Lexbase Droit privé n°341 du 12 mars 2009 : Baux commerciaux

[Textes] Réforme du droit des entreprises en difficulté et modification des règles relatives à la continuation des baux commerciaux

Réf. : Ordonnance n° 2008-1345 du 18 décembre 2008, portant réforme du droit des entreprises en difficulté (N° Lexbase : L2777ICT) ; décret n° 2009-160 du 12 février 2009, pris pour l'application de l'ordonnance n° 2008-1345 (N° Lexbase : L9187ICA)

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par Julien Prigent, Avocat à la cour d'appel de Paris

le 07 Octobre 2010

L'ordonnance n° 2008-1345 du 18 décembre 2008, portant réforme du droit des entreprises en difficulté (1), a apporté des modifications aux dispositions générales relatives au sort des contrats en cours lors de l'ouverture d'une procédure collective à l'égard de l'un des cocontractants, ainsi qu'aux dispositions spécifiques à la continuation des baux affectés à l'activité du débiteur qui fait l'objet d'une telle procédure. La coordination de ces deux régimes avait suscité des interrogations à la suite de la réforme issue de la loi de sauvegarde des entreprises (loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 N° Lexbase : L0828HDZ) (2). L'ordonnance n° 2008-1345 du 18 décembre 2008 a eu, notamment, pour objectif de préciser leur articulation. I - Le sort des contrats en cours : régime général

L'article L. 622-13 du Code de commerce (C. com., art. L. 622-13, anc. N° Lexbase : L3872HBZ) a été remanié dans sa structure, même si les nouvelles dispositions (C. com., art. L. 622-13, nouv. N° Lexbase : L3352IC7) reprennent, pour l'essentiel, les anciennes mais dans un ordre plus cohérent. Il a été divisé en six parties, la première relative à l'absence de résiliation de plein droit du fait de l'ouverture d'une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire, la deuxième concerne la possibilité pour l'administrateur de continuer les contrats en cours et les obligations qui en découlent, la troisième envisage les cas de résiliation de plein droit du contrat en cours, la quatrième, dont les dispositions sont nouvelles, accorde sous certaines conditions à l'administrateur la faculté de solliciter le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat en cours, la cinquième reconnaît au créancier la possibilité de se voir octroyer des dommages et intérêts en cas de résiliation et la sixième exclut certains contrats du régime général de la continuation des contrats en cours.

Il a été créé un nouvel article L. 641-11-1 dans le Code de commerce (N° Lexbase : L3298IC7) relatif au régime général de la continuation des contrats en cours dans le cadre d'une liquidation, qui reprend, avec des aménagements, les règles générales applicables aux contrats en cours en sauvegarde et en redressement. Si la Cour de cassation avait pu juger que ces dispositions, dans leur ancienne rédaction, étaient applicables en liquidation (Cass. com., 15 février 2005, n° 03-17.604, FS-P+B N° Lexbase : A7397DG3), la loi nouvelle a le mérite de fixer cette solution tout en l'adaptant.

A - Le maintien du bail commercial en cas d'ouverture d'une procédure collective

Les dispositions selon lesquelles "nonobstant toute disposition légale ou toute clause contractuelle, aucune indivisibilité, résiliation ou résolution du contrat ne peut résulter du seul fait de l'ouverture d'une procédure de sauvegarde" ont été reprises dans le nouvel article L. 622-13 du Code de commerce quasiment à l'identique. Seule la précision selon laquelle le contrat concerné par ces dispositions est un "contrat en cours" a été ajoutée, probablement en raison du fait que cet alinéa a été placé en tête du nouvel article L. 622-13 du Code de commerce alors que, dans leur ancienne version, ces dispositions constituaient le dernier alinéa de ce texte.

Cette règle est applicable dans le cadre d'un redressement judiciaire (C. com., art. L. 631-14, nouv. N° Lexbase : L3321ICY).

En matière de liquidation judiciaire, le nouvel article L. 641-11-1 prévoit expressément que "nonobstant toute disposition légale ou toute clause contractuelle, aucune indivisibilité, résiliation ou résolution d'un contrat en cours ne peut résulter du seul fait de l'ouverture ou du prononcé d'une liquidation judiciaire".

