En refusant d'affecter un officier naviguant à un stage de qualification au motif qu'il atteindrait l'âge de soixante ans avant la durée minimale d'affectation prévue sur l'avion, l'employeur, qui n'apportait aucun élément précisant que le refus opposé au salarié était justifié par un objectif légitime, a commis une discrimination à raison de l'âge. Telle est la décision rendue par la Chambre sociale de la Cour de cassation le 18 février 2014 (Cass. soc., 18 février 2014, n° 13-10.294, FS-P+B
N° Lexbase : A7686MEE).
En l'espèce, un pilote s'était porté volontaire pour un stage de qualification sur un avion. Devant atteindre l'âge de soixante ans avant la durée minimale d'affectation prévue, la société avait refusé, invoquant les dispositions de la convention d'entreprise aux termes desquelles un pilote peut prétendre à une qualification pour un avion donné tant que la durée de son affectation, avant son départ à la retraite est supérieure ou égale à la durée minimale d'affectation due. Le salarié a saisi le juge des référés de demandes tendant à faire cesser un trouble manifestement illicite résultant d'une discrimination fondée sur l'âge. La cour d'appel de Paris (CA Paris, Pôle 6, 2ème ch., 8 novembre 2012, n° 11/10742
N° Lexbase : A5996IWY ayant fait droit à sa demande, la société s'est pourvu en cassation.
Elle alléguait que la possibilité ouverte par l'article L. 421-9 du Code de l'aviation civile
N° Lexbase : L5974ICA) de piloter jusqu'à l'âge de soixante-cinq ans ne résultait que du choix individuel du salarié qui devait être renouvelé chaque année, et que cet aléa excluait l'existence d'un trouble manifestement illicite. En outre, elle soutenait que ne pouvait pas être présumer, a priori, que l'exercice des fonctions de pilote pouvait s'exercer au-delà de soixante ans en se fondant sur l'interprétation des dispositions du Code de l'aviation et de la convention d'entreprise.
Pour rejeter le pourvoi, la Haute juridiction rappelle que l'article L. 1132-1 du Code du travail (
N° Lexbase : L8834ITD) interdit qu'une personne fasse l'objet d'une mesure de discrimination, notamment en matière de formation, de qualification ou de promotion professionnelle, en raison de son âge. Elle relève que l'employeur n'apportait aucun élément faisant apparaître que le refus opposé au salarié était justifié par un objectif légitime, et précise que tout navigant peut, quel que soit son âge, mettre fin au contrat de travail qui le lie à la société ou ne plus être autorisé à piloter en raison d'un problème de santé constaté lors d'une visite médicale, alors qu'il a pu bénéficier d'une récente qualification non encore amortie. Retenant également que l'objectif de sécurité publique était assuré pour les pilotes de plus de soixante ans par l'article L. 421-9 du Code de l'aviation civile, la Cour de cassation a considéré qu'il y avait eu discrimination fondée sur l'âge constitutive d'un trouble manifestement illicite (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E2589ET3).
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