un seul tenant dans les conditions fixées par l'article L. 3114-1 du Code général des collectivités territoriales (N° Lexbase : L9109INP). Ce regroupement est sollicité par délibérations concordantes des conseils généraux avec le cas échéant consultation du comité de massif visé par la "loi montagne" du 9 janvier 1985 (10). Pour favoriser le débat à ce titre, la loi prévoit que cette demande de regroupement peut être inscrite à l'ordre du jour des assemblées à l'initiative d'une part minoritaire de ses membres. Le projet de regroupement est soumis au vote des électeurs et le projet ne peut trouver d'issue favorable que s'il recueille dans chaque département concerné, l'accord de la majorité absolue des suffrages exprimés correspondant au moins au quart des électeurs inscrits. Le regroupement est alors décidé par décret en Conseil d'Etat. Dans des conditions similaires, les dispositions de l'article L. 4123-1 du Code général des collectivités territoriales (N° Lexbase : L9111INR) donnent, également, la possibilité à plusieurs régions formant un territoire d'un seul tenant sans enclave de se regrouper.

De manière analogue, les dispositions de l'article L. 4122-1 (N° Lexbase : L8229AAZ) donnent la possibilité à un département et à deux régions contiguës de solliciter une modification des limites régionales visant à inclure le département dans une région qui lui est limitrophe. Les dispositions de l'article L. 4124-1 du même code (N° Lexbase : L9112INS) prévoient, également, la possibilité de fusion en une collectivité unique d'une région et des départements qui la composent. Le sort du projet de fusion dépend alors du choix des électeurs de chacun des départements concernés et la fusion ne peut être décidée que par la loi.

Nous vous invitons à poursuivre l'étude de la loi de réforme des collectivités territoriales en découvrant une seconde partie qui se penchera, notamment, sur l'achèvement et la rationalisation de la carte intercommunale d'ici à juin 2013 et sur la suppression de la clause générale de compétence des départements et des régions en 2015 (lire N° Lexbase : N0482BRB).


(1) Loi n° 82-213 du 2 mars 1982, relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions (N° Lexbase : L7770AIM).
(2) Loi n° 83-8 du 7 janvier 1983, relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat (N° Lexbase : L4726AQ4).
(3) Loi n° 99-586 du 12 juillet 1999, relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale (N° Lexbase : L1827ASH).
(4) Loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003, relative à l'organisation décentralisée de la République (N° Lexbase : L8035BB9).
(5) Loi n° 2004-809 du 13 août 2004, relative aux libertés et responsabilités locales (N° Lexbase : L0835GT4).
(6) Loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010, de réforme des collectivités territoriales (N° Lexbase : L9056INQ).
(7) Loi n° 2010-145 du 16 février 2010, organisant la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux (N° Lexbase : L5725IG7).
(8) Loi n° 66-1069 du 31 décembre 1966, relative aux communautés urbaines (N° Lexbase : L1057IPT).
(9) Loi n° 71-588 du 16 juillet 1971, sur les fusions et regroupements de communes (N° Lexbase : L8745IEM).
(10) Loi n° 85-30 du 9 janvier 1985, relative au développement et à la protection de la montagne (N° Lexbase : L7612AGZ).

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