L'ouverture d'une procédure collective à l'égard de l'une des parties à un bail commercial en cours à la date du jugement d'ouverture ne peut donc entraîner, nonobstant toutes clauses contraires, la résiliation ou la résolution de ce contrat. L'article L. 145-45 du Code de commerce (N° Lexbase : L5773AIN), applicable aux baux soumis au statut des baux commerciaux, prévoit des dispositions analogues dans l'hypothèse où le preneur fait l'objet d'une procédure collective : "le redressement et la liquidation judiciaires n'entraînent pas, de plein droit, la résiliation du bail des immeubles affectés à l'industrie, au commerce ou à l'artisanat du débiteur, y compris les locaux dépendant de ces immeubles et servant à son habitation ou à celle de sa famille. Toute stipulation contraire est réputée non écrite".

Les dispositions selon lesquelles le cocontractant doit remplir ses obligations malgré le défaut d'exécution par le débiteur d'engagements antérieurs ont été reprises, tant à l'article L. 622-13 qu'à l'article L. 641-11-1 du Code de commerce.

B - L'option de l'organe de la procédure compétent sur la continuation du contrat en cours

Le régime de la continuation du contrat en cours, et le rôle de l'administrateur à cet égard, est également prévu par l'article L. 622-13 du Code de commerce. Ce dernier texte a été remanié dans sa structure, mais les nouvelles dispositions sont quasiment identiques aux anciennes.

L'administrateur, seul, dispose toujours de la faculté d'exiger l'exécution des contrats en cours en fournissant la prestation promise au cocontractant du débiteur. Cette règle, prévue par l'article L. 622-13 du Code de commerce pour la procédure de sauvegarde, est également applicable en matière de redressement judiciaire (C. com., art. L. 631-14, nouv.). En présence d'une procédure de sauvegarde sans administrateur, à l'instar de ce de qui était précédemment prévu (C. com., art. L. 627-2, anc. N° Lexbase : L4086HBX), c'est le débiteur qui exerce la faculté ouverte à l'administrateur de poursuivre les contrats en cours après avis conforme seulement du mandataire judiciaire (C. com., art. L. 627-2, nouv. N° Lexbase : L3403ICZ). Il doit être noté que l'article L. 627-2 du Code de commerce a, néanmoins, été modifié, afin de conférer au débiteur la faculté de demander la résiliation du bail en application de l'article L. 622-14 de ce code (voir ci-après).

Dans le cadre des liquidations ouvertes à compter du 1er janvier 2006, mais avant le 15 février 2009, la faculté d'exiger l'exécution des contrats en cours et les prérogatives de l'administrateur prévues à l'article L. 622-13 du Code de commerce était conférée au liquidateur par l'ancien article L. 641-10 du Code de commerce (N° Lexbase : L3952HBY). Le nouvel article L. 641-10 du Code de commerce (N° Lexbase : L5799ICR) n'a pas repris, sur ce point, les dispositions de l'ancienne version de ce texte. Désormais, le pouvoir du liquidateur quant à la continuation des contrats en cours est régi par le nouvel article L. 641-11-1 du Code de commerce, qui reprend, à quelques aménagements près, les dispositions du nouvel article L. 622-13 du Code de commerce. Il confère au seul liquidateur la faculté d'exiger l'exécution des contrats en cours en fournissant la prestation due au cocontractant. Toutefois, si un administrateur judiciaire a été désigné dans le cadre d'une liquidation judiciaire, l'administrateur exercera les prérogatives conférées au liquidateur par, notamment, l'article L. 641-11-1 du Code de commerce (C. com., art. L. 641-10, nouv.). Dans son ancienne rédaction, l'article L. 641-10 du Code de commerce précisait simplement que, dans cette hypothèse, l'administrateur "était soumis aux dispositions de l'article L. 622-13".

Tant l'administrateur que, désormais, le liquidateur, devront, s'ils décident de la poursuite du contrat, fournir la prestation promise au cocontractant du débiteur et, s'il s'agit du paiement d'une somme d'argent, ce paiement devra se faire au comptant, sauf accord du débiteur. L'administrateur ou le liquidateur devra s'assurer qu'au moment où il demande l'exécution, il disposera des fonds nécessaires à cet effet. Ils devront mettre fin au contrat à exécution ou paiement échelonnés (qualification que pourrait recevoir un bail commercial), notamment s'il leur apparaît qu'ils ne disposeront pas des fonds nécessaires pour remplir les obligations du terme suivant.

