Jurisprudence : Cass. crim., 02-07-1998, n° 98-80.529, Cassation

Cass. crim., 02-07-1998, n° 98-80.529, Cassation

A5262ACU

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Cass. crim., 02-07-1998, n° 98-80.529, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/1051317-cass-crim-02071998-n-9880529-cassation
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION
Chambre Criminelle
02 Juillet 1998
Pourvoi N° 98-80.529
X
CASSATION sur le pourvoi formé par X, contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 17 décembre 1997, qui l'a renvoyé devant la cour d'assises des Alpes-Maritimes pour empoisonnement. LA COUR, Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 301 ancien, 121-3 et 221-5 nouveaux du Code pénal, de l'article 111-3 du même Code et du principe de la légalité des délits et des peines, de l'article 7 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale
" en ce que l'arrêt attaqué a renvoyé X devant la cour d'assises du chef d'empoisonnement ;
" aux motifs que X, conscient d'être porteur du virus du SIDA, a, délibérément, contaminé Y, en lui faisant accepter des relations sexuelles non protégées et alors qu'il savait qu'elle était saine audit virus ; qu'en l'état de la science médicale, cette maladie est incurable ; que l'intention d'empoisonner se caractérise par le fait de vouloir transmettre des substances mortifères en connaissance de cause ;
" alors, d'une part, que l'élément matériel du crime d'empoisonnement consiste dans l'administration d'une substance de nature à entraîner la mort ; que la constatation qu'une maladie est "incurable" ne signifie pas nécessairement que la maladie est inéluctablement mortelle ;
" alors, d'autre part, que l'administration d'une substance mortelle suppose que le caractère mortifère de la substance administrée soit certain et dépourvu de tout aléa ; que X faisait valoir que la substance administrée au cours de relations sexuelles n'était pas le virus du SIDA, mais le sperme, la transmission du virus restant à l'état de risque et la contamination n'étant pas assurée, même si elle était possible ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ce point de nature à exclure la qualification d'empoisonnement, faute d'administration d'une substance nécessairement mortifère, la chambre d'accusation a privé sa décision de toute base légale ;
" alors, de surcroît, que l'élément intentionnel du crime d'empoisonnement suppose non seulement l'intention d'administrer une substance mortifère, mais l'intention de tuer ; qu'ainsi, la chambre d'accusation a, directement, méconnu les textes d'incrimination en se contentant expressément de l'intention de transmettre des substances mortifères ;
" alors, enfin, et en tout état de cause, que ne caractérise pas l'empoisonnement l'arrêt qui se borne à constater qu'une personne se sachant porteur du virus du SIDA a eu des relations sexuelles non protégées avec une personne saine, un tel comportement, quel que soit son caractère risqué et éventuellement pervers n'étant pas de nature à caractériser le caractère nécessaire mortifère du sperme, ni le caractère automatique du processus de contamination, et l'arrêt ne caractérisant pas davantage la connaissance qu'aurait eue l'auteur de ce caractère mortifère du sperme ou du caractère inéluctable de la contamination " ;
Vu les articles 301 ancien et 221-5 du Code pénal, 214 et 593 du Code de procédure pénale ;
Attendu que les chambres d'accusation ne peuvent prononcer une mise en accusation devant la cour d'assises que si les faits dont elles sont saisies réunissent tous les éléments constitutifs de l'infraction reprochée ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Y aurait engagé avec X une relation sentimentale, puis accepté d'avoir des rapports sexuels protégés ; qu'elle se serait soumise, à la demande de X, à un examen sanguin ayant démontré qu'elle était indemne du virus de l'immunodéficience humaine (VIH), mais qu'il se serait refusé à faire de même en lui certifiant qu'il n'était pas séropositif, alors qu'il était soigné pour cette maladie depuis plusieurs années ; qu'ils auraient eu alors des rapports sexuels non protégés, à la suite desquels un nouvel examen sanguin aurait révélé que Y était atteinte du virus ;
Attendu que, pour renvoyer X devant la cour d'assises sous l'accusation d'empoisonnement, la chambre d'accusation retient que, connaissant le mode de transmission du VIH, " virus d'une maladie mortelle ", il aurait délibérément contaminé Y ; qu'elle énonce, d'une part, que l'intention d'empoisonner se caractérise par le fait de vouloir transmettre des substances mortifères en connaissance de cause, quel que soit le mode de transmission " et, d'autre part, que " le fait d'inciter sa partenaire à ne plus se protéger, lors des rapports sexuels alors qu'il avait connaissance qu'elle n'était pas porteuse du virus, suffit à caractériser l'intention homicide ;
Mais attendu qu'en l'état de ces motifs, pour partie contradictoires, alors que la seule connaissance du pouvoir mortel de la substance administrée ne suffit pas à caractériser l'intention homicide, la chambre d'accusation n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Par ces motifs
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre d'accusation de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 17 décembre 1997, et pour qu'il soit jugé à nouveau, conformément à la loi, RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel de Montpellier.

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