Jurisprudence : CE Contentieux, 14-12-2001, n° 211341

CE Contentieux, 14-12-2001, n° 211341

A7339AX4

Référence

CE Contentieux, 14-12-2001, n° 211341. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/1078886-ce-contentieux-14122001-n-211341
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Abstract

Aux termes d'un arrêt du Conseil d'Etat rendu le 14 décembre 2001, le mécanisme d'imposition immédiate des plus-values mobilières en cas de transfert du domicile fiscal hors de France justifie un recours préjudiciel auprès de la CJCE, eu égard au nécessaire respect par les Etats membres du principe de la liberté d'établissement institué par l'article 52 du Traité CE (devenu, après modification, article 43 CE).. L'article 167 bis du CGI prévoit l'assujettissement immédiat des contribuables qui se disposent à transférer hors de France leur domicile fiscal, dans les conditions qu'il définit, à une imposition assise sur des plus-values non encore réalisées et qui, de ce fait, ne seraient pas taxées si les intéressés maintenaient en France leur domicile.



CONSEIL D'ETAT

Statuant au contentieux

Cette décision sera mentionnée au Recueil Lebon

N° 211341

M. de LASTEYRIE DU SAILLANT

M. Fabre, Rapporteur
M. Goulard, Commissaire du gouvernement

Séance du 30 novembre 2001
Lecture du 14 décembre 2001


REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d'Etat statuant au contentieux

Sur le rapport de la 9ème sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête, enregistrée le 6 août 1999 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Hughes de LASTEYRIE DU SAILLANT, demeurant 4, Val de la Futaie, à Bruxelles (Belgique); M. de LASTEYRIE DU SAILLANT demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 99-590 du 6 juillet 1999 portant application de l'article 24 de la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998) relatif aux modalités d'imposition de certaines plus-values de valeurs mobilières en cas de transfert du domicile fiscal hors de France et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 30 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Vu les autres pièces du dossier;


Vu le Traité CE, notamment son article 52 (devenu, après modification, article 43 CE) ;


Vu le code général des impôts;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique

- le rapport de M. Fabre, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;


Considérant que la requête de M. de LASTEYRIE DU SAILLANT, dans le dernier état des conclusions formulées par celui-ci, tend à l'annulation pour excès de pouvoir du décret n° 99-590 du 6 juillet 1999 portant application de l'article 24 de la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998) relatif aux modalités d'imposition de certaines plus-values de valeurs mobilières en cas de transfert du domicile fiscal hors de France. en tant que ledit décret a trait à l'application des dispositions de l'article 167 bis que l'article 24 de la loi a ajouté au code général des impôts ;

Considérant qu'aux termes de l'article 167 bis du code général des impôts issu de l'article 24 de la loi de finances pour 1999 du 30 décembre 1998, dans sa rédaction en vigueur à la date du décret attaqué : "I. 1. Les contribuables fiscalement domiciliés en France pendant au moins six années au cours des dix dernières années sont imposables, à la date du transfert de leur domicile hors de France, au titre des plus-values constatées sur les droits sociaux mentionnés à l'article 160... II. 1. Le paiement de l'impôt afférent à la plus-value constatée peut être différé jusqu'au moment où s'opérera la transmission, le rachat, le remboursement ou l'annulation des droits sociaux concernés. Le sursis de paiement est subordonné à la condition que le contribuable déclare le montant de la plus-value constatée dans les conditions du I, demande à bénéficier du sursis, désigne un représentant établi en France autorisé à recevoir les communications relatives à l'assiette, au recouvrement et au contentieux de l'impôt et constitue auprès du comptable chargé du recouvrement, préalablement à son départ, des garanties propres à assurer le recouvrement de la créance du Trésor. Le sursis de paie-ment prévu au présent article a pour effet de suspendre la prescription de l'action en recouvrement jusqu'à la date de l'évènement entraînant son expiration. Il est assimilé au sursis de paiement prévu à l'article L. 277 du livre des procédures fiscales pour l'application des articles L. 208, L. 255 et L. 279 du même livre... 3. ... l'impôt dont le paiement a été différé n'est exigible que dans la limite de son montant assis sur la différence entre le prix en cas de cession ou de rachat, ou la valeur dans les autres cas, des titres concernés à la date de l'évènement entraînant l'expiration du sursis, d'une part, et leur prix ou valeur d'acquisition..., d'autre part. Le surplus est dégrevé d'office... L'impôt acquitté localement par le contribuable et afférent à la plus-value effectivement réalisée hors de France est imputable sur l'impôt sur le revenu établi en France à condition d'être comparable à cet impôt... III. A l'expiration d'un délai de cinq ans suivant la date du départ ou à la date à laquelle le contribuable transfère de nouveau son domicile en France si cet évènement est antérieur, l'impôt établi en application du I est dégrevé d'office en tant qu'il se rapporte à des plus-values afférentes aux droits sociaux qui, à cette date, demeurent dans le patrimoine du contribuable. IV. Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent article, et notamment les modalités permettant d'éviter la double imposition des plus-values constatées ainsi que les obligations déclaratives des contribuables et les modalités du sursis de paiement" ;