C - La résiliation de plein droit

Le nouvel article L. 622-13 du Code de commerce reprend les deux cas de résiliation de plein droit du contrat en cours prévus sous l'empire de l'ancienne rédaction en les réunissant sous un unique paragraphe III :
1. Après une mise en demeure de prendre parti sur la poursuite du contrat adressée par le cocontractant à l'administrateur et restée plus d'un mois sans réponse. Avant l'expiration de ce délai, le juge-commissaire peut impartir à l'administrateur un délai plus court ou lui accorder une prolongation, qui ne peut excéder deux mois, pour se prononcer ;
2. A défaut de paiement dans les conditions définies au II de l'article L. 622-13 du Code de commerce (fourniture de la prestation promise au cocontractant du débiteur et paiement au comptant s'il s'agit d'une somme d'argent) et d'accord du cocontractant pour poursuivre les relations contractuelles.

L'ordonnance n° 2008-1345 du 18 décembre 2008 a, néanmoins, apporté une précision concernant la mise en demeure adressée à l'administrateur : la mise en demeure est celle "d'avoir à prendre parti sur la poursuite du contrat" et elle est adressée par "le cocontractant".

Il faut, également, noter qu'en présence d'une procédure de sauvegarde sans administrateur, le nouvel article R. 627-2 du Code de commerce (N° Lexbase : L9345IC4) a repris les dispositions du texte dans son ancienne version (N° Lexbase : L0983HZG) relatives aux modalités selon lesquelles le cocontractant met en demeure le débiteur d'avoir à opter sur la poursuite du contrat et les conséquences de cette mise en demeure. Ce texte prévoit qu'en l'absence d'administrateur, le cocontractant adresse au débiteur la mise en demeure prévue à l'article L. 622-13, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Il doit en informer simultanément le mandataire judiciaire en lui adressant copie de cette mise en demeure par lettre recommandée avec demande d'avis de réception et ce dernier doit, sans délai, faire part de son avis au débiteur et au cocontractant. A défaut de réponse du mandataire dans le délai de quinze jours à compter de la réception par le débiteur de la mise en demeure, ce dernier peut saisir le juge-commissaire, saisine qui suspend le délai de réponse prévu à l'article L. 622-13. Le nouveau texte prévoit, en outre désormais, que le greffier doit aviser le cocontractant de cette saisine et de son effet suspensif.

Les deux cas de résiliations de plein droit visés à l'article L. 622-13 du Code de commerce, applicables en matière de sauvegarde et de redressement judiciaires, auront désormais vocation à s'appliquer expressément en matière de liquidation judiciaire aux termes du nouvel article L. 641-11-1 du Code de commerce, la mise en demeure devant, dans ce cas, être adressée au liquidateur, sauf si un administrateur a été désigné (C. com., art. L. 641-10, nouv.).

Le nouvel article L. 641-11-1 du Code de commerce a créé, en outre, un troisième cas de résiliation de plein droit propre à la liquidation : lorsque la prestation du débiteur porte sur le paiement d'une somme d'argent, au jour où le cocontractant est informé de la décision du liquidateur de ne pas poursuivre le contrat.

Il avait été jugé, sous l'empire de l'ancien article L. 622-28 du Code de commerce (N° Lexbase : L7023AIX), encore applicable aux procédures ouvertes avant le 1er janvier 2006, qu'à défaut de mise en demeure, la décision de l'organe compétent de ne pas poursuivre le contrat n'entraînait pas la résiliation de plein droit mais conférait seulement au cocontractant le droit de la faire prononcer en justice (Cass. com., 19 mai 2004, n° 01-13.542, FS-P+B+I N° Lexbase : A2479DCS (3)).

Enfin, les dispositions de l'ancien article R. 622-13 du Code de commerce (N° Lexbase : L0885HZS), qui accordaient au juge-commissaire le pouvoir de constater la résiliation de plein droit des contrats, ainsi que la date de cette résiliation, dans les cas prévus à l'article L. 622-13 de ce code, ont été reconduites mais adaptées à la nouvelle rédaction de ce dernier texte (C. com., art. R. 622-13, nouv. N° Lexbase : L9319IC7). L'article R. 622-13 du Code de commerce issu du décret du 12 février 2009 comporte, en outre, un nouvel alinéa relatif au nouveau cas de résiliation judiciaire prévu au nouvel article L. 622-13 (voir ci-après). Des dispositions analogues sont désormais applicables en matière de liquidation judiciaire (C. com., art. R. 641-21, nouv. N° Lexbase : L9312ICU).

D - La résiliation judiciaire

Les nouveaux articles L. 622-13 et L. 641-11-1 du Code de commerce comportent une disposition nouvelle.

Aux termes du paragraphe IV de ces articles, et respectivement, l'administrateur et le liquidateur peuvent saisir le juge-commissaire pour qu'il prononce la résiliation du contrat si elle est nécessaire à la sauvegarde du débiteur et qu'elle ne porte pas une atteinte excessive aux intérêts du cocontractant. Est exclu, cependant, en matière de liquidation, le cas où la prestation du débiteur est une somme d'argent car, dans ce cas, en application du 3° du paragraphe III de l'article L. 641-11-1 du Code de commerce, le liquidateur peut décider de la résiliation de plein droit du contrat.

Le nouvel article R. 622-13 du Code de commerce comporte un nouvel alinéa qui prévoit que la demande de résiliation présentée par l'administrateur, en application du paragraphe IV précité, est formée par requête adressée ou déposée au greffe. Dans ce cas, et toujours selon le nouvel article R. 622-13 du Code de commerce, le greffier convoque le débiteur et le cocontractant par lettre recommandée avec demande d'avis de réception et avise l'administrateur de la date d'audience. Des dispositions analogues sont désormais applicables en liquidation judiciaire (C. com., art. R. 641-21, nouv.).

E - Le droit au paiement d'indemnité

La règle selon laquelle l'inexécution du contrat en cours peut donner lieu à des dommages et intérêt en cas de refus de l'administrateur de poursuivre le contrat ou de sa résiliation de plein droit du contrat (C. com., art. L. 622-13), dommages et intérêts devant être déclarés au passif, a été reprise. Afin de prendre en compte le nouveau cas de résiliation judiciaire à la demande de l'administrateur, le nouvel article L. 622-13 du Code de commerce a étendu la règle précitée à cette hypothèse.

Le nouvel article L. 641-11-1 du Code de commerce comporte des dispositions analogues applicables dans le cadre des liquidations judiciaires.

F - Les contrats exclus du droit commun du sort des contrats en cours

Le paragraphe VI du nouvel article L. 622-13 du Code de commerce a maintenu l'exclusion des contrats de travail du champ d'application de ce texte. Il prévoit un nouveau cas d'exclusion : le contrat de fiducie, à l'exception de la convention en exécution de laquelle le débiteur conserve l'usage ou la jouissance de biens ou droits transférés dans un patrimoine fiduciaire. Ce dernier contrat se trouve, toutefois, également exclu du champ d'application de l'article L. 641-11-1 du Code de commerce.

Les baux commerciaux sont donc, en principe et a priori, soumis aux dispositions articles L. 622-13 et L. 641-11-1 du Code de commerce. Elles devront s'articuler en conséquence avec les articles L. 622-14 (N° Lexbase : L3402ICY) et L. 641-12 (N° Lexbase : L3377IC3) du Code de commerce qui régissent le sort des baux commerciaux dont le preneur, placé en procédure collective, est titulaire.

Les nouveaux articles L. 622-14 et L. 641-12 du Code de commerce comportent des dispositions qui précisent l'articulation de ces règles générales avec celles spécifiques aux baux portant sur un immeuble affecté à l'activité du débiteur. Il semblerait, aux termes de ces nouvelles dispositions, que les cas de résiliation de plein droit et de résiliation judiciaire à la demande de l'organe compétent, prévus par ce régime général des contrats en cours, n'auront pas vocation à s'appliquer aux baux portant sur les locaux affectés à l'activité du débiteur.

II - Le sort des contrats en cours : les règles spécifiques aux baux d'immeubles affectés à l'activité de l'entreprise

A - En matière de sauvegarde et de redressement judiciaires

L'article L. 622-14 du Code de commerce régit la résiliation du bail des immeubles affectés à l'activité du débiteur qui fait l'objet d'une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire (par renvoi de l'article L. 631-14 du Code de commerce N° Lexbase : L3321ICY). Elles ne sont donc a priori pas applicables à la continuation des baux consentis par un bailleur en faillite, seules les dispositions des articles L. 622-13 et L. 641-11-1 du Code de commerce étant dans ce cas applicables. Le problème soulevé par l'application de ces dispositions dans ce cas n'est donc pas résolu (4).