Considérant, en premier lieu, que ces dispositions n'ont, contrairement à ce que soutient M. de LASTEYRIE DU SAILLANT, ni pour objet, ni pour effet de soumettre à de quelconques restrictions ou conditions l'exercice effectif, par les personnes qu'elles visent, de la liberté d'aller et venir ;

Considérant, en second lieu, que les dispositions de l'article 52 du traité CE (devenu, après modification, article 43 CE), s'opposent, notamment, à l'institution par un Etat membre de règles qui auraient pour effet d'entraver l'établissement de certains de ses ressortissants sur le territoire d'un autre Etat membre ;

Considérant que l'article 167 bis précité du code général des impôts prévoit l'assujettissement immédiat des contribuables qui se disposent à transférer hors de France leur domicile fiscal, dans les conditions qu'il définit, à une imposition assise sur des plus-values non encore réalisées et qui, de ce fait, ne seraient pas taxées si les intéressés maintenaient en France leur domicile ; qu'il comporte, toutefois, des dispositions permettant d'éviter, en cas de sursis de paiement, que ces contribuables n'aient, en définitive, à supporter une charge fiscale à laquelle ils n'auraient pas été soumis, ou plus lourde que celle à laquelle ils auraient été soumis, s'ils avaient conservé leur domicile en France, et, en outre, leur accordant, au terme d'un délai de cinq ans, le bénéfice d'un dégrèvement, dans la mesure où les droits sociaux porteurs des plus-values continuent, alors, de figurer dans leur patrimoine ; qu'enfin, les intéressés ont la faculté de solliciter le sursis au paiement de l'imposition jusqu'à ce terme ; que l'obtention de ce sursis est, cependant, subordonnée à la condition qu'ils constituent des garanties propres à assurer le recouvrement de l'imposition; qu'eu égard aux sujétions que peut comporter la constitution de telles garanties, la question, soulevée par le requérant, de savoir si le principe de la liberté d'établissement posé par l'article 52 du traité CE (devenu, après modification, article 43 CE) s'oppose à ce qu'un Etat membre institue, à des fins de prévention d'un risque d'évasion fiscale, un mécanisme d'imposition des plus-values en cas de transfert du domicile fiscal, tel que celui décrit ci-dessus, présente une difficulté sérieuse ; que, par suite, en application de l'article 177 (devenu 234) dudit traité, il y a lieu d'en saisir, à titre préjudiciel, la Cour de justice des Communautés européennes, et, jusqu'à ce que celle-ci se soit prononcée, de surseoir à statuer sur la requête de M. de LASTEYRIE DU SAILLANT;

DECIDE::

Article 1er : Il est sursis à statuer sur la requête de M. de LASTEYRIE DU SAILLANT jusqu'à ce que la Cour de justice des Communautés européennes se soit prononcée sur la question préjudicielle énoncée dans les motifs de la présente décision.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Hughes de LASTEYRIE DU SAILLANT, au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et au ministre des affaires étrangères, ainsi qu'au président de la Cour de justice des Communautés européennes.




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