L'ordonnance n° 2008-1345 du 18 décembre 2008 a maintenu les deux cas de résiliation déjà exposés à l'ancien article L. 622-14 du Code de commerce (N° Lexbase : L3873HB3) :
- décision de l'administrateur de ne pas continuer le bail, la résiliation prenant alors effet au jour de cette demande ;
- lorsque le bailleur demande la résiliation ou la fait constater pour défaut de paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement d'ouverture, cette action du bailleur ne pouvant être exercée qu'à l'expiration d'un délai de trois mois courant à compter du jugement d'ouverture. Si le paiement des sommes dues intervient dans ce délai, il n'y alors pas lieu à résiliation.

Toutefois, le texte a été modifié en ce qu'il prévoyait initialement que la résiliation était "constatée ou prononcée" dans les deux cas précités alors que, désormais, elle "intervient" dans ces hypothèses. Le but de cette modification est, peut-être, de lever toute contestation sur le type de résiliation qu'entraîne le choix de l'administrateur de ne pas continuer le bail. En effet, l'emploi des verbes "constater" ou "prononcer" renvoie à l'intervention d'un tiers, le plus souvent du juge, pour vérifier qu'une résiliation a eu lieu ou pour l'ordonner. Le terme "intervention" permet de soutenir que la résiliation par décision de l'administrateur est une résiliation de plein droit. Toujours dans le même sens, nous semble-t-il, la référence à la demande de l'administrateur est supprimée : c'est sa seule décision de ne pas continuer le bail qui entraîne la résiliation et non sa décision suivie d'une demande.

Il doit être noté que les dispositions de l'article R. 622-13 du Code de commerce accordant au juge commissaire le pouvoir de constater la résiliation de plein droit prévue à l'article L. 622-14 de ce code, ainsi que la date de cette résiliation, ont été maintenues.

Lorsque cette faculté a été accordée à l'administrateur de pouvoir décider de ne pas continuer les baux affectés à l'activité du débiteur, la question s'était posée de l'articulation des articles L. 622-13 et L. 622-14 du Code de commerce : le régime de droit commun de la continuation des contrats en cours devait-il être exclu pour ces baux ou bien fallait-il appliquer de manière cumulative ces textes ?

L'ordonnance n° 2008-1345 du 18 décembre 2009 apporte une réponse puisqu'elle a modifié l'article L. 622-14 du Code de commerce également pour préciser que la résiliation des baux affectés à l'activité du débiteur intervient dans les deux cas précités, "sans préjudice de l'application du I et du II de l'article L. 622-13 du Code de commerce". En conséquence, il y a lieu d'appliquer cumulativement ces deux textes mais seulement partiellement :
- le renvoi au paragraphe I implique que l'ouverture d'une procédure collective ne peut entraîner, nonobstant toute clause contraire, la résiliation de ces baux. La précision paraît superfétatoire sur ce point car une disposition du statut des baux commerciaux le prévoir déjà. Ce renvoi oblige également le cocontractant, donc le bailleur, à remplir ses obligations malgré le non-paiement des loyers antérieurs, ce qui ne faisait guère de doute mais il est préférable de l'avoir précisé ;
- le renvoi au paragraphe II induit que seul l'administrateur a la faculté d'exiger l'exécution des contrats en cours en fournissant la prestation due et en payant au comptant s'il s'agit d'une somme d'argent.

L'absence de renvoi aux autres dispositions de l'article L. 622-13 du Code de commerce devrait être interprétée comme excluant leur application pour les baux affectés à l'activité du débiteur. En conséquence, le mécanisme de la mise en demeure d'avoir à opter ne devrait pas s'appliquer en la matière, ni les cas de résiliation prévus par cet article.

Enfin, le nouvel article L. 622-14 du Code de commerce prévoit, à l'instar des dispositions l'article L. 622-13 auxquelles il ne renvoie pas sur ce point, que l'inexécution du bail peut donner lieu à des dommages et intérêts à déclarer au passif, mais seulement si l'administrateur décide de ne pas continuer le bail.

B - En matière de liquidation

Le nouvel article L. 641-12 du Code de commerce (N° Lexbase : L3377IC3) reprend l'essentiel des nouvelles dispositions applicables aux baux affectés à l'activité du débiteur placé en sauvegarde ou en redressement judiciaire (C. com., L. 622-13, nouv.).

Alors que dans son ancienne rédaction, l'article L. 641-12 du Code de commerce (N° Lexbase : L3905HBA) était muet sur l'application du droit commun de la continuation des contrats en cours, d'autant qu'il n'existait pas sous l'empire de l'ancienne législation de dispositions propres à la liquidation, le nouvel article L. 641-12 du Code de commerce prévoit expressément l'application des dispositions des paragraphes I et II de l'article L. 641-11-1 de code (absence de résiliation du contrat par l'effet de l'ouverture du jugement de liquidation, obligation pour le cocontractant d'exécuter ses obligations malgré la défaillance du débiteur, faculté reconnue au seul liquidateur d'exiger la continuation du contrat avec l'obligation corrélative de fournir la prestation due au cocontractant dans ce cas et de régler au comptant et obligation de mettre un terme au contrat à exécution ou paiement échelonnés à défaut des fonds nécessaires).

Le nouvel article L. 641-12 prévoit les deux mêmes cas de résiliation du bail qu'en sauvegarde ou redressement (C. com., art. L. 622-13, nouv.) : décision de l'organe de la procédure (liquidateur pour la liquidation judiciaire) de ne pas continuer le contrat et résiliation à l'initiative du bailleur (résiliation judiciaire ou constat de la résiliation) pour défaut de paiement des loyers et charges postérieurs au jugement de liquidation en renvoyant à l'article L. 622-14 du Code de commerce sur ce point.

Les dispositions de l'ancien article R. 641-21 du Code de commerce (N° Lexbase : L1049HZU) accordant au juge commissaire le pouvoir de constater la résiliation de plein droit prévue à l'article L. 641-12 de ce code, ainsi que la date de cette résiliation, ont été maintenues (C. com., art. R. 641-21, nouv. [LXB= L9312ICU]).

A l'instar de l'ancien article L. 641-12 du Code de commerce, ce texte dans sa nouvelle rédaction, prévoit la possibilité pour le bailleur de solliciter, en outre, la résiliation pour des causes antérieures au jugement de liquidation ou antérieures au jugement d'ouverture d'une procédure de sauvegarde ou de redressement qui a pu précéder le jugement de liquidation. La jurisprudence selon laquelle cette possibilité ne peut concerner le défaut de paiement des loyers antérieurs en vertu de la règle de suspension des poursuites (C. com., art. L. 622-21, nouv. N° Lexbase : L3452ICT), devrait continuer à s'appliquer (Cass. com., 30 mars 2005, n° 02-10.422, F-D N° Lexbase : A4440DHW).


(1) Pour un commentaire complet de la réforme, lire P.-M. Le Corre, Les principales modifications de la législation de sauvegarde des entreprises résultant de l'ordonnance du 18 décembre 2008 et de son décret d'application du 12 février 2009, Lexbase Hebdo n° 338 du 19 février 2009 - édition privée générale (N° Lexbase : N5648BIZ) ; et pour les dispositions intéréssants plus spécifiquement le droit des sûretés, v. les obs. de G. Piette, Les sûretés dans l'ordonnance n° 2008-1345 du 18 décembre 2008, portant réforme du droit des entreprises en difficulté, Lexbase Hebdo n° 339 du 26 février 2009 - édition privée générale (N° Lexbase : N5724BIT).
(2) Sur ce point, voir nos obs., Réforme des procédures collectives : le sort du bail commercial en cours au jour de l'ouverture de la procédure, Lexbase Hebdo n° 181 du 15 septembre 2005 - édition affaires (N° Lexbase : N8462AIA).
(3) Sur cet arrêt, lire P.-M. Le Corre, L'absence d'équivalence de la non-continuation du contrat et de sa résiliation en l'absence de mise en demeure, Lexbase Hebdo n° 122 du 15 juillet 2004 - édition affaires (N° Lexbase : N2356ABU).
(4) Sur ce point, cf. Th. Grundler, La résiliation du bail commercial en vertu des articles 37 et 153-3 de la loi du 25 janvier 1985 en cas de redressement ou de liquidation du bailleur, Administrer, novembre 1998, p. 10 ; Fabien Kendérian, Le bail commercial relève-t-il du régime des contrats en cours en cas de procédure collective du bailleur ?, D., 2003, Cahier droit des affaires, chron. p. 610.

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